07 - Masque du Loup Rouge
18e jour de la saison du soleil 2448
Deux yeux brillants perçaient la noirceur de la nuit. Les écailles de Tyrath reflétaient la lueur lunaire. Il donna un dernier coup d'aile puissant et atterrit sur le balcon dans un tremblement.
- Tyrath! s'exclama Azéna.
Elle s'approcha du dragon avec misère. Son équilibre avait grandement été réduit par l'alcool. À sa grande surprise, le dragon la poussa doucement à sa droite et se rugit avec une telle férocité que Zamir recula de quelques pas. Il grogna, sa queue fouettant l'air. Ses yeux violets brillaient avec mépris.
- Arrière ou je te dévore, vaurien de louveteau.
Il détourna son attention vers Azéna.
- Tu appelles ce truc de la royauté? Même humain serait généreux dans son cas.
Il fixa ses yeux enragés sur le prince et rugit encore une fois. Cette-fois, une bouffée d'air puissante secoua la place. Azéna fixa son compagnon avec confusion.
- Qu'est-ce qui te prend?
Zamir lâcha prise de sa bouteille de vin et s'adossa contre le mur du château, paralysé par la peur.
- Qu'est-ce qu'il dit? C'est que s-son accent...
Tyrath renifla, peu impressionné par le prince. Il ignora la question d'Azéna et sonda Zamir avec intérêt. Après quelques instants, il leva la tête et sourit en coin.
- Il est stressé. Je sens sont cœur battre à tout rompre jusqu'à dans mes tripes.
Azéna explosa dans sa rage.
- Vas-tu bien m'expliquer ce qui se passe? beugla-elle. Ce n'est pas drôle si c'est une blague.
Les poings serrés, elle attendit une réponse en fusillant Tyrath du regard. Le drake montra les dents.
- Regarde par toi-même! Regarde l'enceinte du château! Regarde ta cité!
Azéna obéit. Ce qu'elle aperçut lui déchira l'âme. De la fumée provenant de multiples endroits dans la cité montait vers le ciel. Maintenant qu'elle s'y concentrait, elle entendait les cris affolés des habitants. Les yeux écarquillés, elle aperçut les soldats de son père adoptif qui se battait contre ceux de Maroth.
- C'est l'aspérule blanche contre le loup rouge, expliqua Tyrath. Le pacifique contre le traître.
- Le traître? questionna Azéna, toujours insouciante de ce qui se passait.
- Ouvre les yeux, Azéna! Réalise ce qui se passe autour de toi!
Zamir tenta de s'enfuir, mais Tyrath bondit sur lui et l'arrêta dans sa course en le renversant. Il se tortilla dans l'espoir d'échapper au prédateur, mais renonça à la lutte lorsque Tyrath grogna, les crocs à quelques centimètres de son visage. Il se recroquevilla en espérant recevoir de la pitié du dragon.
- Traitre! rugit Tyrath. Tu ne toucheras pas un poil de ma dragonnière.
Zamir réussit qu'a comprendre la moitié de ce que le drake lui racontait. Par contre, la rage dans la voix de la créature ailée le rendit nerveux et il jugea que rester silencieux était la sage décision à prendre.
- Arrête ! ordonna Azéna. Peut-être n'était-il pas au courant de cette traîtrise. A-t-il l'air dangereux à tes yeux?
- Tu es faible, répliqua Tyrath. Tu es attaché à ce gamin alors qu'il était sur le point de te mordre la nuque.
- Comment peux-tu le savoir? Tu es trop dur.
Les yeux de Tyrath s'écarquillèrent. D'abord, Azéna crut qu'elle discernait de la rage dans l'expression de son compagnon, mais elle se rendit vite compte que c'était la peur qui le trahissait. Soudainement, ce dernier poussa Zamir en direction du mur comme pour le délaisser pour quelque chose de plus important et s'élança vers elle. Dans sa course, il souffla une bourrasque dans sa direction. Azéna fut projeté vers l'arrière et frappa dans quelque chose. Un grognement puis, un bruit de métal frappant contre de la pierre retentit. Quelqu'un la poussa vers l'avant. La dragonnière se retourna pour voir un homme vêtu de noir grimper le rebord du balcon.
- Pousse-toi du chemin, ordonna Tyrath.
