Données cryptées : la danse du diable
La danse conduit au chaos. La musique conduit à la perdition. Dans beaucoup de sociétés puritaines, il était interdit de danser, de chanter ou de jouer de la musique.
La cité où vivait Rose était de celles-là.
Or, un soir, un bel étranger s’invita à la fête. Il émergea de la nuit, tout de noir vêtu. Il était beau : beau danseur, beau parleur. Malgré les mises en garde du prêtre, la jeune fille s’arracha à sa famille, ses amis, les braves gars du village, pour danser dans les ténèbres avec l’inconnu. L’homme de Dieu avait bien deviné ce qui se tramait : c’était son âme que la belle Rose jouait avec tant de frivolité. Parfois, le bon curé parvenait à la soustraire à la danse enfiévrée de son sinistre cavalier. Parois, il l’enlevait, elle revenait. De plus en échevelée, blessée, soumise. Jusqu’à la disparition totale. Plus jamais on ne la revit.
Ce motif, on le retrouve dans maintes chansons de l’Ancien Monde. La figure cornue de l’ange déchu se perd dans le tourbillon des êtres surnaturels qui enlevaient de belles mortelles : Roi de la montagne, Hind Etin, Elf knight ou autre joueur de pipeau charmant et noyant les enfants innocents. Il se fond dans le tourbillon du peuple de la nuit, ces ténèbres d’où jaillissent des gueules qui dévorent, des ongles qui découpent, des bras qui se referment sur une victime. Une sarabande des mille démons dont les mains se terminent par des griffes et dont les masques insolites laissent entrevoir des crocs.
Jan Duarte, Contes et croyances de l’Ancien Monde
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