Chapitre 40 Le passeur

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Suite à la déclaration de Maximilien, nous l’assaillîmes de questions. Malheureusement pour nous, il ne se souvenait plus où il avait pu rencontré notre agresseur. Il n’était même pas sûr d’avoir été en contact avec lui. Il disait juste que son visage lui rappelait quelqu’un. Un visage froid, autoritaire et évasif, mais suffisamment remarquable pour qu’il s’en souvienne. Charlotte fit alors une tentative d’hypnose sur lui, mais sans succès. Les circonstances qui l’avaient amené à voir ce faciès étaient trop éloignées dans le temps et nous restaient inconnues. Maximilien demanda alors à s’isoler pour réfléchir. Victor ouvrit alors une page d’information en direct :

« … Vaste opération militaire ce matin au-dessus du ciel de la capitale. Comme beaucoup de parisiens, vous avez sûrement dû remarquer le ballet des hélicoptères qui s’affaire à la surveillance. En cette période de troubles, le plan Vigipirate ne peut être que renforcé. Ce n’est pas encore la loi martiale, mais les autorités demandent aux habitants de sortir le moins possible de chez eux après 23h… »

Les images du reportage montraient des véhicules militaires, forces spéciales et hélicoptères noirs prendre possession des boulevards et des avenues. Nous reçûmes alors, un appel d’Ella provenant de l’extérieur :

« Allo,… C’est moi… Prévenez Madame Charlotte. On a un léger problème.

Je mis alors le haut parleur.

-Je vous écoute, Ella. Répondit Charlotte.

-Ils ont trouvé la voiture !

-Qui ça, la Police ?

-Non, des militaires.

-Des militaires, vous voulez dire des espions ?

-Non, des vrais militaires, avec le béret, le barda, le FAMAS, le gilet, la totale, quoi !

-Quelle couleur le béret ? Demanda Maximilien.

-Max, est-ce que c’est vraiment important…

-Oui, c’est important !

-Noir, avec un insigne, je crois que ça représente un chevalier en armure. Ça te dit quelque chose ?

-Mmh, 2e régiment de dragon,… Spécialisés dans la lutte contre les attaques chimiques et bactériologiques. Écoute, ne prend pas de risques, abandonne ta voiture, je vais vous transporter dans mon van ! »

Ce matin-là, en attendant le retour d’Ella. Maximilien et Cathy nous prirent en charge et s’appliquèrent à faire de nous de vrais gothiques. J’avais pour ma part hérité d’un complet sombre, élégant et sobre, rappelant la mode du dandy qui faisait fureur au dix-neuvième siècle. J’appris alors, qu’il existait plusieurs sortes de styles gothiques, allant du plus ancien au plus moderne. Maximilien assurait que mes quelques traits amérindiens s’accordaient bien avec un smoking. Il Ajouta que je devais m’appliquer à le porter comme le ferait un danseur argentin, avec toute la classe d’un Antonio Banderas et l’assurance de Ricky Martin. Bien qu’en moi-même, je ne me sente plus proche de Martin que de Ricky. Avoir du sang latino n’avait donc pas suffit à faire de moi un séducteur. De grandes lunettes de soleil sorties des années 80 et une cravate blanche avaient achevé de me donner un look entre le gangster et l’homme politique.

Cathy eut cependant du mal à travailler le look d’Isabelle en raison de ses longs cheveux blonds qu’elle ne voulut point couper, ainsi que de ses yeux turquoise qui pouvaient difficilement être changés. Il lui fût donné un ensemble composé d’une courte jupe en cuir, d’un corset et des bas. Un maquillage sombre vint entourer ses yeux pendant que des mèches de couleur bleutée chatoyantes arboraient sa chevelure.

Maximilien avait prévu de nous transporter séparément chez une autre communauté, voisine à la sienne. Il lui semblait logique que les soldats concentreraient leurs efforts à rechercher quatre suspect au lieu de deux. Officiellement nous étions devenus de nouvelles recrues pour son groupe de musique rock et nous devions constamment changer d’endroit pour nous produire.

Victor resta chez Maximilien afin de terminer le décodage de l’énigme de Lorenzo. Charlotte, fit le voyage séparément avec Cathy. Alors que nous étions sur la route non loin du carrefour de l’étoile, je reçus enfin un appel de Victor :

« J’ai terminé de transcrire chaque mot. Voici ce que ça donne :

À celui qui recherche la lumière, celle-ci ne viendra que par les ténèbres. Le jugement dernier déterminera qui est digne d’y accéder. Retrouve les quatre êtres vivants et cherche le plus pâle de tous. Donne-lui ce qu’il demande et il t’indiquera la voie.

-D’accord, alors ça c’est de l’énigme ! Vous avez une idée de ce que ça veut dire ?

-Aucune, je suis navré Monsieur Alexandre.

-Alors, concentrez-vous à présent sur la recherche du triptyque. Le cœur de Lorenzo est à présent notre seul espoir à tous d’échapper à nos poursuivants.

-Bien compris, Monsieur ! »

Victor raccrocha et se mit au travail. Je fis alors mon possible pour trouver un sens au quatrain que je venais d’entendre. Je fus alors, interrompu par Maximilien. Il était au volant de son véhicule et avait ralenti, brutalement.