Azéna obéit et le dragon s'élança vers l'avant, empoigna l'homme et dans sa course éffrenée, il passa par-dessus bord. Il tenta de traîner l'assassin avec lui, mais l'homme était rapide et s'évada aisément de son emprise. Ce dernier rejoint Zamir et l'aida à se lever.
- Quel est ton problème maintenant? demanda-t-il au prince. Pourquoi ne fais-tu rien? Tu es un guerrier qui excelle dans son domaine.
Azéna remarqua immédiatement que l'assassin adressait Zamir sur un ton familier ce qui signifiait qu'ils étaient sûrement proches. Zamir ne répondit pas; il ne lâcha pas sa promise du regard. Son expression incertaine semblait affligée par la confusion.
- Excusez mon impolitesse mon prince, mais la bête n'était pas censée être ici, continua l'assassin sur une voix empoisonnée. Tu voudrais pas être dévoré vivant, n'est-ce pas? Ton père ne serait pas content avec moi et je tiens à garder ma tête. Alors, lève-toi et bats-toi.
Zamir ne bougea pas. L'assassin grogna, clairement à la limite de sa patience.
Durant ce temps, Tyrath avait repris de l'altitude. Dans une série de manœuvres agiles, il évita plusieurs flèches tirées depuis le sol par des soldats ennemis et atterrit sur le balcon à nouveau. Il s'approcha d'Azéna et gémit. Il était blessé, mais quand-même capable de bien réagir à la situation. Il souffla une bourrasque en direction des deux Dètmoriens et se retourna pour arracher une flèche qui l'avait atteint à la queue.
- Zamir, dit Azéna, explique-toi.
Tyrath n'attendit pas une réponse; il fonça sur ses ennemis. Zamir roula d'un côté, l'assassin de l'autre, laissant Tyrath frapper le mur du château tête première. Le dragon étourdit se secoua, faillit tomber et retrouva l'équilibre alors que l'assassin tenta de poignarder sa patte avant. Il évita l'attaque de justesse et s'envola aux cotés de sa dragonnière. Il commençait à fatiguer. Sa respiration devenait lourde et ses blessures, malgré qu'elles n'étaient pas majeures, le faisait souffrir et le vidait de son énergie.
- Défend-toi, conseille-t-il à sa campagne. Tu n'as pas le choix. Souviens-toi de ce que tu as apprise durant ton duel contre Serfantor et Shalith. Pas de pitié.
Azéna baissa la tête et acquiesça.
- Zamir, je suis désolée, mais je ne peux pas te faire confiance.
Elle se mit en position de combat et Tyrath rugit sa victoire. À plusieurs reprises, elle créa une boule de vent et la lança en direction de l'assassin ou de Zamir. Zamir hurla quelque chose d'incompréhensible durant le combat et finit par prendre la fuite dans le château. Prenant avantage de la distraction d'Azéna, l'assassin se faufila à sa droite.
- Il est lâche, murmura-t-il. Tu ne trouves pas? Il n'a même pas osé t'attaquer.
Azéna, surprise de la subtilité de l'homme, recula et le frappa au visage. Il évita le coup de justesse et lui empoigna la main.
- Tu es trop lente, dragonnière. On ne ta pas enseigner les mœurs de la guerre correctement? Ne t'avère pas douce envers ton ennemi car, il ne te démontrera pas cette gentillesse. Eh bien, je te tuerai sous cette lune de passion.
Il leva sa dague et frappa. Paniqué, Tyrath se désintéressa de Zamir et se jeta sur l'assassin, toutes griffes dehors.
- Trop tard dragon, ricana l'assassin. Même si je meurs, ma mission est complète.
Vers la fin de sa course, la dague ralentit soudainement. Lorsque sa cime effleura la peau de sa cible, elle s'arrêta. L'assassin écarquilla les yeux devant la prouesse d'Azéna. Elle avait créé un courant de vent pour ralentir l'arme puis, elle avait agrippé le manche avec sa main libre.
- Merdique d'aéromancienne, cracha-t-il.
Il tourna la tête en direction Tyrath et la terreur déforma son visage alors qu'il réalisa que sa fin était venue. Tyrath renversa son ennemi au sol et le retint en place avec ses deux puissantes pattes. Ses griffes passaient au travers de son armure en cuir et frôlaient dangereusement sa peau. Il montra les dents et une goutte de bave dégoulina sur son front. L'assassin tâta désespérément à la recherche de son arme. Tyrath fouetta la dague avec sa queue et celle-ci rebondit sur un mur au loin. Il regarda Azéna avec sévérité. Leurs yeux se rencontrèrent et Azéna compris ce que son compagnon voulait lui dire.
