7. Les craintes de Madison
7. Les craintes de Madison
Lors d’un weekend à Tournai, Clémence fit la connaissance de la mère de Madison, Valérie, sœur cadette de Mathilde.
Arrivés tard le vendredi soir, Clémence et Christophe s’étaient faits discrets et étaient montés directement à l’étage.
Le samedi matin, Christophe se réveilla en entendant des rires qui venaient du rez-de-chaussée. Il fronça les sourcils et souffla avant de se rapprocher de Clémence dans le lit.
Alors qu’il cherchait sa position contre elle, il l’entendit lui demander,
— Pourquoi tu souffles ?
Elle se retourna en s’étendant et lui fit face. Elle lui sourit et lui demanda à nouveau,
— Dis-moi, allez… C’était quoi ce soupir ?
Il sourit, ferma les yeux puis lui dit,
— C’est ma tante Valérie… La mère de Madison.
— Et quoi ? Tu ne l’apprécies pas ?
Comme il ne répondait pas de suite, elle lui dit en rigolant,
— C’est une emmerdeuse, ou un truc dans le style ?
— Pff…
Il rigola et fit une petite moue avec la bouche.
— Bah… En fait, oui, je dirais qu’elle est un peu chiante.
— Mais encore…
— Oh… Elle monopolise souvent la parole et aime être au centre de toutes les attentions.
— C’est elle qu’on entend rire aux éclats ?
— Oui !!
Il haussa les sourcils et roula les yeux, montrant l’exaspération qu’il ressentait. Clémence rigola puis lui dit,
— Eh… On n’est pas obligé de la croiser non plus ; on peut attendre qu’elle s’en aille pour montrer le bout de notre nez à tes parents.
— Oui… On peut faire les morts… Je suis preneur personnellement !
Ils pouffèrent de rire puis Clémence lui dit,
— Prends-moi dans tes bras, que je me rendorme contre toi…
— Ou pas…
— Mmh petit coquin…
Il commença à la chatouiller, ce qui la réveilla complètement.
Alors qu’ils se caressaient, Clémence capta que Christophe avait reçu un message sur son portable, elle voulut le lui dire, mais il la devança en lui disant,
— Je sais, j’ai entendu… Mais je n’ai pas envie de regarder, là, je n’ai envie que de toi.
Pour seule réponse, elle l’embrassa puis prit le dessus afin de lui embrasser le torse puis de se reposer sur lui.
Le portable de Christophe vibra encore plusieurs fois… Il devait bien avoir reçu cinq messages.
— Mais allez ! Elle ne peut pas nous ficher la paix ?
— Tu penses qu’il s’agit de ta mère ?
— J’en suis sûr, mais c’est le nombre de messages qui m’étonne en fait.
Clémence se redressa, récupéra le portable sur la table de nuit et le lui tendit après avoir regardé l’écran.
— Non, c’est Madison.
— Ah bon, qu’est-ce qu’elle veut, ma cousine chérie ?
Il prit le temps de lire les messages reçus à haute voix pour que Clémence en connaisse le contenu.
Salut cousin, je peux monter ? C’est un peu naze ici…
STP cousin !!
Tu dors ou quoi ?
Me lâche pas cousin ! Allez, laisse-moi monter !
Purée cousin, je dois absolument vous parler, ma mère déconne encore ; elle veut me larguer ici, chez toi et partir vivre avec son mec en France ! Please ! Laisse-moi monter !!
Clémence demanda,
— Ça veut dire quoi, la « larguer ici » ?
— Euh, je ne sais pas, mais… Ça te dérange si elle monte ? J’aimerais comprendre ce qu’il se passe.
— Pas de soucis.
— Et je préfère qu’elle monte que de descendre… Je n’ai vraiment pas envie de croiser sa mère.
— Ok, je vais juste me mettre quelque chose sur le dos.
— Oui, moi aussi, et avant de lui répondre, parce que, vu le ton de ses messages, elle arrivera dans la demi-seconde.
Clémence se dirigea vers le coin cuisine et demanda à Christophe,
— Je te prépare un thé, un café ?
Il sourit, levant la tête de l’écran de son portable, et lui répondit,
— Oui, un thé au lait, merci… Attention, elle va arriver.
— Mmh… On déjeunera en l’écoutant, je prépare les petits pains et de la pâte à tartiner sur la table du salon.
Il hocha la tête pour montrer son accord. Entre-temps, Madison était arrivée et leur dit, en s’approchant d’eux,
— Je suis désolée de débouler comme ça, mais… J’en ai marre Christophe !
Madison se crispa complètement et agita ses mains devant elle. Elle semblait hors d’elle.
— Bonjour Madison… Assieds-toi et respire, puis explique.
