Le profil parfait
Le profil parfait
Cela faisait maintenant cinq ans que j'étais célibataire et je pensais ne jamais pouvoir me remettre en couple. C’était sans compter mon meilleur ami Eugène qui depuis ma rupture avec Julie avait tout fait pour me sortir de mon célibat. Il m’a amené en boîte de nuit chaque week-end et m’a créé des profils sur une dizaine de sites de rencontre. Malheureusement rien ne marchait car je n’y mettais aucune volonté. Je n’arrivais pas à m’enlever de la tête celle avec qui j’avais espéré passer toute ma vie. Puis un jour où il était venu me voir pour m’obliger encore à perdre du temps en essayant de trouver une fille pour la remplacer, un profil attira mon regard. Elle s’appelait Francine Beck, était une mordue de littérature qui s’exerçait à l’écriture sur son temps-libre. J’avais immédiatement mis une rose sur sa page pour lui montrer qu’elle m’intéressait et c’est à ce moment que les minutes les plus longues de mon existence ont commencé. Après environ un quart d’heure d’attente mon téléphone lança une musique triste pour m’annoncer que j’avais un message de l’application. Je l'avais mis comme alarme car je m’étais déjà résigné à l’idée de recevoir un rateau de sa part. J’ouvris donc Cupidon sans une once d’espoir pourtant une joie immense m’envahit quand, je m’aperçus que je m’étais trompé. Elle avait fait le premier pas et n’attendait plus que moi pour démarrer une conversation qui était peut-être le début d’une belle relation. Nos échanges durèrent pendant plus d’une semaine jusqu’au moment où elle me proposa un rendez-vous à 19h00 le jour suivant. J’étais tellement surpris et ému que je ne savais pas quoi lui répondre. Alors pour ne pas la faire trop attendre et pour éviter de penser à ce qu’il pourrait mal se passer si j’acceptais son rendez-vous, j’ai arrêté de réfléchir pour laisser mes sentiments parler :
- J’accepte avec plaisir ta proposition et j’attends notre rencontre avec impatience.
Il était 18h30 et Francine venait de m’envoyer son adresse qui ne se trouvait qu’à quelques pas de chez moi. Je me suis donc rendu chez elle à pied en prenant soin de ne pas oublier les roses que j’avais prises chez le fleuriste quelques heures auparavant. J’étais juste devant sa porte et il ne me manquait plus qu’à utiliser sa sonnette en forme d’ornithorynque pour la rencontrer enfin. Après l’avoir pressée, un court laps de temps se déroula avant que je puisse voir son splendide visage. Ses cheveux bruns sentaient la fraise des bois, ses yeux brillants me transportaient dans un conte de fée dont nous serions les héros et le tailleur qu’elle portait la rendait plus belle que la déesse Aphrodite. Elle m’invita à entrer et son intérieur n’était que son reflet. Au centre du salon trônait une immense bibliothèque en bois massif où tous les genres de la littérature étaient présents. Que ce soit le maître de l’épouvante pour transformer une nuit paisible en un cauchemar constant, en passant par des classiques comme Candide ou l'Optimisme :
- Je vois que tu regardes beaucoup ma collection de livres.
- Oui, j’ai l’impression d’être dans un rêve qui m’emmènerai dans la richesse de l’imagination.
- Ce rêve ne serait-il pas encore mieux si je t’offrais un cadeau ?
- Tu n’es pas obligée, la soirée est déjà parfaite si je suis avec toi.
Je lui obéis tout suite car je lui faisais entièrement confiance alors que nous ne nous connaissions que depuis une semaine. Je ne voyais plus rien je demandais ce qu’elle m’avait préparé. Ma patience était arrivée à son terme quand je sentis mon nez se briser avant que je m’évanouisse à cause du choc que je venais de recevoir. À mon réveil, j’étais attaché sur une chaise devant un ordinateur couplé à un énorme mal de tête :
- Je vois que Morphée t’a laissé partir maintenant tu vas faire ce que je t’ordonne.
- Pourquoi ?
- Je veux que tu écrives tout ce que tu as vécu, depuis que tu m’as vue sur Cupidon et je verrais après ce que je fais de toi.
J’ai donc fait ce qu’elle m’avait demandé sans omettre aucun détail puis elle revint me voir pour vérifier mon travail :
- J’adore ce que tu as écrit ça fera une très belle histoire à raconter à ma fille pour qu’elle reprenne le flambeau.
- Quel flambeau ?
- Celui de tueuse en série bien sûr.
6 ans plus tard
- Et tu fais quoi après maman ?
- Je l’ai éviscéré puis je l’ai brûlé dans la forêt pour faire disparaître le corps.
- Mais, comment tu m’as eue si dans la famille on doit tuer tous les hommes qui essayent de sortir avec nous ?
- La tradition nous permet juste d'en garder un assez longtemps pour poursuivre la lignée.
- Et donc, tu as dû tuer mon père ?
Est-ce que tu as trouvé ta première victime, Emilie ?
- Oui, c’est un garçon de ma classe qui s’appelle Conrad.
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