- Tu dois le faire, dit Tyrath.
Azéna était au courant qu'elle ne pouvait pas laisser l'assassin garder sa vie; il reviendra. Une boule se forma dans sa gorge. Elle répliqua d'une voix brisée:
- Je sais.
Elle récupéra la dague et s'accroupie à côté de l'assassin. Elle figea à l'exception de ses mains tremblantes. Tyrath caressa sa joue avec son museau. Comme une mère fredonnant une berceuse à son enfant, il ronronna. Le son calma Azéna et ses mains s'immobilisèrent. Elle visa le cœur. L'assassin se débattit et Tyrath pressa sur ses épaules qui craquèrent sous le poids. Elle ferma les yeux, se concentra puis, poignarda.
L'assassin cracha du sang, sa respiration haletante démontrait sa douleur, mais celle-ci s'éteignit rapidement. Son cœur percé cessa de battre et son corps devint mou comme une poupée. Azéna attendit, les yeux clos.
Après un moment, Tyrath retira ses pattes. Azéna lâcha prise de la dague et se recroquevilla. Elle pleura, le visage enfouit dans ses bras croisés. Tyrath passa une patte derrière son dos, la tira vers lui et enroula une aile protectrice autour d'elle.
- Ça va aller, ronronna-t-il. C'est fini.
Azéna éclata en sanglot et se blottit contre le ventre chaud de son dragon. Tyrath tenta d'imiter un câlin d'une patte.
- Je ne veux pas jouer les méchants, mais ce n'est pas la dernière fois que tu vas devoir enlever la vie de quelqu'un.
Azéna leva la tête et le regarda, les yeux larmoyants.
- C'est le devoir d'un dragonnier et de son dragon, dit-il. Parfois, c'est nécessaire pour protéger d'autres vies.
Tyrath parut soudainement triste.
- Crois-moi, je connais le sentiment. On s'habitue et on apprend a vit avec.
- Qu'est-ce qui s'est passé? sanglota Azéna.
- C'est une histoire pour une autre fois. Maintenant, nous avons besoin de protéger les habitants de Nothar.
Azéna leva la tête. Son visage était dominé par la surprise.
- Turion!
Les traits de Tyrath s'accentuèrent.
- Il a disparus, continua-t-elle. J'avais complètement oublié.
Tyrath renifla.
- Pas étonnant avec tout ce vin, ricana-t-il.
Azéna tenta de passer par-dessus le choque des émotions et de paraitre joviale.
- Hé, il était bon ce vin.
- Mm bien sûr.
Tyrath se percha sur le rebord du balcon.
- Allons s'y. Il faut récupérer Turion et aider les soldats de ton père.
La fraicheur de la nuit rongeait la peau d'Azéna. Elle enfourcha Tyrath avec agilité puis, observa la scène en-dessous. Les soldats des deux royaumes s'affrontaient avec férocité. Du sang coulait le long des rues.
« Ils étaient nos invités d'honneur et ils ont trahis notre confiance, songea-t-elle. »
Elle serra sa prise sur les piquants qu'elle tenait pour ne pas tomber.
- J'ai besoin d'une selle et d'une arme. Merde.
Dètmor surpassait Nothar en puissance mais, elle savait qu'elle et Tyrath pouvaient faire toute la différence, particulièrement si Buhrik et Fayne se joignait au combat. Malheureusement, il n'y avait aucun signe d'eux.
- Tu as vu Buhrik dernièrement?
Tyrath secoua la tête. Il grogna, frustré. Il prit son essor en direction du centre-ville.
- Il était parti chasser du poisson quand j'ai senti l'odeur du feu, ce qui veut dire qu'il est loin et ne reviendra probablement pas pendant un certain temps. On ne pourra pas se fier à lui.
- Fayne est loin d'être une guerrière, dit Azéna. Je me demande si elle est saine et sauve.
- Ne t'inquiète pas. Elle excelle en maîtrise de l'eau. C'est une forme de défense très pratique.
Azéna vit, au cœur du combat, sa grande sœur qui venait de sauver la vie d'un soldat en tranchant la gorge d'un ennemi d'un seul coup d'épée. Le sang fut éclaboussé sur sa robe blanche de soie et sa victime tomba.
