Un autre monde

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— Marine ?

— Oui ?

— Tu peux dormir là à cette adresse ?

Il sort de la salle de bain avec sa serviette autour de la taille en me donnant souriant une note.

— Ne fais pas cette tête ma puce, ton père a un rendez-vous galant et je t’ai réservé trois nuits. Petit-déjeuner compris et tu auras des sous aussi.

— Attends !? Quoi ?! On est censé passer deux semaines ensemble et tu m’annonces au bout de deux jours, que tu es ici pour passer des soirées avec une femme ?!

Son air désolé me calme pas et il joue avec le papier. Après avoir tournée en rond, je reprends ma respiration face au lac et au ciel bleu. Mes larmes viennent sans que je les désires et j’entends ses pas sur le tapis puis ma main sur mon épaule gauche que je repousse.

— Ma puce, on passe de bons moments ensemble crois-moi mais, cette femme vient aussi en vacances au même moments. Ce n’était pas prévu et comme elle n’a pas d’hôtel pour ces trois jours…

Je me tourne toujours en colère et il cherche à argumenter.

— Elle n’a pas d’argent ? Rencontré où ? Tu lui as dit que tu avais une fille ? Elle fait quoi dans la vie ? Son âge ? Divorcée ?

Mes questions le déstabilise et j’en suis fière.

— C’est une pute c’est ça ?!

— Je suis juste surpris que tu t’intéresse à la vie sentimentale de ton père depuis l’invitation de la prostituée. Je pensais que…je suis perdu en vérité.

— Depuis quand elle t’a dit qu’elle passait par ici ?

— Hier en fin d’après-midi. Je lui ai dit que tu existais, que je comptais décaler, seulement, elle m’a convaincu de nous voir. Elle rembourse même les frais en t’offrant une suite dans un palace. On se parle depuis un mois et demi, elle est Suisse et travaille en tant que graphiste de luxe dans l’horlogerie. Anne est veuve, elle n’a pas d’enfants, le même âge que ta mère. Elle voulait qu’on se voit, pendant ses premiers congés car après au vu de nos métiers, ça va être compliqué. Et puis, elle ne sait pas si elle veut déménager ou moi, faire de même. J’en suis encore désolé ma chérie. En tout cas, elle me plait, sa vision des choses se complète avec la mienne. J’aimerais tenter.

On dirait un ados qui veut être autoriser à sortir. Il en fait aussi beaucoup pour moi, je me dois de lui accorder :

— Bon, ok. Ce qui compte c’est ton bonheur. Par contre, en échange, j’aimerais la rencontrer, si jamais ça marche entre vous. Et puis, je suis majeure, tu as confiance en moi. Remercie là de ma part pour ce cadeau, au moins, un bon bain me fera du bien seule dans un moment de luxe.

— Merci de me comprendre, je me sens comme un gamin.

— J’y viens d’y penser. Bien, je vais préparer mes affaires, j’imagine que tu me déposes ?

— Oui.

Il baise ma joue avant de finir de se préparer. De mon côté, une fois prête, j’attends sur mon petit lit pensive. Ces derniers jours au soleil me fait vraiment du bien et j’essaye de me gaver de beaux souvenirs. Mon téléphone est déjà garnis de quelques clichés que j’ai eu plaisir à partager avec ma mère.

— Tout est prêt ?

J’acquiesce en silence et je me propose de déplacer moi même la valise. Le palace est grandiose et je me sens gênée de venir seule. Mon père sous les questions du concierge, est aussi mal à l’aise.

— Tu as une magnifique chambre ma puce. Profite bien !

— Merci papa mais pourquoi on ne dors pas ici avec ton salaire ?

— Je considère qu’il faut dépenser dans des activités extérieurs et non pas tout dépenser en spa ou autre.

— Elle doit bien gagner sa vie ta nana ! Me payer ça !

— Profite bien encore une fois, je t’aime, je viens te chercher donc dans trois jours à dix-sept heure, je t’écrirais.

Une nouvelle fois seule, je me demande quoi faire. Je range mes affaires dans le grand placard puis lis les documents pour faire attention aux frais. Dans l’enveloppe laissée par mon père, cinq cents euro. Il se contredit, ce n’est pas possible !

L’heure tourne et c’est bientôt l’heure d’aller dîner. Une douche rapide, une crème pour masquer mes marques qui s’effacent et une belle robe avec des collants. Me voilant sûr de moi, disons que je porte un masque. Dans ce lieu, j’ai les clichés pleins la tête.

