Grenade
On est dans un bar le soir. Un bar restaurant un peu miteux, en réalité. Mon petit ami est là, mon père aussi. C'était censé être une sortie basique où tout se passe comme prévu et où le petit ami fait des commentaires bêtes par intimidation du paternel.
On s'installe, on commence à regarder la carte de l'établissement. Soudain, je suis interpellée par un mouvement dehors. Trois hommes se disputent de l'autre côté de la fenêtre et ne semblent pas nous voir. Leurs visages sont rouges, gonflés et l'un crie spécifiquement contre un autre, soutenu par le deuxième. Les attaquants acculent leur victime contre le muret dans son dos. Je remarque qu'une bougie flotte au-dessus de chacune de leurs têtes. Elles peinent à rester allumer.
Mon petit ami me dit de me calmer, qu'il ne va rien arriver. Mon père est imperturbable devant sa carte. J'acquiesce avant de remarquer que nous aussi nous avons une bougie, grande et flamboyante, mon père un peu plus courte que la nôtre. Un bruit contre la vitre me prend alors par surprise. Le dos d'un des hommes vient de la heurter. Je devine qu'il s'agit de l'attaqué puisque celui vraiment en colère lui lance un objet que je ne vois pas sur le moment. Quelques secondes plus tard, mon copain, tout comme moi, entendons un bruit de détonation. Une grenade ou une bombe?
Nos visages s'étaient fixés sur la scène et le pauvre homme, victime de l'explosion, parti en morceaux. Je reste fixe, trop effrayée et choquée pour pouvoir bouger. Mon copain se cache les yeux, marmonnant des phrases incompréhensibles. La scène est précise. Le sang se retrouve en suspens dans l'air avant de recouvrir le sol et les membres volants atterrissent lourdement, rattrapés par la gravité. Un œil tombe au pied du meurtrier le plus agressif et je le vois rire. Son comparse pointe du doigt la bougie consumée et brûlée de leur victime, un sourire au coin.
J'arrive enfin à tourner la tête, ma mémoire et ma vue remplies de l'image de ce corps se décomposant, et jonchant le sol et les airs. Je crie à mon père qu'il faut appeler la police. Il valide d'un hochement de tête. Je saisis le téléphone et appelle de l'aide. J'ai peur de ses hommes, je vois leurs visages très nettement, ils sont en sueur tellement ils rient. Ils commencent à s'éloigner, laissant la victime éparpillée, son sang tachant aussi la vitre du restaurant. Et s'ils entrent... S'ils nous ont vus être témoins de ce meurtre. Qu'est-ce qu'il nous ferait? Mourir sans qu'on ne puisse rien mettre dans mon cercueil. Je me rassure en sachant qu'une longue bougie brûle encore pour moi, mais une clochette se met à tinter. Ils sont là. A l'intérieur. Ils boivent un café. Ne pas les dévisager pour ne pas les inquiéter. Ne pas leur mettre le doute et leur donner une raison de nous tuer... Je me réveille lorsqu'il commence à avancer vers nous dans le bar, trop terrorisée pour voir ce que mon cerveau a prévu pour la suite.
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