Chapitre 4 : Le siège de Troie
Le premier fait de guerre de cette immense armada se déroula sur les côtes de Mysie, non loin d’Elée. Les Grecs affrontèrent l’armée du roi Télèphe. Ce dernier avait pour mère Augé, fille d’Aléos, dans la lignée royale arcadienne. Séduite par Héraclès, ce fut ainsi qu’elle lui avait donné naissance. Son grand-père, furieux d’une telle liaison hors mariage, l’avait enfermé avec Augé dans un coffre qu’il avait jeté à la mer. Cette embarcation des plus improbables avait ensuite dérivé jusqu’au rivage de Mysie, où le roi Theuthras avait trouvé les pauvres victimes du sort. Ce souverain avait, par la suite, épousé Augé et avait élevé le rejeton du demi-dieu comme le sien. D’ailleurs, à sa mort, il avait confié à Télèphe son trône. Lorsque les Achéens débarquèrent et attaquèrent sa ville, ce fils d’Héraclès réussit à les repousser, mais y paya le prix d’une blessure infligée par Achille. Défaits comme jamais, les Grecs rebroussèrent chemin, et subirent une tempête qui les dispersa. Cette défaite entraîna une trêve de huit ans durant lesquelles Ménélas et Agamemnon préparèrent tous les Grecs à reprendre le combat.
Durant ce laps de temps, Télèphe tenta par tous les moyens de soigner sa plaie, mais en vain. Elle refusait de guérir. Désirant retrouver la santé, il se résigna à consulter un oracle qui lui apprit que seule la personne qui avait causé sa blessure pourrait lui apporter les soins nécessaire. Télèphe partit donc retrouver Achille auprès du roi d’Argos. Là-bas, Agamemnon lui fit savoir que celui qu’il cherchait ne faisait pas parti de sa cour, mais plutôt de celle de Scyros, où la furie de la mer l’avait conduit huit ans plus tôt. Le plus puissant des souverains de Grèce, bien qu’un peu réticent, lui proposa d’aller le chercher, mais en échange, il réclama à Télèphe le serment, qu’il ne tentera rien contre les Grecs, s’ils étaient amenés à reprendre les armes contre Troie, et qu’il leur indiquerait le chemin à prendre. Fatigué par la douleur, et résigné, le fils d’Héraclès lui donna sa parole, malgré le fait qu’il avait pour épouse une des filles de Priam, Laodicé. Fort de cette promesse, Agamemnon dépêcha une nouvelle fois Nestor et Ulysse à débusquer Achille, et à le ramener par tous les moyens. De toute manière, il n’avait pas vraiment le choix s’il désirait conquérir les terres troyennes, et même s’il lui sera difficile de contrôler ce fils de Thétis, tellement il était arrogant et imprévisible. Calchas n’avait-il pas prédit que Troie ne sera prise qu’à la condition qu’Achille combattit à ses côtés ?
Ainsi partirent les souverains d’Ithaque et de Pylos vers Scyros. Y arrivant, point d’Achille. Personne ne l’avait vu, ou entendu dire qu’il était auprès de Lycomède, roi de cette contrée. Personne n’avait eu vent d’un quelconque naufrage huit and plus tôt. Revenant bredouille à leur navire, Ulysse eut quelques doutes, surtout qu’en croisant quelques épouses du harem royal, il avait trouvé l’une d’entre elles bien plus grande et large que les autres. Sa physionomie lui rappelait vraiment celle du héros grec. Peu enclin à croire que ce dernier se serait abaissé à se déguiser en femme, le protégé d’Athéna tenta de laisser cette idée de côté. Toutefois, elle la tarauda durant la nuit entière, perturbant son sommeil. Finalement, elle n’était pas si incongrue, surtout au vu de la beauté d’Achille et au trait fin de son visage. Et puis, Thétis avait peut-être usé de quelques artifices pour dissimuler son fils. Protectrice comme elle l’était, ce n’était pas impossible. Pour en avoir le cœur net, appuyé par Nestor, Ulysse décida de se déguiser en marchand et de repartir vers la cour de Lycomède. Il y présenta aux femmes des bijoux, et aux hommes des armes. Il attendit un moment avant qu’une des curieuses, répondant au nom de Pyrrha, se dirigea vers ces dernières pour peser habilement un poignard dans sa main. Ainsi se trahit Achille, qui n’avait pas résisté à la tentation d’observer ces instruments de guerre, les préférant aux ornements féminins. Se dévoilant à son tour, Thétis apparut à son fils, et l’exhorta à ne pas suivre Nestor et Ulysse. N’était-il pas prédit que contre la gloire éternelle, il trouvera la mort sous les murailles de Troie ? Désireuse de le protéger, et qu’il choisisse une longue vie maritale tranquille, mais