Chapitre 7

10 minutes de lecture

- Vite ! s'écria une fille en en tirant une autre par la main. Allez vite !

- Attends, tu vas trop vite !

- Ho dépêche toi ou on sera en retard !

- Mais y a trop de monde !

- Tant pis, je te laisse là !

- Non Cérésia ! Cérésia !

Un mouvement de foule et la jeune fille se retrouva séparée de sa sœur qui s'était déjà empressée de courir au loin afin de rejoindre l'entrée des grilles pour accueillir leur père qui rentrait de croisades.

La foule applaudissait les héros, mais la pauvre fillette propulsée en arrière se retrouva piétinée par les passants qui ne faisaient aucunement attention à elle.

Déguisée mais pourtant reconnaissable avec son regard étrange, personne ne voulait s'arrêter pour l'aider.

- Cérésia... gémit-elle en tentant de se relever, mais un pieds lui écrasa la main. Aïe !

- Vous allez bien jeune fille ? demanda une voix sombre et froide tout prêt d'elle.

- Qui... Ma... ma sœur est partie devant et...

Les larmes commençaient à lui brouiller la vision, cachant ce visage étrange qui semblait pourtant inquiet.

- Je vais vous aider déjà à sortir de là. Soyez tranquille, je ne vous ferez rien.

- Co... Comment pourrais-je vous croire ?

- Eh bien je ne vous ai pas transpercée avec mon épée et actuellement tout le monde s'est écarté de nous pour vous éviter d'autres blessures de ce genre.

Peu importait qui il était, elle devait lui accorder le fait qu'il avait raison sur ce point. Timidement, elle lui tendit sa main libre pour s'appuyer sur la blesser et tenter de se relever, mais la douleur la fit retomber sur les fesses.

Elle fut soudainement soulé du sol dans des bras en développements mais qui avaient déjà bien servit pour s'être renforcés malgré l'âge de son sauveur.

- Ne pleurez pas, dit-il d'une voix sombre, vous êtes en sécurité.

- M...Merci... Messire...

Le jeune homme seulement âgé de 15 ans lui adressa un sourire touché et un regard luisant.

- Où vous rendez-vous ?

- Au palais, répondit-elle timidement.

- Au palais ? Y travaillez-vous ?

Comprenant que ce dernier n'était pas d'ici ni coutumier à son regard pourtant connu de tous dans le royaume, elle secoua négativement la tête.

- Non ? Alors pourquoi vouloir vous y rendre ?

- Je... j'y vis...

De plus en plus intrigué le jeune homme la dévisagea, plongeant dans son regard étrange et s'y sentit comme piégé dans une chaleur agréable.

- C'est elle ! entendirent-ils autour d'eux.

- Princesse Kaerthage ?

- Princesse ? s'étonna alors le jeune homme qui la tenait toujours dans ses bras. Vous êtes une des filles du Roi Avening ?

- Je le suis, répondit-elle en baissant la tête.

Comprenant une gêne si ce n'est quelque chose de plus blessant pour elle, il n'ajouta rien de plus, pourtant sa curiosité était alimentée par une fascination dévorante d'en savoir plus sur elle. Pourquoi n'avait-elle aucune escorte ? Elle lui avait dit avoir été avec sa sœur mais que cette dernière était déjà partie devant pour retourner au palais. Alors pourquoi n'y était-elle pas non plus ?

En regardant de plus près, il pouvait voir qu'elle était déguisée comme une paysanne, ce qui l'avait trompé, son regard triste et timide pourtant était assez étrange et spectaculaire à regarder. Blessée à la main, salie par la poussée des habitants qui l'y avaient bousculé, elle ne ressemblait plus à rien d'une princesse mais avait tout d'une souillon.

- Je vais vous ramener dans ce cas, se proposa t-il. Je vous laisserai rentrer tranquillement.

- V-Vraiment ?

- Vous avez ma parole Votre Altesse.

