Pas sa faute

Il y a un monstre sous mon lit. Je vous vois déjà sourire mais je suis très sérieux. Un monstre affreux.

Je veux dire, il n’est pas particulièrement effrayant physiquement. Il ressemble à monsieur tout le monde. En apparence en tout cas. Mais il fait des choses horribles. C’est pour ça que je vous disais qu’il est affreux.

Ce n’est pas vraiment de sa faute. Il a des pulsions, il ne peut pas les contrôler. Il a déjà essayé, je le sais. Mais c’est en lui. Tout le monde dit qu’un monstre reste un monstre. Alors je n’en ai jamais parlé. Je suis le seul à savoir ce qu’il fait, il me raconte tout. Je pense que ça doit le soulager, le libérer d’un poids. Et oui, ce n’est pas parce qu’il commet des actes atroces que ça fait de lui quelqu’un de foncièrement mauvais. Il a des bons côtés. En dehors de ses pulsions c’est même quelqu’un de très attachant, doux, discret. Et puis il a subi des horreurs lui aussi, il y a longtemps mais ces choses-là ça vous marquent pour la vie. Ça ne l’excuse pas mais ça permet de mieux le comprendre. Et puis je suis qui pour le juger ?

Cette nuit encore le monstre est sorti, il voulait juste se balader. Ça faisait des mois qu’il n’était pas sorti le soir. Il adorait sentir le vent, et la nuit c’était si calme, ça lui permettait de se vider la tête. Il n’aimait pas trop la journée, les rues bondées de monde, tous ces gens qui vous dévisagent ou au contraire ceux qui passent à côté mais vous ignorent. Comme si vous n’existiez pas. Personne n’avait jamais fait attention à lui, même pas sa propre mère. Souvent il faisait le tour du parc, comme ce soir.

Alors qu’il allait rentrer, un souffle frais lui a chatouillé les narines, il a fermé les yeux et inspiré. La vanille, ça sentait la vanille, un doux parfum sucré. Et juste après il a croisé une femme dans ce parc. Cette odeur ne pouvait appartenir qu’à une femme de toute façon.

Elle était très jolie et en plus elle lui a souri. Il adorait les femmes, il les aimait vraiment.  On ne peut pas dire que c’était réciproque mais elle, elle a souri. Intrigué, il s’est retourné et l’a suivie. Elle avait de magnifiques cheveux longs, des courbes somptueuses, cette odeur si envoûtante. Il bouillonnait, il tremblait. Il a accéléré le pas, et l’a attrapée par le bras. D’abord étonnée, puis effrayée, elle ne souriait plus comme l’instant d’avant.

Pourquoi les femmes avaient elles la même réaction quand il les touchait ? Il la serrait toujours et de plus en plus fort, mais plus seulement par le bras, il la tenait contre lui, la tête dans son cou il se délectait de son parfum. Et comme elle allait crier il a mis sa main sur la jolie bouche de la femme. Il ne pouvait plus la lâcher, plus rien en lui ne pouvait le raisonner. L’envie montait en lui et il plaquait déjà son bas ventre contre elle.

Il l’a fait tomber au sol, et lui montré son couteau comme pour la dissuader de crier. Elle avait l’air tellement apeurée mais il était bien obligé de la convaincre de se taire avant qu’elle ne lui attire des ennuis.

Il a passé sa main solide et chaude sur ses cuisses, puis sous sa jupe. Il caressait maladroitement ses sous-vêtements en dentelle, il sentait la chaleur de son entre-jambe. Et dans une brutale impatience il a arraché ses sous-vêtements et a pénétré au cœur de sa féminité, difficilement au début, puis avec de plus en plus d’aisance. Il allait et venait, plus rien autour n’existait, ça lui procurait tellement de sensations, il ne voyait même plus la jolie femme, il se contentait d’entrer en elle. C’était la seule façon de calmer ses pulsions. Puis dans un dernier souffle chaud il laissa un peu de lui s’échapper en elle.

Et quelques secondes après cet apaisement il la vit à nouveau, en larmes, complètement démunie face à lui. Il savait qu’elle parlerait, elles le font toutes,il devait l’en empêcher. Il savait bien comment étaient les femmes, on faisait tout pour elles mais ce n’était jamais assez.  Il décida donc de serrer son cou très fort. Longtemps. Durant ces longues secondes il la regardait, elle avait ce regard à la fois triste et plein de pitié, toutes les mêmes manipulatrices. Il ne pouvait pas lâcher, pas avant qu’elle ne s’endorme. Ce qu’elle fit peu après.

Elle avait l’air si calme, plus aucun son, aucun souffle ne sortait de cette bouche qu’il embrassa une dernière fois. Il était temps de faire quelque chose de ce corps. A ces yeux ce n’était plus une femme mais un corps sans vie. Un corps dans lequel il s’était glissé de force mais il était sûr qu’elle avait aimé ce moment. Quand leurs corps ne faisaient qu’un.

Il devait la cacher, comme un enfant cache ses bêtises pour ne pas se faire réprimander. Alors il a creusé, il ne sait pas combien de temps mais il a beaucoup creusé. Il a posé son corps au fond du trou, délicatement. Il a même déposé sur elle une rose cueillie dans ce même parc. Il était compliqué, il aimait autant les femmes qu’il les détestait.

Quand le jour commençait à se lever, il avait fini et était rentré. C’est à ce moment-là que je l’ai vu et qu’il m’a raconté cette nuit. Toujours au même endroit. A chaque fois que je le vois c’est quand je croise mon reflet. Mes mains étaient pleines de terre, mes vêtements aussi. Je suis le monstre sous le lit, le tueur, le violeur, l'horrible personne même si vous voulez. Je ne sors que la nuit.

La journée je suis Bertrand, un homme solitaire et ignoré. Je suis sûr que vous avez sur moi ce même regard méprisant et désolé qu’avaient sur moi ma mère et toutes ces femmes que j’ai croisé. Je sais que je vous fais pitié, que je vous dégoûte ou même que je vous fais peur mais c’est à cause de vous que je suis ce monstre. Si quelqu'un une fois dans ma vie m'avait vraiment aimé, je n'aurai peut-être pas ces pulsions qui me poussent à agir. Si on m'avait donné de l'amour je ne l'aurai peut-être pas arraché de force.

Tous droits réservés
1 chapitre de 4 minutes
Commencer la lecture

Table des matières

En réponse au défi

Un monstre sous le lit

Lancé par Myfanwi
Le principe est très simple.

Depuis toujours, un monstre loge sous votre lit, vous en êtes convaincu. A partir de là, l'écriture est libre, la seule contrainte étant que votre texte doit avoir pour thème un monstre sous votre lit.

Quelques pistes :
- Votre relation avec le monstre
- La description du monstre
- Une aventure quelconque avec ce monstre
- Le monstre sort de sous le lit
- ...

Bonne chance !

Commentaires & Discussions

Pas sa fauteChapitre0 message

Des milliers d'œuvres vous attendent.

Sur l'Atelier des auteurs, dénichez des pépites littéraires et aidez leurs auteurs à les améliorer grâce à vos commentaires.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0