Chapitre 25

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Jamais une douche n’avait été aussi agréable ! Bien qu’elle ait été contrainte de faire preuve de créativité et de souplesse pour ne pas mouiller son pansement, Océane quitta la salle bain de son amie avec un sourire satisfait. La peau fraîche, les cheveux propres et léger, elle s’étendit aux côtés de son amie dans son lit.

— Hum… Ce t-shirt te va mieux qu’à moi… tu pourras le garder si tu veux ! annonça la jeune femme tout en reportant son attention sur son cellulaire.

— Ah ? Heu.. d’accord, merci ! Tu regardes quoi ?

— Madison et sa sœur font une fête chez elles pour leur anniversaire, tu viens ?

Océane avait elle aussi reçu l’invitation des jumelles, mais elle l’avait déjà refusée. Ne voulant pas avoir l’air de s’accabler, elle éluda la question.

— Je ne sais pas… Une idée de ce que tu vas porter ?

Sonia ne releva pas l’absence de réponse à sa question et la conversation se tourna vers qui seraient présent et autres banalités, jusqu’à ce que des coups vinrent résonner à la porte. Lorsque Rafael émergea de l’entrebâillement, Océane sentit son cœur manquer un battement.

— Océane, je te laisse te préparer et me rejoindre dans la voiture ?

Le ton relevait davantage de l’injonction que de l’invitation, mais la jeune femme acquiesça néanmoins.

— Bien, je t’attends, conclut-il avant de partir en refermant la porte derrière lui.

Voyant la mâchoire crispée de son amie, Sonia s’enquit de son état d’anxiété.

— Ça va aller ? Ta jambe a l’air d’aller mieux, ce seront juste des petits contrôles, je pense ! Tu veux que je vienne avec vous ?

Même si elle mourait d’envie de dire « oui » et de lui confier tout ce qu’elle avait sur le cœur, elle s’efforça d’arborer son sourire le plus convaincant avant de refuser son offre.

Ne voulant pas tester la patience du père de famille, elle finit de se préparer rapidement, prenant son téléphone et son portefeuille avec elle, avant de rejoindre le garage.

À peine eut-elle le temps de s’installer du côté passager, que Rafael lui demanda de mettre ses lunettes de soleil et de ne les enlever que lorsqu’il lui dirait, il attendit qu’elles soient mises avant de sortir du garage.

Tant de précautions ne rassura pas la jeune femme.

— Je ne veux pas remettre en question vos conseils, mais est-ce vraiment nécessaire ? demanda-t-elle avec hésitation. Êtes-vous si nombreux ?

Il lui décocha un rapide regard tout en conduisant, il ne semblait pas vraiment satisfait du maigre camouflage qu’offraient les verres teintés de sa passagère.

— Nous n’avons pas réellement de référencement, mais je dirais que nous représentons deux, peut-être trois pour cent de la population. Le fait est que nous sommes plus présents dans certaines villes et dans certaines professions. Tu auras l’occasion de le voir à la clinique, plusieurs de mes confrères sont des dracs.

— Des dracs ?

Il soupira, visiblement agacé de devoir répondre à toutes ses questions, mais Océane voulait en savoir plus, quitte à contrarier sa source d’informations.

— Oui. Des dracs. Nous sommes des dragons comme nous te l’avons dit avec Joaquin, mais avec le temps, le terme s’est modifié et aujourd’hui c’est celui que nous usons lorsque nous parlons de notre race.

Il ne disait pas tout, elle en était persuadée, mais elle n’osa pas insister.

— Qu’est ce que vous comptez me faire passer comme examens ?

Malgré ses efforts, elle ne parvint pas à masquer son inquiétude et sa voix trembla légèrement à la fin de sa phrase. Elle se détesta de se montrer si faible ; cela ne passa pas inaperçu auprès de son interlocuteur qui lui adressa un regard confus.

— Voyons Océane ! Il ne faut pas t’inquiéter de la sorte ! On ne prévoit pas de te découper en morceau avec mon frère !

Pouvait-elle lui confier ses craintes ? Elle hésita ; vider son sac sur Maxime l’avait soulagée et il s’était montré étonnement compréhensif. En revanche, le père de son amie l’avait toujours intimidée et elle ne voulait pas risquer de le froisser. Les avertissements d’Anthony étaient encore bien présents dans son esprit et s’il lui avait conseillé de se méfier des Jorique, elle se souvenait qu’il avait également évoqué l’intérêt qu’elle pourrait susciter, et même si elle n’était pas convaincue de la pure bienveillance et de l’abnégation de Rafael quant à sa santé, au moins était il une source d’informations et de protections.