- M... Merci Messire.

- Nohan.

Elle lui adressa un regard brillant et un petit sourire fendit son doux visage poupin. Elle était adorable et le jeune homme sentit son cœur se compresser dans sa poitrine. Elle avait quelque chose en elle qui le faisait réagir de façon si chevaleresque et si attentionné que même lui en était étonné. Alors il l'embarqua à travers la foule, bousculant les passants amassés sur les routes, attendant de voir passer l'armée de Solaris, revenir triomphante.

- Votre père doit être fière d'avoir une fille telle que vous Princesse, dit-il alors qu'il se faufilait agilement entre les gens.

Mais l'absence de réponse de la jeune fille lui apprit qu'elle n'était pas forcement de son avis. Un coup d'œil sur elle lui brisa le cœur.

- Nous y voilà, dit-il alors qu'il la déposa devant les grandes grilles alors que l'armée, conduite par le Roi, apparaissait enfin.

- Merci Nohan. dit-elle.

Mais alors qu'elle allait rentrer, le Roi s'arrêta devant elle, lui envoyant un regard noir et courroucé.

- Père ! s'écria alors Cérésia en apparaissant changée et rayonnante.

- Cérésia, ma fille !

- Oh mon dieu ! Kaerthage ! Dans quel état es-tu ?!

Nohan n'aimait pas ce qu'il se jouait devant ses yeux et sentit la tristesse de la fillette qui retenait tant bien que mal ce qu'elle avait tant envie de dire, ainsi que ses larmes.

- Pardon Cérésia, je t'ai perdu dans la foule.

- Vous y étiez toutes les deux ?! tonna la voix du monarque furieux. Tu as encore entraîné Cérésia avec toi !

Le ton accusateur fit sourire la princesse, mais pour Kaerthage ce n'était qu'une plaie de plus qui ne se refermerait jamais vraiment.

Nohan fronça les sourcils quand la petite lui attrapa son habit dans sa petite main tremblante. Elle tentait de faire bonne figure, affronter son père tout comme le peuple qui ne semblait pas la voir pour mieux célébrer la beauté de sa soeur et la victoire de leur Roi. Il fit glisser sa main le long de son corps jusqu'à atteindre discrètement celle de la fillette qui ne broncha pas.

- Tu resteras dans ta chambre pour la soirée, je ne veux pas te voir au banquet.

- Oui père. répondit-elle, tête baissée.

Le Roi talonna son cheval qui reprit la marche et pénétra dans la cour du palais, accueilli par le reste de la famille royal, souriant faussement pour lui faire plaisir, tout en retenant en eux ce goût amer que d'avoir un monarque aussi avide que lui.

Nohan sentit bouillir en lui cet accès de rage qu'il tentait depuis quelques années déjà à calmer, mais impossible quand même l'entité qui partage votre corps s'emballe pour cette petite princesse innocente dont les épaules frêles tremblaient mais restait tout de même digne après une humiliation publique. Sa petite main dans la sienne lui rappela qu'il pouvait la briser à tout moment et qu'il devait faire attention à elle.

- Nohan, murmura t-elle.

- Princesse ?

- Je...

- Voulez-vous marcher un peu sur la plage ?

- Dans les collines.

- Comme il vous plaira Majesté, dit-il en s'inclinant face à cet enfant.

Il siffla et un jeune cheval apparu, repoussant la foule amassée autour d'eux pour continuer à suivre l'arrivée des soldats du royaumes.

- il est beau... fit-elle admirative.

- N'en avez-vous pas ?

- Juste un poney trop vieux mais mère m'a promis un nouveau si je restais à l'écart de Cérésia. Mais je crois que cela ne sera pas possible...

- Ne désespérez pas Votre Altesse, tenez, vous pouvez le caresser si vous le souhaitez.

- Puis-je vraiment ?

- Bien sûr !

