Chapitre 2
La journée a été un peu étrange, ils étaient aux petits soins pour moi, sauf peut-être Hugo, qui fronçaitfonçait parfois les sourcils lorsque Gauthier me chouchoutait un peu trop ouvertement…
On est rentrés tard à Clermont-Ferrand, on avait perdu du temps le matin à cause de moi, et mes frères ont accepté de me laisser seule uniquement parce que je leur ai juré d’aller voir le médecin le lendemain si ça n’allait pas mieux. Mon médecin, je le voyais tellement souvent que j’aurais été incapable de le reconnaitre si je l’avais croisé dans la rue… J’ai tiré le verrou derrière moi, posé mon sac, et je me suis fait couler un bain. Silence, enfin… J’avais un peu mal au crâne, une sensation inhabituelle…
Après une bonne nuit de sommeil, le lendemain je me sentais beaucoup mieux, et je n’ai même pas eu à mentir à Nico quand il m’a appelée pour prendre de mes nouvelles.
Pourtant, je me posais toujours des questions.
N’y tenant plus, le mercredi à midi j’allai attendre Clément à la sortie du gymnase où il enseignait le sport. Je vis défiler des hordes d’adolescents, et enfin les profs.
« Louise ? Que fais-tu là ?
_ Il faut que je te parle.
_ OK… Je dois repasser au collège, j’ai des papiers à donner à l’administration. Tu as cinq minutes ?
_ Bien sûr.
_ Tiens, attends-moi dans ma voiture, après je t’emmène manger quelque part. » proposa-t-il en me donnant ses clés, désignant du doigts sa vieille Clio garée un peu plus loin. Je m’assis à la place du passager et le regardai s’éloigner avec ses collègues. Son jean lui moulait les fesses, et… merde, Louise, réveille-toi ! Je me serais mis des baffes…
« Alors, ça va mieux, depuis dimanche ? » attaqua Clément en s’installant au volant.
« Ça va mieux, oui. Merci.
_ Cool. Je t’emmène où ?
_ T’es pas obligé de m’inviter, tu sais…
_ Je t’emmènerais bien chez moi, mais les placards sont vides, il faut que j’aille en courses. Et j’ai trop la dalle pour attendre. Brasserie ? Pizzeria ? Indien ? »
Je le laissai décider, et il m’emmena dans une brasserie toute proche. Je commandai un croque-monsieur avec une salade, et lui le plat du jour, une viande en sauce avec des frites.
« Alors, tu voulais me parler ? » me demanda-t-il en coupant sa viande.
« Oui… » Je pris le temps de manger un petit coin de mon croque-monsieur, avant de me lancer : « Il s’est passé quoi, Clément, sous la tente ?
_ Comment ça, il s’est passé quoi ? On a dormi.
_ Je… Ecoute, j’ai fait des rêves étranges, dont je ne me souviens pas, et je me suis réveillée en nage, avec une sensation bizarre. Comme si…
_ Je ne sais pas à quoi tu penses, ma belle, mais les nanas que je mets dans mon pieu, je les préfère consentantes. Et conscientes, aussi.
_ Alors…
_ Alors tu as dormi toute la nuit, pour autant que je sache parce que moi aussi j’ai pioncé. Si tu veux les détails, je suis allé pisser au petit matin, et à mon retour tu étais déjà sapée, tu avais une tête bizarre et tu t’es barrée. »
J’ai baissé les yeux, joué avec une feuille de salade dans mon assiette.
« C’est ça, l’opinion que tu as de moi ? » me demanda-t-il, l’air dégouté, en posant ses couverts sur la table près de son assiette. Il s’était appuyé au dossier de sa chaise, et me regardait de biais.
« Non ! Je n’arrivais pas à y croire, Clément. C’est pour ça que je n’ai rien dit. Mais depuis j’arrête pas d’y penser, ça m’obsède et je veux comprendre… Excuse-moi, j’aurais jamais dû te parler de ça.
_ Au contraire, tu aurais dû m’en parler dimanche matin, quand tu t’es réveillée. Ça t’aurait évité de te rendre malade. » me dit-il doucement, penché sur la table.
Je baissai les yeux, me mordillai les lèvres.
« Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait, j’ai flippé…
_ Bordel, si t’as fait un rêve érotique alors qu’on dormait dans la même tente, y’a pas de quoi avoir honte, princesse. A la limite, je pourrais même me sentir flatté… Quoi ? » demanda-t-il « Me dis pas que c’est la première fois que ça t’arrive ?
_ Ben… si. »
Il se mit à rire, mais gentiment. « Allez, mange, ça va être froid. » me conseilla-t-il en reprenant ses couverts. « T’as quel âge, déjà ?
_ Vingt-trois. »
Un rêve érotique ? Vraiment ? Je me sentais gourde. On a continué à manger en silence, je digérais l’information. Je ne me sentais pas vraiment à l’aise.
Dans la voiture, à un feu rouge, il me regarda :
« Princesse… Ça va, OK ? J’aurais préféré que tu m’en parles tout de suite, mais je ne t’en veux pas. »
Je hochai la tête. « Je suis désolée, Clément, vraiment… »
Il m’assura encore qu’il ne m’en voulait pas, et me déposa devant chez moi avant d’aller faire ses courses. N’ayant plus ce poids sur le cœur, je respirais mieux. Je fus beaucoup plus efficace dans mon travail, et bien plus contente de moi à la fin, quand je regardai mes productions avec un œil critique.
Le soir, je retrouvai mon frère au dojo, pour notre cours de judo. Il aimait bien parler en courant, pendant l’échauffement, et me cuisina sur ma santé et mes occupations du début de semaine. Je ne lui racontai pas que j’avais déjeuné avec Clément le midi, je me sentais vraiment coupable d’avoir pu le soupçonner d’un comportement pareil, et je n’avais pas la moindre envie d’en parler avec Virgile…
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