Il était là, bedonnant, mou, ne sachant pas quoi faire de ses deux mains étendues le long de son corps, comme des poids qui lui voutaient le dos. Son corps tordu vers l'avant était aussi frêle qu'une brindille et ses épaules osseuses, saillantes, presque tranchantes étaient couvertes d'un immense pull verdâtre. Un contraste disymétrique entre l'énorme ventre et la maigreur de ses épaules qui rendait le tout insupportable à regarder. Le teint fade, les cheveux fades, tout était fade chez lui. Il était comme un fantôme, un pâle souvenir de ses pauvres heures de gloire si tant est qu'il en ait eu.

Son visage émacié avait une forme étrange ; son menton proéminent et ses yeux globuleux formaient un mélange surprenant. Son nez, long et recourbé cachait sa lèvre supérieure, bien que tellement fine que presque inexistante. La clarté de ses yeux vous glaçait le sang. Sa peau translucide exhibait, par taches bleues et vertes, des veines noueuses qui sinueusement s'enroulaient autour de ses grandes et maigres mains.

Il demeurait là, debout, stoïque au milieu de son salon, dans son pull vert, abimé par le temps. Il était jeune. Même si son faciès était ridé, on savait qu'il était jeune. Mais la jeunesse n'est pas la même pour tout le monde. Lui la subissait si bien que son faible corps avait tenté de vieillir avant l'heure, vaine tentative pour fuir la triste réalité de son quotidien, rythmé par les moqueries, victime de sa laideur.