La revenante.
Le 4 juin 1886,
Je n'ai presque pas dormi de la nuit car j'avais froid et horriblement soif. Ma gourde était vide. Un rayon de soleil s'est infiltré le long de la meurtrière pour s'échouer à mes pieds.
J'espérais seulement qu'on puisse me venir en aide. Alors que je m'abîmais dans de sombres pensées, j'ai entendu un léger bruit provenant du fond du souterrain.
- Le chat ! Ce doit être Mistigriff qui est revenu !
Puis il m'a semblé reconnaître des pas et un froissement d'étoffe.
- L'ermite ? Il vient sans doute me réconforter avant que je ne meure !
Ma vue et mes idées se brouillaient. Bientôt j'allais perdre conscience et tout serait fini. Personne ne retrouverait jamais mon corps. Je resterais emmurée jusqu'à la fin des temps.
Soudain, devant moi, un homme s'est accroupi. Il m'a prise doucement par les épaules et m'a fait boire quelques gorgées d'eau.
J'ai ouvert grand les yeux et j'ai reconnu Julien. Il m'a souri :
- J'ai trouvé votre mot. Vous pouvez dire que vous avez eu de la chance. Nous avons pu vous localiser grâce à vos indications.
- Et les murs ?
- Quels murs ?
- Ceux qui ont poussé comme des champignons et qui m'ont empêchée de revenir de cet enfer.
- Je ne sais de quoi vous parlez ! Il n'y a jamais eu de murs ! Tous les souterrains sont libres d'accès.
Puis il a ajouté :
- Nous vous avons cherchée des jours entiers. J'ai même escaladé la muraille à l'aide de piolets, de pitons et de cordes pour m'approcher des meurtrières afin de vous apercevoir. Je n'ai jamais entendu d'appels au secours. Ah ! Vous devez une fière chandelle à Mistigriff !
Il m'a aidée à me relever, m'a prise par la main. Nous avons marché à travers un dédale de tunnels, de soubassements, de geôles. Je devais sans cesse me reposer, accroupie contre les parois rocheuses pour reprendre mon souffle. Mais j'étais sauvée.
- Il va falloir que vous alliez consulter un médecin. Vous n'êtes guère solide m'a dit le jardinier.
A notre sortie, j'ai été étonnée et bien heureuse de revoir Lorenzo. N'ayant plus de mes nouvelles, il était revenu en France. Il était allé à l'hôtel où je séjournais et c'est là qu'il avait appris la nouvelle de ma disparition.
Il m'a réconfortée et serrée dans ses bras. J'ai pleuré.
Marcelline et Monsieur Jean ont salué mon retour avec soulagement. Mistigriff me regardait à bonne distance, perché sur un tabouret, placide, l'air satisfait.
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