Fallen angel I won't let you fall tonight

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« Ariel m’a laissée rentrer chez moi hier soir. Je pleurais. Je ne sais plus pourquoi je pleurais, mais je pleurais.

- Tu n’aurais jamais dû accepter ça Amélie, me dit sombrement Cléophée.

- C’est trop tard maintenant. »

J’avais décidé d’appeler Cléophée le lendemain soir, dans ma salle de bains. Je devais me changer pour aller me coucher mais devant la caméra, j’hésite à laisser voir à Cléophée les nombreuses traces sur mon corps.

« C’était bien au moins ?

- Je ne referais pas ! je réponds en rigolant. C’est souvent pas vraiment génial les fantasmes. Certains devraient en rester et ne jamais se concrétiser.

- Montre moi ton état un peu, annonce-t-elle en redevenant sérieuse. »

J’hésite à lui montrer réellement mais je me décide à lui exposer le moins grave, pour ne pas qu’elle s’inquiète. De toute façon, elle arrive demain chez son père, donc nous nous verrons chez Charlotte dans peu de temps. Je dévoile une partie de mon cou parsemé de traces rouges et violettes et rapproche ensuite mes poignets marqués de mon téléphone.

« Je ne veux pas en savoir plus pour l’instant, soupire mon amie. Ni en voir plus. Rien. Va te coucher, dors. Je veux te voir reposée demain.

- D’accord Féfée, je fais ça. Dors bien toi aussi. »

On raccroche quelques minutes plus tard. Je mets un certain temps à m’endormir, pour plusieurs raisons. De nombreuses douleurs et l’appréhension de la journée de demain me tiennent éveillée.

Je rejoins Cléophée et Charlotte un peu après quatorze heures le dimanche. L’ambiance est assez silencieuse, un peu pesante. Les discussions se font rares et je m’en rends bien compte étant donné que je vois des détails dans le salon de Charlotte que je n’avais jamais remarqués auparavant. J’ai l’impression que les gens sur la photo de famille au dessus de la télévision essayent de me faire passer un message à travers leurs regards de papier. Le masque africain à moitié caché derrière un vase semble me regarder de la même manière. Me demandent-ils de briser ce silence ? Nous sommes seulement toutes les trois chez Charlotte, mais elle nous a dit que sa sœur ne devrait pas tarder à venir, bien que nous ne la croiserons sans doute pas. Nous décidons de monter dans la grande chambre de notre amie et là les échanges reprennent un peu plus.

Pourtant, le visage de Charlotte habituellement si doux est sombre et fermé. Cléophée, elle, est très pensive et me jette souvent des regards poussés pour que je me décide enfin à aborder le sujet qui fâche. A un moment, je me lance, de toute façon il faudra bien en parler un jour ou l’autre. Charlotte et Cléophée sont assises sur le lit, et je me lève et me plante devant elles. La première redresse doucement la tête vers moi tandis que l’autre m’encourage du regard.

« Comment ça se passe avec Nathaniel en ce moment ? »

Voilà, directement une mauvaise phrase d’accroche. Si tout est rentré dans l’ordre, elle ne fera pas attention à mes dires. Et dans ce cas là jamais je n’accepterai qu’elle reste avec lui, encore moins s’il a quitté l’« empire ».

« Je… je ne sais pas trop. »

Tous mes muscles se détendent d’un seul coup, je vois enfin le bout de toute cette histoire. Je savais que paraître timide devant Ariel me servirait à quelque chose, et je vais bientôt en avoir la preuve. Un petit soupir s’échappe de mes lèvres, mais Charlotte ne s’en formalise pas. Je la laisse continuer, et Cléophée écoute notre échange sans intervenir.

« Je ne sais plus quoi penser de lui. Il n’est plus si gentil et… j’ai l’impression que l’empire ne le réussit pas. Je lui en ai parlé, je lui ai dit que peut-être qu’il fallait qu’il demande à le quitter, mais il s’est énervé et s’est ensuivi ce qui s’ensuit à chaque fois. »

La colère reprend à nouveau le dessus sur mes émotions, mais la peine vient bientôt la remplacer. Charlotte est coincée avec lui, pour protéger sa sœur et sans doute aussi car elle l’aime encore. Je comprends ce qu’elle ressent alors voir son air attristé me calme.

« Tu sais, je t’avais dit qu’il se comportait comme ça à cause de l’« empire ».

- Oui, mais je doute encore. Je suis sûre qu’il peut se rendre compte de ce qu’il me fait et redevenir comme au début.

