Chapitre 3 : Distinction

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Naouel ne bougeait plus, elle avait peur qu’il disparaisse s’il sentait sa présence. C’était bête de penser ça puisqu’il l’avait forcément senti en venant ici. Elle commença un demi-tour vers les buissons avec lenteur, puis s’engagea derrière le taillis comme la veille. Il était bien là. Elle voyait mal, il faisait noir et sombre mais il était là. Une fourrure noire et brillante luisait à la fine lumière du spot qui filtrait à travers les feuilles. Il la regardait intensément, la dévisageait. Il semblait l’analyser. Cette fois-ci, Naouel ne dit rien mais s’accroupit pour prolonger l’instant. Elle observa le museau, les oreilles, les yeux. Quelque chose attira son attention. Il y avait comme une petite cicatrice, juste au-dessus de son œil gauche, où plus aucun poil ne poussait. Elle approcha son visage inconsciemment pour mieux observer mais le loup rebiffa et tourna les talons pour repartir dans l’opacité de la nuit.

Naouel n’avait cessé de réfléchir toute la nuit et avait à peine trouver le sommeil. Elle se sentait un peu bête d’avoir baissé sa garde mais elle était persuadée qu’il reviendrait le soir-même. Elle avait l’étrange impression qu’il reviendrait toujours. En se préparant, la jeune fille réfléchissait à la cicatrice qu’elle avait vu sur la tête du loup, se demandant s’il s’était battu ou s’il avait été blessé. Beaucoup de questions restaient sans réponse à propos de l’animal. Elle continua d’échanger une série de question réponse avec elle-même sans parvenir à répondre à la moitié des questions qu’elle se posait. Elle était presque absente pendant les cours tant elle n’arrivait pas à se concentrer, se demandant si elle faisait bien de se préoccuper autant de cette histoire de loup. En sortant d’une heure d’espagnol, Naouel traversait distraitement la cours, son sac proche d’elle, ses lunettes qu’elles ne mettaient que pour les cours encore sur le nez. Une main sur son bras la fit sortir de sa rêverie. Elle leva la tête et nota la tête de Soan, le garçon de la veille avec toujours ses cheveux bouclés noirs indisciplinés sur la tête.

-Naouel ? Salut.

-Soan ?

Elle se demandait bien pourquoi il revenait lui parler, il semblait qu’elle n’avait pas laissé une première bonne impression mais bon.

-Tu as besoin de quelque chose ? demanda-t-elle.

-Oh non, je venais juste te saluer, répondit le garçon en se frottant le haut du sourcil.

Naouel se crispa une seconde avant de parvenir à se détendre. Ce n’était qu’une coïncidence, ce n’était pas possible autrement. Le sourcil du jeune homme était marqué d’une cicatrice qui marquait son sourcil en deux parties.

-Comment tu t’es fait ça ? demanda Naouel en montrant la cicatrice sur le sourcil du garçon.

Soudain, Soan prit un comportement étrange, baragouinant quelques mots incompréhensibles avant de s’éloigner à pas rapides. La jeune fille n’osa pas le retenir, ils ne se connaissaient que depuis la veille et elle aurait été mal à l’aise de lui demander de rester même si ses questions lui brulaient les lèvres.

Tandis qu’elle marchait avec Elise et Rose vers l’amphithéâtre, Naouel avait envie de partager tout ce qui la taraudait avec ses amies mais ne put s’y résoudre. Elle voulait se prouver à elle-même qu’elle n’avait besoin d’aucune aide pour délier se mystère même si elle voulait partager ses aventures avec les deux filles. Dans ses livres, le protagoniste avait toujours un acolyte à qui tout raconter mais Naouel n’était pas dans un de ses livres. Une fois arrivée à l’accueil, Blandine informa le trio que quelqu’un était déjà dans l’amphithéâtre. Aussitôt, Naouel comprit de qui il s’agissait et cette fois-ci elle n’allait pas le laisser filer. Les filles débarquèrent dans l’auditorium et entendirent le piano droit qui sonnait étonnamment juste vue qu’il était gravement désaccordé. Se guidant grâce au son de l’instrument mais aussi parce qu’elles connaissaient l’endroit, les filles poussèrent les rideaux et observèrent le pianiste. Il s’agissait bien de Soan.

-On se croise souvent nous deux non ? osa Naouel sans que ni Rose ni Elise ne comprenne le réelle signification de cette question à double sens.

-C’est vrai, désolé d’être parti comme ça tout à l’heure.

Le regard des deux comparses sur leur amie se faisant de plus en plus intense Naouel essaya d’expliquer un peu la situation :

-On s’est rencontrés hier. J’étais ici et il est venu pour le piano donc on a… discuté, dit Naouel bien qu’elle ne considérât pas l’entrevue d’hier comme une conversation. Et on s’est recroisés ce matin. Je ne crois pas qu’on se soit vu avant, si ?

Le cerveau de la belle brune fusait dans tous les sens. Comment pouvait-elle accuser indirectement Soan d’être le loup qui la surveille depuis quelques jours ? C’était totalement absurde. Elle tenta de se ressaisir alors que ses yeux fixaient la cicatrice, elle était tellement ressemblante. N’importe qui d’autre aurait été troublé. Enfin, elle essayait de s’en convaincre. Ce qui acheva Naouel, fut que Soan proposa aux filles de rester jouer du piano avec lui et que toutes deux avaient accepté. Elle ne savait pas comment se comporter avec lui et pour cause, des associations et liens étranges se bousculaient dans sa tête. Elle l’observât toute l’heure sans rien noter de canin dans son comportement et elle se trouvât encore plus ridicule après ça. Elle allait se détendre. Elle décida que le soir même, elle n’irait pas dehors rejoindre le loup.

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