Nohan la mena jusqu'au jeune destrier qui piaffait, impatient, et fringant. Il pencha sa lourde tête vers elle et se laissa toucher, timidement elle lui toucha le museau puis, voyant qu'il se laissait faire, elle lui gratta entre les oreilles. L'animal soupira, complètement absorbé par la caresse de cette petite fille bien étrange.

Soudain, elle se sentit soulever dans les airs et atterrie sur la selle.

- Wouaa ! s'écria t-elle alors qu'elle put voir au loin le château sur une hauteur bien différente.

Depuis son perchoir, elle pouvait voir la beauté des lieux, le monde regroupé, la procession de soldats et la famille royal réuni bien plus loin, parlant avec le Roi, s'inclinant face à lui.

- Allons, s'exclama alors Nohan, grimpant à son tour sur son cheval qu'il talonna.

D'un mouvement ample de rênes, il ordonna à son destrier de quitter les lieux, faisant demi tour pour prendre la direction des collines qu'il pouvait facilement voir non loin de la sortie de la capitale. Kaerthage jeta un dernier regard triste à sa famille qui faisait fi de sa présence, concentrée sur la victoire du Roi et la joie de Cérésia qui prenait le soleil dans sa robe dorée.

- Envieuse ?

- Triste. Mais n'est-ce pas le lot de beaucoup de Princes et Princesses difformes ?

- Vous ? Difforme Votre Altesse ?

- Mes yeux, ne les avez vous pas remarqué ?

- Si fait, mais en quoi consistent-ils une difformité ?

Kaerthage sentit son petit cœur palpiter dans sa jeune poitrine. Se jouait-il d'elle ou le pensait-il vraiment ?

- Vos yeux sont certes unique Votre Altesse, mais-

- Kaerthage.

- Pardonnez-moi... Kaerthage. Mais ils ne sont en rien un handicap. Ceux qui le pensent sont soit superstitieux soit bien crétins.

Surprise, elle ne put empêcher de glousser. Nohan sourit.

- Il est agréable de vous entendre rire petite Princesse.

- Merci Nohan, dit-elle, la tête baissée, les doigts accrochées à la crinière sombre du cheval marchant tranquillement.

Ils atteignirent assez vite les hauteurs qui surplombaient la ville et le château, dominant la terre pour rejoindre le ciel. Nohan mit pieds à terre et aida la fillette à le rejoindre, la soulevant dans les aires, il l'entendit rire à nouveau. Son visage enfin rayonnant de joie le transporta. Ses yeux tantôt larmoyant étaient luisant d'une certaine liberté et d'une joie enfantine longtemps négligée.

Le cheval brouta tranquillement l'herbe verdoyante tandis que Nohan et Kaerthage s'installaient pour admirer la vue.

- D'où venez-vous Nohan ? demanda t-elle alors, le regard perdu au loin.

- Du Nord.

- Le Nord ? Là où il fait froid tout les jours de l'année ?

- Tout à fait, vous êtes bien renseignez petite Princesse.

- Si père n'aime pas ma présence, il refuse que je manque d'éducation, pour ne pas faire honte à notre famille, lui dit-elle tristement.

- Alors éduquez moi, que savez-vous sur mon Royaume ?

- Votre Royaume ?

- Je ne me suis point présenté, veuillez m'excuser. dit-il en se levant, pour mettre un genou à terre face à elle, lui prenant la main et lui adresser un baise-main sur le dos de cette dernière, faisant rougir ses petites joues. Je me nomme Nohan Karsan, second Prince de Kaolan, du Royaume du Nord. Pour vous servir petite Princesse Kaerthage Avening.

Figée, elle se sentit honteuse.

- P-P-Pardonnez moi ! s'écria t-elle en se levant pour s'incliner également malgré sa tenu salie, elle exécuta une révérence élégante.

- Nul besoin de ceci entre nous ma chère, dit-il en tentant de paraître plus adulte et digne, bombant le torse et redressant la tête.