« Elle sait se défendre, se dit Azéna. Elle va survivre. Aucun loup ne fera tomber cette aspérule-ci. Ce n'est pas parce que la fleur signifie la douce humilité que nous sommes des incompétents en combat. Ah, bien loin de cela, surtout en ce qui concerne Argent. Elle va faire couler le sang de ces gamins en armure rouge et noir. »
Tyrath poussa un grognement et piqua en direction du sol.
- Qu'est-ce qu'il y a? questionna Azéna en s'agrippant solidement au pique.
- Le petit fugueur prend ses jambes à son cou en direction de papa, ricana Tyrath sur un ton moqueur.
Azéna ne dit rien. Elle regarda Zamir avec un mélange de désappointement et de tristesse. Le roi était occupé à hurler des ordres au centre de sa garde d'élite un peu plus loin. Les troupes de Nothar travaillaient à se rendre à lui. Les habitants se cachaient dans leurs maisons tandis que les sans-abri et les mendiants se dépêchaient à sortir de la cité.
- Allons le récupérer avant qu'il se rende au roi, continua Tyrath.
Azéna n'était pas ravie de cette décision mais, elle devait oublier ses sentiments personnels et s'avérer dure. Tyrath rugit à l'approche de sa cible. Zamir regarda derrière. Ses yeux s'écarquillèrent et il redoubla d'efforts. Ils furent en vain. Le dragon gris était bien trop rapide. Il agrippa le chandail et les culottes du prince et le souleva dans les airs. Zamir hurla, terrifié. Son père l'entendit et leva les yeux. Il ordonna à ses archers de visé Tyrath. Au début, ceux-ci hésitèrent car, ils étaient occupés à repousser les troupes défendant de Nothar mais, le roi insista. Une volée de flèches s'abattit sur Tyrath mais, aucune ne le toucha. Le roi se frustra et ordonna aux archers de s'occupé des soldats de Nothar. Il fit volte-face et se faufila dans sa troupe.
Tyrath prit de l'altitude et continua d'avancer.
- Alors, où est la plume? Tâche de me répondre si tu ne veux pas expérimenter la mort coincée dans l'œil d'un cyclone.
- M-mais... Je ne sais pas! glapit Zamir. De quoi parlez-vous?
- Parle! rugit Tyrath, déjà à bout de patience. Cesse de me faire perdre mon temps.
Il ouvrit la gueule et à l'intérieur, on pouvait voir du vent tourbillonnant qui amplifiait en puissance.
- Je ne sais pas, hurla Zamir, terrorisé par le drake.
Une ombre passa près d'eux. Tyrath la suivit du regard. Il souffla en sa direction, mais rata sa cible. Il aperçut un dragon noir monté par un individu enveloppé dans une cape sombre. Ses yeux s'écarquillèrent.
- Le dragonnier de l'an passé, dit Azéna. Que fait-il ici?
- Probablement du tort, répondit Tyrath.
Zamir jeta un regard plein d'espoir vers le dragonnier sombre, mais celui-ci continua son chemin sans lui prêter la moindre attention.
- Il doit avoir la plume, dit Azéna.
Tyrath s'élança en direction du nouveau-venu, traînant Zamir de force avec lui.
- Laissez-moi partir alors, supplia le prince.
- Lorsque nous aurons la plume dans nos pattes, dit Tyrath en accélérant.
Le vent violent ne laissa pas le choix à Zamir de plaquer ses mains sur ses oreilles et de fermer les yeux. Un cri familier attira l'attention d'Azéna. Elle baissa le regard vers la foule en délire et aperçut sa mère retenue par Kiatrane. Paniquée, elle tira l'un des piquants qui saillait du crâne de Tyrath, mais le drake résista.
- Non, on doit récupérer pour la plume, dit-il.
Azéna tira le piquant à nouveau et cette-fois, son compagnon ralentit considérablement.
- Non, je dois sauver ma mère. De toute façon, nous ne savons même pas si c'est lui le voleur.
Le dragon noir était maintenant trop loin pour être rattrapé. Tyrath rugit dans sa frustration, secoua la tête et fit volte-face.
- J'espère que tu sais ce que tu fais.
Il replia ses ailes et piqua vers le sol. Dans sa descente, il entendit un cri aigu puis, une douleur lui traversa l'œil droite. Il s'efforça de se frayer un chemin au travers du vent. Alors qu'il s'approcha dangereusement de Kiatrane, il signala Azéna de sauter.
