Dégustation
Froid. Engourdissement. Confusion. J’ai ouvert les yeux. Devant moi, mon ami rit à gorge déployée. Je serre plus fort la cuillère dans ma main droite, j’ai envie de hurler. Je ne sens plus l’intérieur de ma bouche. J’ai l’impression que ma langue a triplé de volume. Mon cerveau est comme dans un étau, brûlant et glacé à la fois. Devant moi, la boule de glace rouge fluorescent attend le prochain assaut, en sachant très bien qu’il n’arrivera pas de sitôt. Comment ce glacier a-t-il pu avoir une idée aussi sadique ? Faire des glaces étranges est sa spécialité, il est même reconnu mondialement pour cela. Les plus fins gourmets du monde entier viennent dans ce petit village de Bretagne pour goûter à ses créations farfelues. Mais prendre le piment Carolina Reaper et en faire une glace, avec du lait ! Il a réussi, par je ne sais quel prodige, à empêcher la caséine du lait de neutraliser l’effet de la capsaïcine. C’est tout bonnement de la torture gustative ! Une confusion mentale indescriptible apparait dès la première bouchée. La brûlure du froid ou la fraicheur de la brûlure provoque un état momentané de paralysie de la langue et, en même temps, une montée d’endorphine fulgurante emplit le corps.
Je ne sais plus s’il faut rire ou pleurer, hurler de douleur ou chanter de bonheur, si c’est bon ou horrible. Et mon ami face à moi qui rit encore et encore de ma tête, sans s’apercevoir qu’un peu de sa glace au camembert coule sur son menton.
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Si vous voulez connaître toute la genèse de cette glace, je vous invite à lire : Carolina glacée, bientôt sur mon profil.
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