L'évangile selon l'oubli
Sous les oliviers quand Jésus parle les gens écoutent ou plutôt regardent ses doigts longs où dansent ses paroles suivent ses poignets deux rameaux noueux qui s'ouvrent qui retombent et respirent et un océan de peau sur l'océan de sable et le désert des hommes
Sous les oliviers et le soleil au plus chaud Jésus parle et articule donne du sens qui pèse lourd à ses consonnes et des silences à ses sourires des silences qu'il emporte comme une traîne derrière lui et qu'on regarde s'écorcher s'user sur le sol de cailloux sur les sommets de nos crânes un peu sourds et on attend suspendus à ses poignets et à ses doigts qui dansent on attend et on désire à fleur de peau à bout de patience et c'est ici c'est ça que les gens écoutent
Sous les oliviers l'après-midi avance et Jésus me parle et j'ai envie de boire à ses lèvres un souffle qui ne ressemble pas au mien un corps qui vit autrement ailleurs et qui rêve je le vois dans ses yeux quand il baisse le regard et se protège derrière ses cils je vois ses rêves le désert un rocher et les charognards j'ai l'envie de boire ses pensées pour les rendre limpides et d'embrasser son corps pour qu'il ne tremble pas Sous les oliviers et sous les étoiles la nuit tombe sur son front et ses paupières Jésus pleure et je ferme les yeux pour ne pas voir car comme il pleure j'ai peur de la mort j'ai peur du silence et j'ai peur de la nuit alors je dessine une croix sur mon front et sur le sien je voudrais le relever avant que les chiens ne se nourrissent avant que leurs dents ne déchirent la peau avant qu'ils ne se sustentent de ce qui est sacré pour en faire de la nourriture et de la religion avant qu'ils ne transforment l'amour la chair l'homme avant qu'ils comprennent plus ce qu'ils entendent
Sous les oliviers c'est l'aube et je regrette mes mains et je regrette ma bouche et je regrette mes yeux
Pardonne
De mourir et pour l'oubli quand déjà sous la croix
Je ne comprends plus ce que j'entends
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