- Charlotte, il n’a jamais été comme ça. Il te montrait cette face de lui pour mieux t’attirer dans ses filets. C’est lui qui, l’année écoulée, a demandé à Lisa Bodon de rejoindre l’« empire ». »

Je lui raconte à nouveau ce que je sais, par Cléophée, par Ariel et par mes recherches personnelles. Elle hoche la tête au fur et à mesure de mon récit, comme pour me dire que je lui ai déjà dit tout cela. Alors, je défais lentement mes habits, un à un jusqu’à être en sous-vêtements, pour montrer à mes amies, et en particulier à Charlotte, les traces qu’a laissé Ariel.

Sont visibles les multiples morsures et suçons, les marques rouges du fouet sur ma peau claire, les brûlures des cordes abîmées le long de mes bras, de mes jambes de mon torse et autour de mon cou, et les larmes de dégoût scintillant sur mon visage.

« Je t’en prie… crois moi. »

Je croise d’abord le regard brûlant de colère et d’amertume de Cléophée, puis celui brillant de larmes de Charlotte. Cette dernière se lève et se place en face de moi. Quelques rayons de soleil traversent ses cheveux ondulés. Elle me prend doucement dans ses bras, en faisant attention à ne pas me serrer trop fort. Je vois Cléophée sourire en coin et je ferme les yeux, essayant de me calmer et de retenir mes larmes.

« Pourquoi l’as-tu laissé te faire ça ?

- Je voulais… des preuves.

- Tu n’avais pas besoin de tant de preuves Amélie…

- Pour te sortir de là, si. Pour toi, si.

- Mais je ne comprends pas. »

Elle s’est baissée pour ramasser mes vêtements et me les a donnés, en me disant de me rhabiller. J’ai obtempéré et me suis assise de nouveau à côté d’elle, dans le silence. Je n’entendais que ma respiration et mon cœur battre la chamade. Au bout d’un moment, c’est elle qui reprend la parole.

« Mais pourquoi es-tu allée si loin pour... moi ?

- Je… c’est trop compliqué à expliquer. Ce qui compte c’est que tu aies compris.

- Bien sûr que j’ai compris maintenant.

- Bon, nous avons deux choses à faire, annonce Cléophée en voyant que le discussion commence à tourner en rond. Tournons cette petite vidéo pour vos deux témoignages, on la mettra dans le dossier. Désolée Amélie, mais il va falloir que tu te déshabilles à nouveau, sourit-elle pour détendre l’atmosphère. Ensuite on ira voir Laura pour lui expliquer de qui elle doit se méfier et de qui elle ne doit pas s’approcher. »

Les deux missions s’accomplissent assez rapidement, et Laura comprend la gravité de la situation et nous promet d’être attentive. Elle nous a confié qu’elle voyait bien que sa sœur n’était pas dans son assiette en ce moment et a confirmé ce que Cléophée lui a demandé : elle pense aussi que Charlotte a sans aucun doute une attirance envers quelqu’un d’autre de Nathaniel.

Ensuite, nous sommes de nouveau retournées dans la chambre de Charlotte. Ses yeux passent souvent sur moi, et lorsque je les croise, elle me fait un sourire adorable et un peu gêné.

« Je suis désolée de reparler de ça mais… commence-t-elle. Pourquoi as-tu accepté tout ça pour moi ?

- C’est vraiment compliqué à expliquer.

- Après tout ce que tu as fais pour moi… je crois que je ressens la même chose. »

J’ai peur de faire quoi que ce soit qui pourrait tout gâcher. Je suis actuellement assise en tailleurs en face d’elle sur son lit, et Cléophée ne dit rien. Son regard est seulement planté sur moi, comme pour me dire : lance toi ! Je sens à nouveau les larmes glisser sur mon visage, et je m’essuie les yeux du revers de la main.

« Je peux peut-être te le faire comprendre… avec un simple geste... »

Ma gorge se serre à la fin de ma phrase. Les gouttes salées continuent de dévaler mes joues sans que je ne puisse les arrêter. Alors, je pose ma main droite sur le genou de Charlotte et me penche doucement vers elle pour venir déposer mes lippes sur les siennes, fraîches.

Elle ne me repousse pas, et une explosion de joie se fait sentir dans mon cœur. On se sépare après quelques secondes. J’aurais voulu qu’elles durent l’éternité. Alors, c’est elle qui prend les devants, et elle m’embrasse à nouveau. Les yeux clos, j’entends Cléophée quitter la pièce pour nous laisser seules.

Lorsqu’on se sépare encore, j’ai la gorge nouée et je ne peux pas dire un mot, mais je remue les lèvres dans l’espoir de me faire comprendre. Elle essuie mes larmes de son pouce puis m’adresse alors son adorable sourire en répondant à mon affirmation muette.

« Moi aussi ! »

***

https://www.youtube.com/watch?v=nuLMDvoshrk

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