Je l'aimai

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Amiens, le 17/03/2004

Blanche, ma chère amie,

Cette lettre doit te surprendre. Je sais que s'écrire peut sembler un peu désuet mais j'avais à cœur de te parler. Cela fait désormais plusieurs moi que j'hésite à prendre ma plume. J'espère que tu ne me prends pas pour un fou. Cela fait maintenant 4 ans que tu as quittée Amiens. Et cela n'en fait pas vraiment moins que tu ne m’as pas adressé un seul mot. Sans doute m'as-tu oublié. Je garde un doux souvenir de nos dernières vacances avec la bande avant que chacun ne rejoigne son nouveau lycée. Les autres au moins n'étaient pas partis tout de suite, mais toi...

Je sais que le temps exige parfois d'oublier des gens à qui nos souvenirs se consacraient jadis. Mais je ne parviens à t'effacer de mon esprit. Ces longues années ne m’ont guère suffi pour faire le deuil de ces jours heureux.

Je sais que mes mots sont dangereux, que pour toi je suis désormais loin, que toutes ces lignes peuvent te faire peur. Mais si c'est le cas, tant pis. Et si je n'habite plus aucune de tes pensées, alors sache que moi, jamais je ne t'ai oublié.

Je préfère mourir de chagrin que de vivre dans cette attente. Savoir si tu gardes dans ton cœur encore un peu de place pour mon sac à dos et mes soucis. Tue moi de larmes si il le faut mais par pitié, dis le moi : Qui suis-je encore pour toi ?

Je ris parfois en me souvenant de notre dernière soirée. Paul était encore en vie. Lui aussi me manque, tu sais.

                                Fidèlement

Martin

Lille, le 02/04/2004

Martin mon doux ami,

Ta lettre m'est allée droit au cœur. Le temps est parfois sévère et marque, de son fer rouge, la fin d'une époque lorsque celle-ci est pourtant à son apogée. Amien me parait loin tu sais. Je suis désolé de ne guère t'avoir donné plus de nouvelle. Mon souvenir de nos jeunes années m'est aussi doux et souvent me prend une ardente volonté de m'y replonger tout entière. Si mon silence t'a convaincu de ceci, soit en certain : Jamais je ne t'ai oublié. Les autres non plus. Je m'attristais à l'idée de penser que cela n'était pas réciproque. Mais tes mauvaises blagues, ton sourire charmeur, tes consolations dans les moments de tristesse sont de ces choses qui rendent l'existence plus douce. T'avoir comme ami fut sans doute une réponse du ciel pour parvenir à survivre à mon malheur. Tout est si simple avec toi.

Je repense à Paul souvent. Je sais qu'au ciel il est heureux.

Tu me manque.

Avec toute mon affection

Blanche

Amiens, le 09/04/2004

Ma chère Blanche,

À la lecture de ta lettre, je n'ai pu m'empêcher de verser une larme. Je la dédie à notre bon souvenir. Ainsi donc tu n'as pas tiré un trait sur nos aventures d'autrefois. Aujourd'hui je suis le dernier à Amiens, toute la bande et partie et je crois me sentir cruellement seul. Comment as-tu pu penser disparaître de nos souvenirs ? La vie est tellement plus douce avec toi. Tu était, pour ce groupe comme une maman : Réconfortante, douce, confidente. Sans doute trouves-tu un peu étrange cette comparaison. Mais c'est à ton contact que j'ai saisi la véritable importance de la féminité dans la vie d'un homme. J'ai compris que sans vous, un homme n'était rien. Et j'ai surtout compris que, sans toi, je n'étais rien non plus.

C'est dur tu sais.

Avec toute mon amitié,

Martin

Lille le 14/04/2004

Martin, mon ami,

Je dois te dire quelque chose. Je crois que je t'ai aimé. Je crois même t'aimer encore un peu. A la lumière de tes confidences, je t'ouvre tout entier mon cœur car tes mots m'obligent à te dire la vérité. Voilà ce qui explique mon silence. J'avais peur de te le dire car je craignais que cela ne vienne, à la manière d'un poison, abîmer notre amitié et faire du mal à la bande. Ainsi, je suis parti seule, sans bruit, en espérant faire le moins de mal possible, j'ai pourtant l'impression que c'est l'inverse qui s'est produit.

Retrouvons-nous un jour.

Je prie bien pour toi

Blanche

Lille le 03/05/2004

Martin, mon ami,

Ton silence m'inquiète. Pourquoi ne me réponds-tu pas ? L'amour que je te porte n'est-il peut-être pas réciproque. Je voudrais comprendre.

Je ne t'oublie pas

Blanche

Amiens, le 05/2004

À l'attention de Mlle Blanche Baudricourt,

Nous avons le regret de vous annoncer le décès de Mr Martin Londal qui a mis fin à ces jours le 14/04/2004.

Les obsèques se tiendront le Mardi 28 avril

Nous vous adressons toutes nos plus sincères condoléances,

Hopital Saint-Vincent

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