anonyme, elle avait trouvé ce stratagème de le déguiser en femme, pour le cacher aux yeux d’Agamemnon. Bien qu’attristé de faire de la peine à sa mère, Achille finit par choisir la gloire à la sécurité. Face à son choix, Thétis lui offrit alors une armure impénétrable et forgée par Héphaïstos. Achille partit par la suite pour Troie, laissant derrière lui la fille de Lycomède, Déidamie, qu’il avait épousé en secret, et qui lui avait donné un fils, Néoptolème, nommé aussi Pyrrhus, âgé de huit ans. Grâce au retour en Argos du héros, dû autant à la ruse du souverain d’Ithaque qu’à la sagesse de celui de Pylos, Télèphe retrouva la santé des mains de son bourreau, et retourna en son pays.
Pendant ce temps, Agamemnon rassembla tous les royaumes grecs et leur armée à Aulis, afin de repartir à l’assaut de Troie. Toutefois, il dût composer avec les Dieux, notamment la déesse Artémis qui provoqua le blocage de la flotte. Son armada se vit libérer du sort, une fois qu’il eut sacrifié à la divinité de la Chasse et de la Lune sa propre fille, Iphigénie. Afin naviguant sur la mer, il ne fallut pas longtemps à Télèphe pour revoir l’armada de Ménélas et de son frère frôler une nouvelle fois Mysie. Homme de parole, et contrairement à la première fois, il ne s’y opposa pas et les laissa passer, leur ouvrant ainsi le passage vers Troie. Toutefois, il n’était pas dit qu’un membre de sa maison le suivit dans sa décision. En effet, son fils Eurypylos rejoignit le camp des Troyens, mais ce fut pour y trouver la mort. Le premier à mourir dans cette guerre fut toutefois Protésilaos, abattu par Hector, sorti des murailles avec son armée pour défendre la plage. Protégé par le conseil de sa mère, Thétis, qui avait annoncé que le premier qui toucherait terre serait aussi le premier à trépasser, Achille s’était prémuni d’être cette personne. Cette précaution lui permit d’affronter Cycnos, fils de Poséidon, qui, selon certains, était en partie invulnérable. Pourtant, le héros grec parvint à le défaire en le tuant d’un seul coup. Face à cette perte, les Troyens prirent la fuite, et se réfugièrent derrière les murailles de la ville.
Commença alors le siège de Troie, qui devait durer dix ans. Durant ces années, il exista tout de même des tentatives de négociation, comme la proposition de régler le problème par un combat singulier entre Ménélas et Pâris. Ces derniers avaient convenus que si le roi de Sparte remportait le combat, le prince troyen devait lui rendre Hélène, ainsi que les clés de la ville, contre la promesse que les habitants ne subiraient aucunes représailles. A l’inverse, si la victoire allait au fils de Priam, l’époux trahi, et toutes les armées grecques se retireraient sans demander leur reste, mais surtout sans Hélène. Quand toutes les conditions furent acceptées, le duel eut lieu. Ménélas prit rapidement le dessus, et était sur le point de tuer Pâris que Vénus intervint et le sauva à la dernière minute. Réfugié de nouveau derrière les murs de Troie, ce prince refusa de reconnaître sa défaite et de respecter le contrat établi. Ainsi, reprit la guerre entre les deux armées ennemies. Plusieurs autres trêves suivirent cet événement, afin d’enterrer les morts. D’ailleurs, ce fut lors d’une d’entre elles qu’Achille rencontra Polyxène, la plus jeune des filles de Priam et d’Hécube. D’une grande beauté, le héros en tomba éperdument amoureux, et alla jusqu’à la demander en mariage à Hector. Malheureusement, pour voir sa prière exaucée, ce dernier exigea qu’il trahisse ses alliés et passe du côté de Troie. Indigné, le fils de Thétis refusa et dût abandonner son désir concernant la jeune princesse. Il tenta bien de l’oublier, mais aucun de ses efforts ne fut couronné de succès. Rien ne semblait diminuer son amour pour Polyxène, même pas la rencontre qu’il était sur le point de faire et qui risquait de donner la victoire aux Troyens. En effet, Achille, se mettant à la tête de ses Myrmidons, se rendit maître des onze cités d’Anatolie, alliées de leur ennemi, afin de couper les vivres aux assiégés. Ce fut au cours d’un de ces affrontements qu’il captura Chryséis, fille d’un prête d’Apollon, et qui fut offerte comme part d’honneur à Agamemnon. Courroucé de voir l’audace des soldats grecs à profaner son sanctuaire, la divinité des Arts frappa leur camp d’une peste dévastatrice.
