La Débandade (le retour)
Je vois bien dans vos yeux ce que vous pensez : « Ben voyons, elle voudrait qu’on la plaigne en plus !!!! Elle nous la joue victime mal aimée et incomprise du genre la brave mère de famille contre laquelle le sort s’acharne …. » Et bien oui, justement, je le clame haut et fort, le sort s’acharne sur moi : Comme vous tous, il me faut me sustenter, comme vous tous, j’ai une famille à nourrir et, comme pour vous tous, les temps sont durs.
Tenez, encore pas plus tard que la semaine dernière, j’ai été victime de mauvais plaisantins. Figurez-vous que j’ai reçu un prospectus dans ma boite aux lettres m’annonçant une super promo sur la viande de porc. Carrefour des Trois Vallées. Ni une ni deux, je consulte Google Map et rentre l’adresse sur Waze. Quarante-cinq minutes plus tard me voilà rendue. Mais là, surprise : nulle enseigne de la célèbre marque, juste un vague croisement avec trois chemins au milieu des champs chacun menant à une quelconque bicoque.
Je décidai de prendre à droite et arrivai devant une petite chaumière de paille. Par la fenêtre entrebâillée, j’aperçus une assiette de charcutailles. Par l’odeur alléchée, je tentai ma chance et frappai à la porte. Peut-être l’hôte de ces lieux m’inviterait-il à partager ce festin ? Bien sûr, il n’en fut rien. j’entendis le cliquetis de la serrure avant que de voir un petit porcin activer son volet roulant. Je lui intimai de m’ouvrir et face à son refus je soufflai vigoureusement sur la pauvre masure. Elle vola aussitôt en éclat. Le petit cochon s’enfuit à travers champs et je le vis gagner l’une des deux autres bicoques. Quant à moi, j’enjambai le foin épars bien décidée à dévorer saucisson et jambonneau entrevus plus tôt. C’est là que je découvris le piège : il s’agissait en fait d’éléments de dinette en plastique ! Et comme si cela n’était pas déjà assez humiliant, au centre de l’assiette un morceau de papier sur lequel était inscrit : « Paf, dans ton cul, le loup !!!"
J’étais furieuse. Et bien décidée à apprendre les rudiments de la politesse à ce petit malotru !!! Il s’était cru malin, et bien, je n’en ferai qu’une bouchée !!! C’est donc avec détermination que je me dirigeai vers la seconde baraque. Celle-ci était en bois et je pus entendre ricanements et moqueries à travers la porte. Cette fois, je dus m’y reprendre plusieurs fois et souffler plus violemment pour venir à bout de la maisonnette. Elle finit par céder livrant passage à deux affreux porcinets qui coururent se refugier dans la troisième bicoque qui, celle-ci, était de briques. Je les y suivi. Une enveloppe était scotchée à mon intention sur la porte. Je la décachetai et y trouvai à l’intérieur un nouveau morceau de papier sur lequel on pouvait lire : « Pif, dans ton fion, le loup !!! »
Rageusement, je tambourinais contre la porte. Elle résista. Je soufflai à perdre haleine contre les murs, mais rien n’y fit, cette troisième maison était inébranlable ! C’est alors que j’aperçus une cheminée …. A malin, malin et demi, j’allais leur montrer de quel bois je me chauffais à ces sales gosses. J’escaladai la façade puis glissai précautionneusement dans le conduit. La chute fut rude, très rude. J’atterris dans une marmite d’eau bouillante sous les rires de ces petites pestes qui poussèrent la cruauté jusqu’à partir en sautillant gaiement et en chantonnant « Plouf, dans notre marmite le loup !!!! »
Une fois de plus, je dus rentrer au bercail la queue entre les jambes. Alors, je vous repose la question … Qui est la victime ? Qui est constamment humiliée et ridiculisée dans vos contes ?
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