CHAPITRE 8

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Coucou ! Désolée pour cette petite semaine d'absence, ce chapitre a été assez compliqué à écrire. Mais le voilà :) Il est un peu plus court que les autres, mais bien plus qualitatif que le premier jet :D

CHAPITRE 8

— T'as pris la cailloo sor la crâna ?

Molkov ignora Josaph et continua à plier ses vêtements qu'il enfournait à la pelle dans son sac. Dagorn le regardait faire depuis la cuisine, l'air dubitatif devant la tasse de café que lui avait servi le nain. Ils étaient tous les deux remontés au premier étage pour que le vieillard puisse récupérer ses affaires avant de déménager définitivement au quartier militaire, comme l'exigeait son nouveau statut. Bien sûr, la nouvelle avait fait grand bruit chez les minaors comme dans son voisinage : un vànarable qui devient soldat, ça ne court pas les rues. Plusieurs le voyaient déjà mort, d'autres comme Josaph tentaient désespérément de le raisonner sans succès. Molkov avait pris sa décision et rien ne le ferait changer d'avis.

Josaph lui attrapa le bras pour le forcer à le regarder. Sa barbe frémissait alors qu'il cherchait ses mots avec désespoir. Son ami poussa un soupir et leva les yeux au ciel.

— Je suis parfaitement sain d'esprit et maître de mes actions. Je sais ce que je fais, je te le promets. Je vais ramener Mara.

— Molkov... Mara, alla ravaandra pas. To va ta faare toar.

— Tant pis.

Il dégagea son épaule et reprit son manège sous le regard inquiet de son ami. Il ne comprenait pas, et le vieux nain en avait parfaitement conscience. Cette décision solitaire et précipitée n'aidait pas à faire passer sa résolution comme réfléchie. Pour tous, il deviendrait le fou qui avait crû pouvoir défier la mort. 

Il suspendit un instant son geste pour regarder Dagorn. Lui non plus n'allait pas très bien. Depuis l'annonce de sa montée en grade, même s'il paraissait discuter normalement, il était nerveux et agité. Molkov l'aimait bien, mais ne parvenait pas vraiment à le comprendre. Malgré son apparente jovialité, il sentait que quelque chose ne tournait pas rond dans sa caboche. Le nouveau paladin détourna le regard lorsqu'il s'aperçut qu'il était épié, ce qui ne fit que renforcer ses questions.

Josaph, lui, ne comptait pas lâcher l'affaire. Nullement vexé par le geste de son ami, il revint à la charge. 

— To n'as pas dans ton àtat normal ! cria-t-il en retirant une pise de chemises de sa valise. Ràvaille-toi ! To faas ona grossa bâtase !

— Tu t'occuperas des plantes pour moi ? Je ne peux pas les emmener.

— Molkov !

Le nain poussa un nouveau soupir avant de se tourner vers lui. Les yeux de son ami brillaient de larmes de détresse. Molkov chercha ses mots, pour éviter de le blesser davantage, avant de s'asseoir sur le lit et relever les yeux vers lui, déterminé.

— Je ne changerais pas d'avis, Josaph. Ce voyage, j'en ai besoin même s'il ne mène à rien, même s'il débouche sur une nouvelle qui me détruira. Je ne peux plus vivre comme ça, tu comprends ? Je n'ai plus rien à perdre, plus rien ne me retient ici si ce ne sont les souvenirs de Magda. Je ne veux pas rester ici à me morfondre, je ne veux pas retourner à la mana, je veux agir. Même si je ne reviens pas, je mourrais avec l'idée que j'ai au moins essayer. Je ne te demande pas de comprendre mon choix, mais de l'accepter et le respecter. 

— Ja l'accapta, Molkov. Maas ja craans la para poor toa.

Il lui posa une main douce sur l'épaule, résignée. Molkov le remercia du regard. En quelques minutes, le reste de sa valise était bouclée. Il ne prit que le nécessaire : quelques vêtements, son nécessaire de toilettes, un paquet de bonbon et un portrait de Magda. Le reste des affaires, il les laissa au bon soin de Josaph et de la communauté. Ils en avaient beaucoup plus besoin que lui. Après avoir embrassé une dernière fois la demeure familiale, il suivit Dagorn vers la sortie. 

Devant sa porte, un attroupement solennel s'était formé. Les cousins éloignés, les collègues, même ce vieux bouc d'Agra Rouge-Fessard qui l'avait toujours détesté, s'étaient regroupés pour lui dire au revoir. Certains cachaient difficilement leurs larmes. Un nain, ça ne pleurait jamais devant un public. Molkov s'approcha du groupe maladroitement. Il se tordait les mains en réfléchissant à ce qu'il allait bien pouvoir leur dire.

— Les amis, Agra, ajouta-t-il malicieusement, s'attirant un regard noir du concerné, je sais que pour vous ma décision est incompréhensible. Qu'est-ce qu'un vànàrable va bien pouvoir faire dehors, seul, alors même qu'il n'a jamais mis un pied en dehors de la montagne ? Je vais faire ce qu'aucun de vous n'a eu le cran, et n'aura jamais le cran de faire. Je vais aller récupérer ma fille des mains des orques, vivante ou... Et sur Balgröm, je promets de faire payer aux ravisseurs les actes immondes qu'ils nous font subir depuis cinquante ans. Je suis vieux, j'ai plus rien à perdre. Si Balgröm doit me rappeler à lui, je le ferais dans l'honneur et avec la conscience tranquille. Moi, au moins, j'aurais essayé. Restez planqué dans votre montagne, dormez bien la nuit, ayez l'impression d'être en sécurité, j'en ai que faire. Mais ne venez pas me reprocher d'être fou alors que la disparition de ces femmes, la mort de vos maris et de vos fils, elle pourrait être réglée si vous tous étiez moins couards et osiez sortir vous battre. Le nombre l'emporte toujours. Pas la lâcheté.

Ils ne répondirent pas, la plupart mal à l'aise ou contrarié par ces accusations outrageuses. Molkov se tourna vers Josaph, dont le visage avait rougi jusqu'à ce qu'il ne ressemble plus qu'à une tomate pourpre, et le serra dans ses bras. Quitter celui qu'il considérait comme son frère et confident plus difficile qu'il ne l'aurait crû. Peut-être même était-ce la dernière fois qu'il le voyait.

— Qua Balgröm guade tas pas, murmura-t-il. Ravaans vavant.

Ils restèrent encore quelques secondes collées avant que Molkov ne recule. Il lança un dernier regard à cette petite ruelle qui l'avait vu naître, avant de saisir sa valise et quitter le confort de sa petite maison définitivement. Josaph le salua sur le palier jusqu'à ce qu'il soit hors de vue. Dagorn resta silencieux un long moment, avant de relever la tête vers lui.

— Je vous trouve très courageux, monsieur Favium. J'espère que cette quête ne sera pas vaine et que nous atteindrons notre but.

— Je l'espère aussi, mon garçon. Je l'espère.

Sur cette confidence, les deux hommes prirent la direction de l'ascanscaor. Alors que les portes se refermaient sur le premier étage pour la dernière fois, une larme coula le long de la joue de Molkov.

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