Chapitre 18

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Lorsqu’ils sortirent enfin de la tente, tous les regards se tournèrent vers Océane, à son grand désarroi. Sonia accourut pour l’aider à marcher, elle ne la repoussa pas ; elle était même contente de prendre de la distance avec les deux hommes.

— Dis, vous en avez mis du temps ! Ils n’ont pas été trop méchants avec toi, j’espère ?

Océane fixa le dos de l’oncle et du père de son ami. Cet échange dans la tente lui semblait irréel à présent qu’elle marchait dehors, au soleil, au bras de sa meilleure amie.

— Non, c’est moi qui me suis montrée un peu douillette… murmura la jeune fille.

— Toi, douillette ? On aura tout vu pendant ces vacances ! rit doucement son amie.

Le doute sur ce qu’elle venait de vivre et ce qu’elle venait d’entendre l’étreignaient encore lorsqu’elle s’assit à table. Elle croisa d’abord le regard bienveillant de Sofines qui lui sourit, puis celui d’Alexandre. Le doute disparut. Outre ses iris, elle fut troublée par l’intensité avec laquelle il la fixait. C’est alors qu’elle remarqua aussi les marques rouges au niveau de sa tempe droite et de sa mâchoire. « Déjà que les gars se battaient pour elle ce matin ». Il n’était pas sérieux ? Ils ne s’étaient pas réellement battus juste pour elle ?

— Océane, tu m’écoutes ? interrompit Sofines.

L’intéressée secoua la tête et se tourna vers son interlocutrice, non sans jeter un regard aux autres garçons attablés ; Adrian n’avait rien à première vue, mais un coquard commençait déjà à se dessiner sous l’œil d’Anthony, quant à Maxime, il n’était pas là.

— Pardon Sofines, j’avais la tête ailleurs… tu disais ?

La mère de son amie sourit.

— Je te demandais si tu voulais rentrer chez toi pour te reposer ?

— Ah ! Heu… non ! J’en ai déjà parlé avec Rafael et Joaquin. Ma plaie n’est pas si vilaine et on a ce qu’il faut pour faire les soins jusqu’au départ, donc ça devrait aller…

— Tu es bien sûre ? Personne ne t’en voudra si tu veux rentrer, ma belle, insista Sofines avec douceur.

— Oui, ne t’inquiète pas. Merci…

La mère de son amie la jaugea du regard, avant d’acquiescer.

— Tu peux toujours changer d’avis, n’hésites pas, conclut-elle avant de se lever pour rejoindre son mari.

Sonia soupira et fit la moue.

— Ça va être compliqué d’aller sur les hauteurs avec ta patte folle !

— Heu ! Impossible tu veux dire ? corrigea Océane en ricanant.

— Tu n’as qu’à venir sur le bateau avec nous ? proposa Alexandre.

La proposition crispa Océane. Avant les évènements de la veille, avant de les entendre parler d’elle et de son père, avant cette stupide brûlure, elle aurait été transie par cette offre. Plus maintenant. Elle se tourna vers lui, mais se contenta de regarder ses mains, elle ne supportait vraiment pas leurs yeux.

— Merci, mais je me sens particulièrement fatiguée aujourd’hui, je pense que je vais rester me reposer au camp…

— Pas de souci, tu pourras toujours nous rejoindre demain si tu veux !

Océane acquiesça en s’efforçant de sourire, elle préférait encore gambader dans les rocheuses avec son mollet en feu que de rester avec eux toute une après-midi.

— Moi je veux bien vous rejoindre par contre ! claironna Sonia à son cousin.

— Nan, c’est mort. Tu jactes de trop, tu vas faire fuir les poissons !

Tout le monde rit à la boutade, sauf sa victime. Elle eut beau insister, ses cousins ne changèrent pas d’avis et lorsqu’elle tenta un regard vers son oncle Paulo, celui-ci s’étouffa à moitié avec son verre d’eau.

— Je t’aime beaucoup ma chère Sonia, mais la dernière fois que tu es montée avec nous, c’est toi qu’il a fallu repêcher !

Cette fois, la jeune femme s’empourpra.

— J’avais onze ans !!

— Et ? insista Paulo.

— J’en ai dix-huit à présent ! Et je sais nager !

Son oncle la dévisagea comme s’il attendait un meilleur argument. La nièce soupira, l’oncle céda.

— Tu peux venir avec nous, mais tu vas t’ennuyer ; on parle politique, pêche et on compare nos quotidiens professionnels.

Sonia fit la moue, finalement elle n’avait plus si envie que ça de monter sur leur bateau.

— Reste avec nous, ma biche ! On ira se baigner dans l’après-midi, proposa l’une de ses tantes.

Océane écoutait l’échange avec distance. Tout ce qu’elle retenait, c’est qu’elle risquait de rester seule au campement. Cela la terrifiait.

Alors que les garçons et leurs pères partaient pour pêcher le repas du midi ce qui soulagea Océane, Maxime et son père revenaient des bois, la privant de la petite bouffée d’air dont elle espérait profiter.

— On a été installer les collets, répondit Rafael au regard interrogateur de son épouse et de ses belles-sœurs.

Maxime s’installa en face d’Océane, plongeant ostensiblement son regard dans le sien.

Elle avait toujours aimé le vert tendre de ses yeux, il adoucissait les traits durs de son visage, ces mêmes yeux qui lui valaient tant de succès auprès des filles. Mais à présent, ils ressemblaient à ceux d’un cruel serpent, sans parler de la fine aura rouge autour de la pupille.

Mal à l’aise, elle se leva et se dirigea maladroitement vers sa tente.

— Je vais me reposer, murmura-t-elle.

— Tu veux de l’aide pour marcher ? proposa son amie.

Elle refusa, elle avait besoin de se retrouver seule.

À l’abri dans sa tente, Océane se jeta sur son sac à dos, à la recherche de son petit miroir de poche. Elle l’ouvrit tremblante et se regarda dedans.

Ils sont horribles !

Ne supportant plus son odieux reflet, elle referma brusquement le miroir et le jeta à l’autre bout de la tente. Elle se mit en boule sur son lit de camp et laissa les larmes couler sans barrage.

Des dragons.

Selon eux, ils étaient des dragons et elle aussi.

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