Afin de l’apaiser, le roi d’Argos et de Mycènes fut dans l’obligation de rendre sa prisonnière. Humilié, il exigea réparation en réclamant comme sien celle qui avait été échu comme trophée à Achille, Briséis. De son vrai nom Hippodamie, cette dernière était également la fille du prêtre d’Apollon au sein de la ville de Lyrnessos en Cilicie de Troade. Epouse de Mynès, elle y avait régné à ses côtés. Durant le siège de Troie, elle avait vu son mari se faire tuer, ainsi que ses trois beaux-frères, pour finir par être amenée en captivité et donnée à Achille. Le Destin voulut que ce dernier fût séduit par ses longs cheveux châtain, ses yeux bleus et sa peau claire. En plus de sa beauté, l’intelligence, l’instruction et l’humeur charmante de Briséis avaient fini par conquérir quelque peu le cœur du héros grec. Vivant des sentiments réciproques, ce nouveau couple auraient pu être heureux, son amant essayant d’oublier dans ses bras Polyxène, mais c’était sans compter l’arrivée de Talthybios et d’Eurybate qui soutirèrent Hippodamie à Achille sur l’ordre d’Agamemnon. Il s’enferma dans une colère noire de voir son bonheur amoureux s’envoler une nouvelle fois, et d’être ainsi humilié. Ce dernier refusa dès lors de continuer à se battre pour lui, et ordonna à ses Myrmidons d’en faire autant. Il alla même jusqu’à se rendre sur la plage, afin de prier sa mère d’intercéder auprès de Zeus pour qu’il favorisa Troie. Cette absence dans les rangs grecs et cette prière furent une bénédiction pour les Troyens, qui enchaînèrent victoire sur victoire. Bien sûr, Agamemnon, conscient de la nécessité du retour d’Achille, essaya de l’amadouer en lui offrant de l’argent et des femmes, mais rien n’y fit. Il fallut que la Mort touche le cœur du fils de Thétis pour qu’il se décide à reprendre le combat, et cette mort eut pour visage celui de son ami Patrocle.
Patrocle, fils de Ménoetius, roi des Locriens et de Sthénélé, était un prince exilé de sa patrie pour avoir tué par accident le fils d’Amphidamas. Ce fut au cours de son séjour à la cour de Pelée, père d’Achille, où il avait trouvé refuge, qu’il avait rencontré ce dernier. Le suivant dans son étude auprès du centaure Chiron, les deux jeunes hommes s’étaient liés d’un lien fraternel indestructible. Sous les murs de Troie, Patrocle avait bien tenté de convaincre Achille d’abandonner sa colère et son entêtement, pour continuer à lutter contre les Troyens, mais en vain. Il ne réussit qu’à obtenir la permission de revêtir son armure et de combattre à sa place, afin de galvaniser les troupes grecques, contre sa promesse de ne jamais défier le héros de Troie, Hector. Promesse faite, Patrocle porta les armes d’Achille, hormis sa pique, si pesante qu’à part son légitime propriétaire, personne n’était capable de brandir. Malheureusement, il était dit qu’il ne tint pas sa parole et combattit contre le prince troyen, qui favorisé par Apollon, le tua. Son corps fut ramené à son ami par Ménélas et Ajax.
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