- Va s'y!
Azéna s'exécuta. Elle atterrit à côté de la Dètmorienne et se mit en position défensive.
- Laisse-la partir, ordonna-t-elle avec un ton vénéneux.
- Tu es une vraie future reine, répliqua Kiatrane avec un sourire en coin.
Un grognement attira son attention vers le ciel. Tyrath essayait désespérément de se débarrasser d'un oiseau de la taille d'un aigle et au plumage roux qui le picorait sans remords. Azéna pâlit, enragée. Elle sauta vers l'arrière et agrippa une dague cachée sous sa ceinture en cuir.
- Azéna, dit Rivatha. Non. Ne joue pas l'héroïne.
Kiatrane la secoua pour la faire taire, intéressée par sa fille.
- Viens, jeune dragonnière. Voyons voir si l'amour d'une fille saura vaincre mon pouvoir.
Azéna serra les dents et s'élança vers l'avant dans un cri de guerre. Kiatrane l'agrippa de sa main libre par le poignet et dans une force inattendue, elle décala vers la droite et Azéna fut redirigé avec elle comme une poupée de chiffon. En un instant, elle la plaqua au sol et pressa son visage de sa botte. La panique s'éprit d'Azéna. Elle ne s'attendait pas à une telle performance de la part de Kiatrane. Elle la regarda de ses yeux inquisiteurs.
- Ferme ta gueule ! ordonna Kiatrane.
Azéna réalisa qu'elle regardait Kiatrane avec la bouche ouverte, choquée. Elle obéit, non par oppression mais, pour elle-même.
- Finalement, tu n'es qu'une fillette, continua Kiatrane. Une faible qui ose s'appeler une dragonnière. Pathétique. Père dit qu'on devrait te tuer. À mon avis, tu ferais un excellent tir à la cible pour les archers ou, encore meilleure, un cobaye pour nos machines de torture. Il faut bien te trouver une utilité, tu permettrais l'entrainement d'un aspirant exécuteur. Quel beau cadeau pour un jeune homme plein d'ambitions.
Rivatha fit un pas vers eux. Kiatrane la fusilla du regard. Un frisson traversa la reine et elle s'immobilisa.
Un tremblement les secoua. À côté d'eux, Tyrath était allongé sur le dos. Il gémit avec impatience. L'oiseau atterrit sur son ventre et poussa un cri perçant. La respiration de sa victime était difficile; il était épuisé, mais il trouva la force de griffer l'oiseau qui l'évita dans un éclair de lumière rouge et alla se percher sur le toit d'une maisonnette.
- Je devrais te tuer, dit Kiatrane, mais je te laisse vivre.
Azéna lui lança un regard questionneur.
- Pourquoi demandes-tu? continua la jeune femme à la crête iroquoise. C'est une réponse que je ne peux pas te donner, mais en échange pour ce cadeau généreux, protège ta vie précieusement.
Kiatrane fit signe à l'étrange oiseau de la suivre et les deux partirent en direction de l'armée de Dètmor.
Azéna n'osa se lever que lorsque Kiatrane fut hors de vue. Elle vérifia que sa mère ne fut pas blessée puis, Tyrath. Ses écailles l'avaient protégé de la plupart des attaques mais, son œil avait été écorché de haut en bas.
- Ça va? demanda-t-elle.
Tyrath grogna faiblement et se leva.
- Mon œil guérira. Je peux quand-même voir. Nous avons des choses plus urgentes à prendre en charge. Ta mère est en sécurité. À présent, nous devons trouver Turion.
Azéna se tourna vers Rivatha et avec l'autorité d'un seigneur, elle parla:
- Retourne au château.
Les yeux de sa mère s'élargirent.
- Tu n'es pas une guerrière. Que vas-tu faire? C'est trop dangereux.
Tyrath l'observa avec des yeux réconfortants jusqu'à ce qu'elle relaxa et hocha de la tête.
- Très bien. J'irai. Je la laisse entre tes mains, dragon.
- Je la protègerai avec ma vie, promit le drake en baissant la tête afin qu'ils soient au même niveau. Je vous en donne ma parole.
Les yeux de la reine s'emplirent de larmes et l'une d'entre elles roula le long de sa joue.
- Tu me fais honneur, majestueuse créature, avoua-t-elle dans une voix brisée par le chagrin.
Elle se dépêcha au château.
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