Face au silence de la jeune femme et ne la voyant pas se détendre malgré sa boutade, Rafael reprit la parole avec un peu plus de tact et de douceur.

— Nous allons te faire des prises de sang, notamment pour vérifier ta glycémie, certaines hormones comme la progestérone et l’oestrogène, certaines protéines comme l’albumine et la globuline et ainsi de suite… Chez un homme, le baptême peut induire un dérèglement hormonal ou une chute de la glycémie. Ton cas étant particulier, on veut s’assurer que tu es en bonne santé.

Même si elle ne saisissait pas tout, au moins elle en savait plus et cela la rassura un peu.

— Je vais voir avec Joe, mais il est possible que l’on te fasse également une ponction lombaire et un EEG, si c’est possible.

Là, elle se senti un peu plus perdue, ces termes ne lui étaient pas aussi familiers et paraissaient plus intimidant qu’une prise de sang. Elle hésita à demander des détails, mais préféra rester dans le confort temporaire de l’ignorance. A défaut d’en savoir plus sur ce qui l’attendait, elle choisit d’essayer de glaner d’autres connaissances sur ce qu’elle était devenue.

— Est-ce que le baptême est réversible ? Est-ce qu’on peut l’annuler ?

Rafael haussa les sourcils de surprise face à cette interrogation.

— Non, pas que je sache en tout cas, répondit-il. Et à bien y réfléchir, je ne vois pas comment cela serait possible.

Il lui adressa un sourire compatissant.

— Je suis désolé, mais il va falloir que tu t’habitue à ta nouvelle condition.

Océane soupira, elle s’était attendue à cette réponse, mais cela ne l’avait pas empêchée de nourrir un espoir que cela soit possible. Elle avait encore tant de questions qui la tracassaient qu’il lui était difficile de mettre de l’ordre et des priorités. Quand soudain, l’une d’elle s’imposa par-dessus les autres. Une question personnelle dont elle redoutait la réponse et la considération qu’il porterait à celle-ci.

— Rafael ?

— Oui ?

Il semblait moins contrarié qu’au début, sans doute faisait-il un effort pour se montrer plus rassurant, cela n’empêcha pas le cœur d’Océane de battre plus fort alors que les mots quittaient ses lèvres.

— Vous m’avez dit que le gène se transmettait de père en fils… Vous avez connu mon père, est-ce qu’il en était un ? Est-ce que mon père était un drag… un drac ?

La mâchoire de son interlocuteur se contracta, elle regretta d’avoir osé cette question… Et pourtant, maintenant que celle-ci était posée, elle voulait une réponse. Il profita d’un feu rouge pour lui adresser un regard des plus sérieux, comme pour la jauger. Intimidée, mais déterminée, Océane soutint son regard, cherchant dans ses prunelles une réponse qui tardait à venir. Il reporta finalement son attention sur la route et redémarra au vert. Un long soupir finit par lui échapper.

— C’est un peu plus compliqué que ça, céda-t-il.

— C’est-à-dire ? renchérit Océane.

Elle se doutait qu’il cherchait ses mots, probablement pour éviter de la blesser. Elle avait une idée de la considération qu’il portait à son père, elle en avait eu un aperçu au travers de Maxime. Pour autant, elle refusait de se contenter d’une réponse aussi pauvre.

— C’est-à-dire que certains hommes possèdent le gène drac, mais il peut être atrophié ou modifié, ce qui amène à… enfin… à ce qu’on appelle des mal-formés… certains les appellent également des bâtards.

Voyant où il voulait en venir, elle sentit son cœur se fendre, les propos de Maxime dans le hangar devenant plus lourdes de sens.

— Ton père… eh bien, il faisait parti de ces mal-formés. Seul un de ses yeux portaient la marque des dracs.

À cet instant, elle était soulagée de porter ses lunettes teintées, même si elle parvenait à grande peine à retenir ses larmes, elle n’avait aucun doute sur le fait que son regard trahissait ses émotions. Son père avait été abandonné peu de temps après sa naissance ; cela l’avait toujours étonnée qu’il n’ait pas été curieux de connaître ses origines. Désormais, même si elle n’était sûre de rien, elle comprenait davantage de choses. Elle réalisa également que le mépris des faibles et des personnes inférieures n’était pas seulement l’apanage des Jorique, mais potentiellement celui des dracs, race dont elle faisait à présent partie. Elle renifla bruyamment et resta silencieuse le reste du trajet, Rafael resta tout aussi taciturne.

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