La proposition
Assis au café à l'angle de l'avenue Jean-Jacques Rousseau, Aurélie patientait nerveusement en attendant que le serveur prenne leur commande.
— Voilà, donc, chère Aurélie..., débuta le professeur.
Aurélie n'arrêtait pas de bouger sur sa chaise, excitée, mal à l'aise, amusée, surprise et désirante.
— Oui..., je vous écoute, se reprit-elle, en rentrant légèrement son menton.
Son pull beige et son jean la distinguaient de la plupart des autres étudiantes qui portaient un soin exagéré à leur tenue. C'est cela qui attirait sans doute Samuel.
Il posa une main sur le genou gauche de la jeune femme. Elle se figea, arrêtant son pied de trembler.
— Voilà, Aurélie, je sens bien que vous êtes investie complètement dans cette recherche et que vous avez de fortes capacités.
La jeune femme avait le ventre noué. Quelques minutes auparavant elle aurait été prête à embrasser Samuel, à rêver d'une idylle avec lui, et tout à coup, quand la réalité rejoignait son désir − sa pulsion − elle n'avait qu'une envie, c'était fuir, s'envoler, tel un simple moineau cherchant à éviter un chat.
Le professeur perçut le malaise et retira sa main du genou.
— Donc Aurélie, voici ma proposition.
Celle-ci n'en croyait pas ses oreilles. Comment allait-elle annoncer à ses parents que son professeur − qu'elle adorait et dont elle avait lu tous les ouvrages − ce professeur reconnu par ses collègues et toute sa hiérarchie − professeur émérite au laboratoire de zététique − qu'est-ce qu'elle dirait à ses amies d'être la compagne d'un homme qui a l'âge de son père ?
— Au point où nous en sommes...
Le serveur apparut et prit les commandes : une bière et un jus de tomate.
— Je vous invite à une excursion à dix mille kilomètres d'ici, dit-il gaiement. Qu'en dites-vous ?
Elle resta stupéfaite.
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