Cette nuit là, les enfants étaient enfouis sous les couvertures, essayant de ne pas entendre la complainte des vagues, qui venaient se fracasser contre les falaises.

Malheureusement, Ils n'avaient pas pu se réfugier dans l'église, comme cela avait été prévu. La foudre était tombée et avait mis le feu à la vieille bâtisse. L'incendie avait toutefois été très vite maîtrisé mais il était devenu impossible d'y rester. Aussi les habitants n'eurent d'autre choix que de rentrer et se calfeutrer dans leurs maisons.

Il faisait nuit noire au dehors et les faibles bougies éclairaient à peine l'intérieur.

C'est alors qu'une musique, douce mélodie, se fit entendre malgré le bruit au dehors. Elle provenait de partout à la fois...mais les adultes n'avaient pas l'air de l'entendre. Ils vaquaient à leur occupation, en l'occurrence essayer que le feu ne s'éteigne pas.

Surpris, Joshua prit sa sœur par la main et ouvrit les volets qui vinrent se fracasser et se briser. Ils sortirent par la fenêtre, sans un regard en arrière et rejoignirent les autres enfants, qui devaient lutter contre le vent pour avancer.

Ils étaient en tous les 30 enfants du village, filles et garçons confondus.

La jeune femme les rejoignit et les emmena sur la plage où les attendait le bateau maudit. Il était immense, orné de grandes voiles noires et le drapeau arborait un signe étrange, un tourbillon de lumière.

L'ombre en descendit mais les enfants ne reculèrent pas. Ils savaient au fond d'eux-mêmes qu'il ne leur ferait pas de mal. Ils n'étaient que des enfants, innocents. La malédiction n'était pas sur eux, elle remontait à des générations en arrière, à cause de la faute impardonnable perpétrée il y a maintenant de nombreux siècles. Leurs parents devaient encore et encore revivre le même drame, à eux de comprendre et de faire en sorte que la malédiction soit levée.

La jeune femme observa le vieil homme, au visage hideux. Elle aussi était condamnée à vivre éternellement sur ce rivage, sans jamais pouvoir sortir de ce village maudit. Mais elle le méritait, autant que les habitants.

L'homme fit monter les enfants sur le bateau. Elle ne pouvait s'empêcher de les envier. Elle aussi aurait tant voulu partir, s'échapper de cet enfer, de cet éternel recommencement. Avant de larguer les amarres, l'homme descendit et lui caressa tendrement le visage, s’empreignant de ses yeux, de son odeur.

- A bientôt ma douce. Nous nous reverrons dans cent ans.

- Combien de temps encore cela va-t-il durer? se lamenta-t-elle.

- Le temps que vous leviez la malédiction, c'est à vous de le faire, vous seuls. Tu le sais mon ange, vous devez vous repentir pour les horribles méfaits dont vous vous êtes rendus responsables.

- Comment ? J'ai demandé pardon tant de fois sans jamais être entendue.

- C'est à vous de trouver, la solution est au fond de ton cœur. Tout dépend de toi à présent que le cauchemar ne recommence. Il est l'heure, maintenant, le jour va se lever. Je dois partir.