Kaerthage pouffa, le faisant sourire.

- Ainsi nous sommes donc du même rang Prince Nohan. dit-elle.

- C'est exact. Bien que je vous devance de quelques années.

- j'ai 9 ans ! s'écria la fillette soudain piquée par le prince moqueur.

- Oh oh, vous êtes effectivement bien plus jeune que moi. J'ai passé le 15e été.

- Déjà ? Jamais je ne pourrais vous rattraper, vous les hommes grandissez trop vite.

Nohan éclata de rire, appréciant converser avec cette fillette abandonnée des siens, elle semblait pourtant avoir un fort caractère qui ne demandait qu'à s'exprimer. Durant l'après-midi, ils s'amusèrent, mangèrent et jouèrent dans les collines et la forêt qu'affectionnait beaucoup la fillette, mais quand le soleil déclina, il était l'heure pour elle de rentrer. Nohan se proposa de la reconduire et elle se laissa faire, appréciant la compagnie d'un des Princes de Karsan.

- Vous pouvez me laisser là, dit-elle alors qu'ils avaient pénétré les jardins, endroit sacré pour elle qui était tout proche de sa chambre.

- Kaerthage, vous êtes sûr ?

- Mais oui, regardez, une de mes sœurs m'a laissé la fenêtre ouverte, lui dit-elle en montrant une des fenêtre à demi ouverte où était accroché un ruban rose, flottant au grès du vent frais et calme du soir.

- Si vous le dites, je me plie à l'ordre.

Il descendit et l'aida à quitter le dos du cheval, dont elle adressa une caresse en guise de remerciement avant que Nohan ne l'aide à grimper pour la voir saine et sauve dans sa chambre.

- Viendrez-vous me voir demain ? demanda t-elle timidement.

- Je suis ici en tant que visiteur, je n'ai donc aucun rendez-vous sur mon agenda. dit-il, la voyant sourire. Quand ?

- Hmm... nous avons classes le matin, alors pourquoi pas en début d'après-midi après le déjeuner ?

- Où ?

- Ici ou dans la forêt ?

- Je ne suis pas rassuré de vous savoir seule en extérieur, gronda t-il.

- Et bien cher Prince bougon, à vous de décider du lieu de notre rendez-vous.

- Ici, à l'entrée des jardins. Je vous y attendrez.

- C'est entendu. Où séjournez-vous ?

- Avec la délégation de Kaolan, en bordure du centre ville.

- Si loin ?! Père sait-il qui vous êtes ?

- Je ne le sais pas. Mais pour être honnête, ce n'est pas moi qui vient le voir, mon père ainsi que mon frère aîné sont là.

- Oh...

Du bruit se fit entendre dans le couloir devant la porte de la chambre.

- Je devrais y aller, prenez soin de vous petite Princesse.

- Rentrez bien Prince bougon, dit-elle toute sourire.

- Oh vous...

- Vite, allez-y avant qu'elles ne vous voit.

- Bien, bien. Dans ce cas, à demain.

Un ultime adieu et Nohan repartie sur son cheval, tel un Monarque en pleine conquête.

Cette nuit là, Kaerthage s'endormit avec le sourire, profitant de sa solitude pour se repasser en mémoire son après-midi passée avec le Prince de Kaolan.

- Nohan...

Mais quelque chose l'intrigua : pourquoi Nohan lui paraissait si furieux à chaque fois qu'elle posait son regard sur lui ? Ne l'appréciait-il pas ?

Karsan... Ce nom avait été évoqué par leur maître de classe, mais qu'est-ce qu'il savait sur la famille royal de Kaolan ?

Elle devait l'interroger dès le lendemain. Plus elle en saurait plus elle pourrait répondre à cette question étrange qui la taraudait.

Mais pour l'heure, elle devait dormir, demain serai une journée bien remplie.

***

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Samarra Okayo ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0