J’avais toute façon pris quelques belles tenues pour sortir au restaurant et remettre des talons, continue de maintenir ma confiance, enfin mon rôle. Je ne sais pas encore lequel…En bas, je croise plus de couples que de personnes seules. Je cherche le restaurant et quelqu’un en costard m’aborde dragueur. Non ! Non ! Je sais qu’ici, ce n’est pas le genre et puis….

— Vous cherchez quelque chose jeune demoiselle ?

Je ne pourrais lui donner un âge, sans doute la trentaine. Ma vie est bien trop chaotique pour savoir ce que cherche vraiment dans une relation. Contrairement à mon père et puis, j’ai aucune expérience.

— Le restaurant s’il vous plait.

— Je comptais m’y rendre. Vous êtes accompagnée ?

— Non, non. Et, vous ?

— Je dîne bien seul ces derniers jours, voulez-vous m’offrir votre compagnie ?

Il tend son bras et je ne sais absolument pas comment me comporter. Paul me dirait d’observer et d’imiter. Et son sosie ? De sans doute s’amuser car on a qu’une vie.

— Avec plaisir.

Je dois vraiment jouer un rôle ? Où lui dire la vérité ? Je verrais en fonction des pièges. Il est bien trop galant pour que ce soit réel et pourtant.

— Pardonnez-moi, je dois repartir chercher de quoi payer.

— Pas ce soir, je vous invite.

— Mais…

— J’en ai envie, je vous trouve très jolie. Cela vous dérange-t-il qu’on se tutoie ?

— Non, du tout.

— C’est gentil à toi. Je m’appelle Corentin Finacio, j’ai vingt-cinq ans et toi ?

— Marine Durand, dix huit ans. Que fait tu ici à ton âge dans ce palace ?

Il commande du champagne avant de me répondre après avoir trinquée.

— Je suis fils d’un patron de casino à Monaco. J’ai ma chambre chaque année pour un mois ici et je traine depuis deux ans entre les bateaux, les jeux et bien sûr quelques demoiselles qui veulent bien m’offrir ce moment de rencontre. Je te retourne la question.

Je glousse avec son clin d’œil et ma carapace ne peut tenir. Je ne sais pas ce que je fais en lui faisant confiance…une bonne intuition.

— Je suis en vacances avec mon père avocat pour encore quelques jours. Il est divorcé et ce soir il m’a annoncé que sa conquête disons est finalement en congés pour trois jours ici. Bref, cette femme a payer mes trois nuits ici pour s’excuser de me séparer de mon père.

— Tu ne l’as jamais vu donc ?

— Non, et puis, mon père à le droit de retrouver l’amour.

— Et ta mère ? Elle est où ?

— Elle vit aussi à Paris, oui, j’habite là-bas. D’ailleurs, après mon père, je pars avec elle en Creuse pour marcher une semaine. Et la tienne ?

— Elle est décédé quand j’avais sept ans. Un cancer du sein, une maladie qui n’épargne aucune bourse. Mon père finance une grande partie de la recherche. Donc, revenons à toi. Tu es majeur, j’imagine que tu as un diplôme ?

— Le Bac littéraire. Je pensais m’orienter dans l’univers de l’éditions mais…disons que des récents évènements privés, bouscule les plans. Je pense enfin c’est probable, m’accorder une année sabbatique. Je ne suis inscrite nulle part. Et toi ? Tu as des projets ? Tu travailles avec ton père ?

— Bien que je possède un super confort financier, je ne recherche pas pour autant, n’importe quoi. Je précise, que je ne critique aucun métier et tous sous utiles. Disons, que suis à la quête d’un où je puisse m’épanouir sans…sans être pistonné, ni rejeté par mon patrimoine, par mon nom. Mon père a beaucoup de relations et il comprends ma démarche.

— Donc, tu envisages quoi ?

— Les femmes sont attirées par mon costume, mon argent et donc la vie de rêve. Cela me pèse de ne pas m’en défaire. Je pourrais hors, je sens que mon père me ment. Il risque de me rejeter si j’occupe un métier qui ne gagne peu. Il compte pour moi, je ne peux le perdre. Donc, depuis six mois, j’étudie en autodidacte, le métier d’avocat. J’ai mon bac et je sais qu’il faut rien lâcher pour espérer ce rêve.

— Et pourquoi avocat ?

— Les clichés jouent beaucoup et défendre les plus modestes m’intéresses plus que les grosses poches. Aider autrui me séduit depuis très longtemps. Tu n’avais pas dit que ton père est avocat ?

— Droit pénal.

On commande ensuite le dîner et j’écoute ses conseils. La soirée reprend sur les métiers et je me sens en paix. De retour dans ma chambre, Quentin m’écrit.