« Merde, un barrage !

-Vous comptez le forcer ?

-Non, ça c’est ce qu’Ella ferait. Ne paniquez pas, restez le plus calme possible, je vais parlementer. »

Plusieurs militaires accoururent l’arme à la main et mirent en joue le véhicule. Maximilien baissa la vitre et prit un air détendu :

« Bonjour, mon adjudant ! Beau temps pour la saison, n’est-il pas ?

L’homme le dévisagea longuement tout en inspectant ses papiers.

-Bonjour monsieur, dans le cadre de la lutte anti terrorisme, je vais vous demander de descendre du véhicule et d’ouvrir toutes les portières, s’il vous plait.

Maximilien s’exécuta, calmement. Lorsqu’il eut ouvert la portière arrière, nous fûmes découverts par les soldats qui braquèrent immédiatement leurs armes sur nous.

-Mains sur la tête ! Descendez du véhicule ! À plat ventre, les mains bien en évidence ! Hurlèrent-ils tous ensemble.

Maximilien tenta de calmer leurs ardeurs.

-Allons, vous n’avez pas besoin d’être aussi brutal, ce sont mes amis. Ils n’ont rien fait de mal.

-Ta gueule ! Répondit l’adjudant, tout en pointant son pistolet dans sa direction.

Maximilien restait très calme, même avec le canon d’une arme sur son front. Il fit un pas en avant et regarda le soldat droit dans les yeux.

-Et bien vas-y ! Tire ! À ton avis, ils vont dire quoi demain, dans les journaux ? Un adjudant abat un ex-légionnaire pendant qu’il nettoyait son arme ?

L’adjudant baissa son Sig Sauer. Son supérieur intervint pour le calmer :

-Vous êtes devenu complètement fou, Mercier ! Vous vous croyez en Amérique ? Rangez-moi cette arme avant que je ne vous mette aux arrêts.

-Monsieur, cet homme cachait un couple ! Répondit l’adjudant.

-Dois-je vous rappeler que nous ne sommes pas une armée d’occupation ? Nous sommes à Paris, dans le cadre d’une opération menée par le ministère de l’intérieur ! Laissez-moi régler cela !

-Merci, mon lieutenant ! Dit-Maximilien.

L’officier inspecta à son tour ses papiers.

-Vous avez vraiment été Légionnaire ? Demanda-t-il.

Maximilien se mit au garde-à-vous et salua le lieutenant.

-Caporal Maximilien Lefèvre, 2ème Régiment Étranger Parachutiste ! J’ai servi en Afghanistan. Je me suis arrêté après une blessure.

-Alors, vous avez droit à tout mon respect Monsieur. Encore navré pour cet incident, mes hommes sont un peu trop nerveux.

-Vous êtes à la recherche de quelque chose en particulier ?

-Je ne suis pas autorisé à vous dévoiler cette information. Sachez juste que nous sommes là pour quelques temps. Ne changez rien à vos habitudes. »

Nous pûmes repartir sain et sauf grâce à l’intervention de ce brave homme. Nous avions prétexté avoir oublié nos papiers avant de sortir. Isabelle semblait troublée suite à cette expérience.

« Tu as déjà vécu cela, n’est-ce pas. Lui dis-je.

Elle me regarda la larme à l’œil.

-Oui. C’était aussi à Paris en 1940, la Police française. On avait confiance en eux et ils ont choisi l’autre camp. »

Après nous être éloignés, Maximilien s’arrêta et passa un coup de fil à l’un de ses amis.

« Allo… Tu me reconnais ?...Oui, c’est moi… Dis-moi, est-ce que tu sais si le régiment a été affecté à Paris ces derniers temps ?... D’accord, bon… J’ai autre chose à te demander. Est-ce que tu peux me trouver la liste « des douze » qui ont participé à l’opération Hécate en Guyane ? Ils étaient commandés par Lopez. LO-PEZ ! Oui avec un Z ... Comment ça c’est confidentiel ! Tu te fous de ma gueule ? Et ton petit trafic personnel, c’est confidentiel aussi ?... J’aime mieux ça ! Tiens-moi au courant. »

Il raccrocha son téléphone et s’adressa à nous :

« J’ai peut-être une piste. Votre homme de la BNF. Maintenant que les souvenirs rejaillissent, je suis pratiquement sûr d’avoir croisé un gars qui lui ressemblait parmi les douze qui m’accompagnaient, il y a cinq ans.

-Pensez-vous qu’il ait pu s’agir du vampire que vous aviez capturé ? Demandai-je.

- Non, je ne crois pas. L’homme que nous avions pris en Guyane était brun et moins corpulent. Votre gars a les cheveux plus clairs. Écoutez, ce n’est pas grave. Dès que j’aurais la liste, cela finira par me revenir. Vos amis vous attendent au point de rendez-vous, afin d’éviter de nouveaux contrôles vous allez devoir faire le chemin à pied. Évitez le métro, c’est bourré de caméra. Privilégiez le bus et marchez dans la foule. Si vous croisez d’autres soldats, arrangez-vous pour ne pas les regarder. »

À l’abri des regards, Maximilien nous donna à chacun, un peu de son sang afin que nous puissions être en mesure de sortir de jour sans être aveuglé par le soleil.

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