Terminus - 3ème partie : correspondance
Dimanche 11 août 2013
Cela faisait maintenant plus d'une semaine que Richard était de retour en France. Après un bref séjour à Paris, où il occupait un appartement spacieux, il était reparti pour la Bourgogne. Le petit immeuble dont il était propriétaire, à Sens, était aménagé avec goût et pragmatisme.
Confortablement installé dans son fauteuil préféré, Boyd s'interrogeait. Devait-il contacter Elena ? Il s'inquiétait pour elle. L'enquête concernant la mort du jeune O' Maley la touchait de près et ravivait probablement des souvenirs cauchemardesques. N'y tenant plus, il attrapa son portable posé sur le guéridon et appela son employée, qu'il considérait presque comme sa fille.
Elena vit le numéro de son patron s'afficher sur l'écran de son mobile et décrocha. Que pouvait bien lui vouloir Monsieur Boyd ? Il lui avait proposé d'avancer ses congés. S'il lui téléphonait, c'était qu'il avait dû se produire quelque chose.
“Allo ? Monsieur Boyd ?” s'enquit la jeune femme
- Elena, tout va bien ?
- Oui ! Je suis en Bretagne avec le frère de Dorian ...
- Ah ...
Richard était plus que surpris. Que faisait sa chère Elena avec le frère de cet être méprisable ? Qu'avait-il bien pu lui échapper ? Lors de leur seconde rencontre, Dorian avait quasiment supplié l'homme d'affaires de le mettre en contact avec Elena. Il espérait qu'elle le pardonne mais ne savait pas comment l'aborder. En fait, il avait peur. Mais il avait ensuite affirmé à Monsieur Boyd qu'il avait causé l'accident fatal aux parents de la jeune femme et lui avait rapporté un passé peu reluisant (cambriolages, vols avec agressions). De ce fait, Richard l'avait brutalement congédié, sans accéder à sa demande. Il allait devoir avouer à Elena qu'il connaissait Dorian s'il voulait parvenir à débrouiller la situation.
- Elena, je dois vous dire quelque chose ...
- Monsieur, vous m'inquiétez !
- J'espère que vous ne m'en voudrez pas ... Dorian m'avait contacté pour savoir comment vous aborder, il vou...
Elena le coupa vivement :
- Comment ? Et vous ne m'avez rien dit ?
- Ecoutez, lorsque je l'ai rencontré, il m'a dit être responsable de l'accident...
- Mon dieu !!! Mais non ! Vu le message qu'il a laissé à mon intention, je me doute que c'est ce qu'il croyait. Je ne vous ai jamais raconté les circonstances du drame. Je comprends donc que les mots de Dorian aient pu vous induire en erreur. Il est temps que je vous explique.
- Je vous en prie Elena, vous n'êtes pas obligée ...
- Si, il le faut, rétorqua la jeune femme. Elle replongea dans ses douloureux souvenirs. Les larmes lui montèrent aux yeux et ce fut d'une voix tremblante qu'elle poursuivit : « c'était le jour de mon anniversaire, il y a dix-sept ans. Nous rentrions à la maison. Dorian et moi chahutions à l'arrière de la voiture. Mes parents étaient excédés, surtout papa qui conduisait. Malgré les injonctions nous ordonnant de nous calmer, rien n'y faisait. A un moment, mon père a regardé Dorian par le biais du rétroviseur et a élevé le ton. Au moment où il a reporté son regard sur la route, un piéton traversait juste devant la voiture. Papa a donné un coup de volant pour l'éviter. En sens inverse arrivait un camion. Le conducteur a klaxonné et freiné mais il n'a pu nous éviter...
- Elena, je ... je suis désolé de vous avoir fait revivre tout ça. Mais Dorian n'était encore qu'un tout petit garçon à cette époque. Comment a-t-il pu se croire coupable ? Il se serait donc donné la mort ?
- Non, c'est ce que j'ai pensé aussi, vu le mot trouvé dans sa poche. Mais il a été assassiné.
- Vraiment ?
- Oui, empoisonné très exactement.
- C'est sûrement dû à son passé douteux ...
- Vous êtes donc au courant ?
- Dorian m'avait vaguement expliqué. Vous en avez parlé aux policiers qui vous ont interrogée ?
- Non, pas encore, car Junior, le frère de Dorian, ne m'en a parlé qu'après leur dernière visite.
- Elena, je vais vous faire parvenir un courrier, c'est en fait une lettre que m'avait envoyée le jeune O' Maley. Allez donc savoir pourquoi je l'ai gardée ! Cela pourra peut-être vous être utile. Si vous voulez bien me laisser votre ...
Elena le coupa, se demandant en son for intérieur ce que pouvait bien contenir cette missive :
- Adressez-la à mon domicile. Junior et moi allons revenir à Sens d'ici deux à trois jours. Nous avons fait le tour des résidents habituels ici. Nous n'apprendrons rien de plus.
Richard se retrouvait impliqué malgré lui. Il se doutait qu'il finirait lui aussi par être interrogé par la police. Il redoutait ce moment, car même s'il n'avait jamais rien fait d'illégal, son passé était entaché de la mort d'une femme. Si ceci venait à être divulgué, sa réputation serait ruinée.
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