Maman les p'tits bateaux

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Hey salut ma maman adorée !  – non beaucoup trop forcé – Salut maman, désolé j’ai pas répondu à ton appel mais t’inquiètes tout va bien, c’est que, que, j’ai pas mal de boulot donc,  donc – n’importe quoi, je passe mes journées à ne rien faire – je dois t’avouer que je fais semblant de  rater tes appels, en vérité j’ai tout le temps de parler parce que je fous rien, mais c’est juste que …AAH mais pourquoi c’est si dur de t’envoyer un message maman, pourquoi c’est si compliqué de te parler, hein ? Qu’est-ce qui fait comme ça que je me sens obligé de te mentir, de te faire croire que tout va bien ? Alors que, que, mais, mais je veux pas t’inquiéter je sais pas, je veux absolument que tu penses que je vais bien. J’ai l’impression que je suis obligée, que c’est un devoir tu comprends d’aller bien, pourquoi maman ? Qu’est-ce qui dans notre relation ne va pas, qu’est-ce qui bloque ? Pour que je puisse pas te dire simplement que, ça ne va pas maman, parce que ça ne va pas maman.

C’est pas dur à prononcer mais à te dire, te parler en face, putain ça fait mal parce que derrière y’a toutes ces années où j’ai menti, où j’ai fait semblant d’être adulte et responsable. Est-ce que j’ai l’air adulte et responsable ? Parce que la vérité c’est que je me sens pas à la hauteur, tu vois, de tout ça : étudier, travailler, réussir sa vie, j’crois que j’ai pas envie de grandir. Je suis une gamine une gamine stupide qui prétend réussir à faire croire aux autres qu’elle n’est pas une gamine ou plutôt non qui réussit à faire croire aux autres qu’elle est une adulte mais elle-même elle n’y croit pas, merde, je comprends même pas ce que je raconte, mais je suis pas quelqu’un d’adulte maman, je peux passer des journées entières à pleurer juste comme ça parce que je me sens bête et inutile.

Tellement je suis une pleurnicharde, j’ai toujours deux paquets de mouchoirs dans mon sac, je dors avec un doudou maman, nan avec trois en fait tellement je me sens fragile, mais c’est une pyramide de doudous qui faudrait pour me consoler, comme quand j’étais petite et que j’avais tellement de peluches que je pouvais me cacher dedans, là je me sentais en sécurité, ou ptet juste toi maman, si j’arrivais à te le dire, juste toi, pour me rassurer, tu me chanterais ma berceuse, toujours comme quand j’étais petite « maman les ptits bateaux qui vont sur l’eau ont-ils des ailes ? Mais oui mon gros béta s’ils n’en avaient pas ils ne voleraient pas » mais moi je chante faux alors rappelle moi maman parce que je répondrai cette fois, rappelle moi parce que je crois que j’ai des trucs à te dire, parce que le jour où tu seras plus là, parce que oui ce jour va arriver un jour, je le sais, et bien ce jour-là je vais regretter, surement, de pas t’avoir, de ne pas avoir été sincère avec toi au moins un fois, alors rappelle moi, et prépare toi maman parce que je crois que je viens de comprendre que j’ai le droit de t’inquiéter, parce que je suis ta fille et que tu es ma mère et que quelque part si tu m’appelles, c’est bien pour que je te parles non ? Alors ok, parlons maman, parlons.

« Va quand tu seras grand tu f’ras le tour du mooondeuh sur un bateau charmant marchant au commandement. »  Je t’aime maman.

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