Lettre n°1 - 22/05/20
Coucou Abuelo,
Aujourd’hui, on nous a dit que d’ici lundi ou mardi tu serais parti. Tu as fait un AVC, le 17 mai. Toute la journée tu as réussi à me faire pleurer encore et encore. J’arrivais à me reprendre et ensuite je pensais à ton regard, à ton sourire et je me re-noyais dans mes larmes.
C’est tellement difficile, abuelo, de savoir que tu vas me laisser pour te reposer, ne juges pas c’est ce que je me dis. Voilà une des choses les plus dures pour moi : je n’ai pas pu te serrer contre moi et te dire à quel point je t’aimais. C’est vrai j’ai pu te le dire au téléphone... Mais c'était bizarre, moi je pouvais te parler pour te dire ce que je pensais et toi tu était obligé de juste écouter.
Tu n'as rien pu me répondre à cause de ton AVC, tu as perdu ta faculté de parole, d'après M. et P. tu étais très conscient. Eux, ils ont pu te voir. Je n'ose pas imaginer comme ça a dû être atroce pour toi de voir M., P., T. et E. sans pouvoir leur parler, sans pouvoir dire ce que tu ressens. De ne pas pouvoir nous répondre à EM., TO. et moi quand tu nous as eus au téléphone, lorsqu'on t'a dit que l'on t'aimait et puis ce moment qui arrive juste après, quand on s'est effondrés en larme. Que l'on a raccroché parce que c'était trop dur pour nous de te savoir là-bas, de savoir que tu nous aimes mais que tu peux pas nous le dire.
Si tu savais comme c’est dur de savoir que tu m’aimes parce que je te connais, mais au final toi tu ne pourras jamais me répondre “ moi aussi je t’aime, ma grande”.
A partir de maintenant je vais t’écrire dès que j’en aurais le besoin et ces lettres je les placerai en lieu sûr, dans le premier livre que tu m’as offert, l’apprenti épouvanteur.. Tu te souviens ? Je crois que c’est un des très nombreux merveilleux souvenirs que j'ai avec toi.
C’est toi qui m’as initié à la lecture, tout d’abord avec les bibliothèques rose High School Musical ( où je rêvais d’être Gabriella Montez ). Je me souviens que quand tu as vu que je les avais dévorés en une journée tu es reparti illico presto à Casino et tu m’as acheté mon tout premier gros roman. Ce roman de sorcellerie de Joseph Delanay, L'apprenti épouvanteur.
Et je n'en te remercierais jamais assez car c'est toi qui as fait de la lecture une passion. La lecture m'aide beaucoup et elle m'a en partie montré qui j'étais mais aussi qui je voulais être.
En fait, maintenant que j'y pense tu m'as initié àpas mal de choses...c'est vrai: tu m'a initié aux frites maisons ( mon dieu ça aussi, ça va me manquer, tes frites étaient juste délicieuses ), tu m'a également initié à la pose de carrelage ( ce souvenir là c'est aussi un des meilleurs), d'une certaine manière je pense que tu m'a aussi appris à m'apprécier moi, oui tu m'a en quelques sorte initié à moi, en tant que bon conseiller que tu étais !
Je suis désolée, mais là je commence à craquer.
J'ai encore tellement d'autre choses a te dire, ce qui suivra risque pour moi d'être très compliqué !
Alors je sais que tu veux pas et voudrais pas que je pleure mais ne m'en veux pas d'accord, car c’est pas possible de ne pas pleurer dans ce genre de moments, Abuelo !
Je t'aime tellement Abuelo, tu resteras à jamais dans mon coeur.
Ta grande,
Laure
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