« Hello Marine, j’espère que tu profites bien. De mon côté, je dois t’avouer que j’ai rencontré une autre fille, toxico en soins elle aussi. Tu ne m’en veux pas ? On peut rester ami et se retrouver quand même. J’ai quand passé un bon moment avec toi, je te le redis car je me sens senti comme deux potes. À aussi, je tiens toujours la promesse, tu m’as permis de me soigner, je ferais de même pour toi ! Entre blessés, entre potos dérivant sur les nuages de la société, on se comprends ».

« Coucou Quentin, ne soit pas désolé, on apprend à se connaitre et le coup de foudre est venu pour toi ! Tu me rappel Paul donc, un ami qui sait tout. Pour être honnête, nous revoir aurait permis de savoir ce que je cherchais dans un relation. Je ne le sais pas encore…En tout cas, merci de ton soutient. Après Paul, je n’ai que toi et j’ai hâte de m’amuser comme des gosses pour oublier nos états âmes. Enfin, c’est étrange mais…bon je t’appel plus demain pour tout dire, c’est trop long à expliquer. En gros, moi aussi, j’ai rencontré quelqu’un ! Alors…pas comme un coup de foudre quoi que…Il plairait à mon père, il veut être avocat pénal aussi ! Il a vingt-cinq ans, beau garçon, riche…Ouai, je crois qu’en ai trop dit ! Je vais me reposer et promis on se capte ! Bise, Marine »

Un coup de foudre ? Sérieux ? Oui, je dois l’admettre. Quentin est mignon mais je ne l’avais pas ressenti. Ce soir, après ce dîner, Corentin m’a raccompagnée, sans rien forcée, sans joint, dans une discussion adulte. Bien que je sens, qu’il cache une âme d’enfant.

J’aime ces deux facettes et j’attends le dernier jour pour garder son numéro. Mon père m’a récupérer à l’heure prévu, il se confie sur Anne et me questionne. Surpris, il fait demi-tour pour revenir au palace et se garer devant l’entrée :

— Qu’est-ce qu’il se passe papa ? Tu es tout excité !

— Sors de là et ramène le moi. Je veux rencontrer ce charmant jeune homme qui ose s’initier au pénal. Tu es plus souriante, il t’a fait oublier ces traumas et…vous avez couchés ?

— Non ! Et puis, je lui ai rien dit sur ça, trop tôt. Des bribes me reviennent et à la rentrée, je revois le psy.

— En fait, je m’en fiche ma princesse. Je sais quand tu joues et je sais qu’ici, tu as les bons mâles. Va me le chercher, on va passer quelques heures ensemble. J’ai hâte de le questionner sur ces études.

— Tu as déjà entendu parlé de son père ?

— Non, quoi ? Je te fais confiance et je verrais à qui j’ai affaire. Promis, je sais ce que je fais, quitte à l’aider pour réussir. Ton bonheur passe avant tout ma puce.

Une fois dehors, je le cherche partout et je le retrouve dans sa chambre. Il ne s’attend pas c’est sûr à une rencontre rapide avec mon père :

— Ce n’est pas un piège ?

— Non, je te l’assure. Et puis, je lui ai dit que rien n’est officiel, sauf qu’il y a si longtemps qu’il ne m’avait pas vu heureuse, tu m’as rendu le sourire. Il nous attend du coup, tu as du temps devant toi ?

— Toute la soirée !

Il me suit toujours inquiet puis se détend quand mon père engage la conversation sur sa famille et son projet. Ce dernier me fait rire avec ses tests pendant l’apéritif et le dîner au bord du lac. Corentin, ne le prend pas si mal, considérant que c’est un bon moyen de se mesurer à une pointure comme mon père avant même de faire bonne impression.

De retour dans notre chambre, avant de se coucher, Corentin m’écrit qu’il veut qu’on se revoit bientôt, acceptant même la proposition de mon père de le loger pour ses études.

— Il est bien ce garçon, il a tous ce qu’il faut pour toi ma princesse. Maman serait aussi de le rencontrer.

— Merci papa, c’est vrai qu’il me plait et je lui plais aussi. Après, je ne le cesse de te le dire, c’est trop tôt, il faut du temps.

— L’amour se cultive.

— Tu comptes revoir Anne ?

— Oui. Bien, au lit, ton vieux père est fatigué et demain, c’est journée kayak, faut reprendre des forces. Bonne nuit ma puce.

— Bonne nuit papa.

Avant d’éteindre, j’écris dans mon petit carnet, je ne l’avais pas fait jusqu’à maintenant. Tout est consignée, des viols, surtout le dernier plus violent à Corentin. Je finis par m’endormir sans doute vers une heure du matin.

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