— Bonjour Madison, tu veux quelque chose à boire ? Demanda Clémence.
— Oh, excusez-moi, oui, bonjour à tous les deux… Non, non Clémence, je ne veux rien, merci.
— Alors, c’est quoi le problème Madison ? Demanda Christophe
Madison souffla puis leur expliqua que sa mère était occupée à discuter de l’éventualité de « la laisser » aux bons soins de son oncle et sa tante, en vue de s’expatrier en France.
Elle fondit en larmes lorsqu’elle exposa les derniers plans de sa mère ; elle voulait vendre la maison qu’elle possédait et dans laquelle Madison avait grandi et vivait, dans le but d’acheter une maison avec Robert, son compagnon actuel.
— T’imagines, elle me vire de chez moi Christophe !
— Calme-toi Madison, elle en est où dans ses projets ? Est-ce qu’il y a des choses faites, concrètement ?
— Mais oui, la maison est en vente !
Christophe fut tellement ébahi par ce qu’il venait d’entendre qu’il ne sut rien dire, Clémence intervint,
— Mais, que propose-t-elle pour toi alors ?
— Elle propose que je vive ici…
— Hein !?
Christophe faillit s’étrangler avec son thé au lait en entendant cela.
— Et quoi ? Mes parents te feront dormir où ? Dans le placard ou sous l’escalier, comme Harry Potter ?!
Un peu gênée, Madison leur répondit,
— Ben, tu connais ma mère… Elle a dit à tes parents que comme tu n’étais plus très souvent ici, il y avait surement de la place pour moi.
Elle rajouta vivement en voyant la tête de Christophe changer et s’allonger d’étonnement.
— Je lui ai dit que ça n’allait pas, qu’elle n’avait pas à se mêler de ta vie et de réquisitionner ton appartement Christophe !
Christophe respira bruyamment puis regarda Clémence, il était consterné. Il ferma les yeux durant de longues secondes puis les rouvrit et dit à Clémence,
— Tu vois le style…
Il reprit une gorgée de son thé puis, posément, dit à Madison,
— Écoute, je suis sûr qu’on trouvera une solution. De toute façon, dans un mois, l’année académique reprend, tu retourneras dans ton studio à Liège, c’est pour les weekends que cela risque de coincer, non ?
— Oui… Parce que toi, c’est le weekend que tu viens avec Clémence… Et ça, maman, elle s’en fout, elle ne voit que sa nouvelle maison en France !
Elle se tut puis repris,
— Je suis vraiment désolée…
Elle regardait le sol devant elle et semblait réellement mal à l’aise.
Clémence lui demanda,
— Mais dis-moi, ta mère, elle a tendance à aller au bout des choses qu’elle entreprend ?
— Comment ? Demanda Madison. Elle ne comprenait pas le sens de la question.
— Tu penses qu’il n’y a pas de possibilité de retour en arrière ou bien une fois la maison vendue, elle partira et te laissera.
Madison soupira,
— Hélas oui, Clémence, tu ne connais pas encore ma mère…
Christophe intervint,
— Madison a déjà vécu ici plusieurs années, tu sais, j’ai été son grand frère de ses sept à dix ans.
— Ouaips et c’était chouette !
Madison souriait, ses yeux pétillaient, Clémence se dit qu’elle devait avoir engrangé de beaux souvenirs à cette période-là.
— Puis t’es parti, et l’année d’après, avant que tu ne reviennes, maman était de retour et m’a reprise chez elle.
Christophe se fit songeur et dit, plus bas,
— Oui, c’était une belle période…
Clémence l’observa, en faisant quelques calculs, et compris qu’il devait s’agir de la période juste avant sa mise en ménage avec Sophie. Se souvenir de cette période devait le renvoyer à ça, aussi.
Clémence se rassit à ses côtés et lui proposa de trinquer avec leurs tasses de thé en disant,
— Eh bien, soyons créatif, comment allons-nous faire pour aider Madison.
Madison la regarda, étonnée et pleine d’espoir. Christophe réagit et sourit en disant à Clémence,
— Oui, étant donné que ma chère tante Valérie nous mettra, comme à son habitude, devant le fait accompli, autant y réfléchir dès maintenant !
Puis, se tournant vers Madison, il lui proposa,
— C’est vrai qu’on pourrait aménager l’espace sous l’escalier…
La tête de Madison s’allongea… Ce n’était visiblement pas ce à quoi elle s’attendait. Elle lui dit, dépitée,
— C’est pas drôle cousin…
— Mais, qu’en ont dit les parents de Christophe, Madison, ils sont d’accord ?
— Bah… Comme l’a dit Christophe, elle a l’art de mettre les gens devant le fait accompli. Ils n’ont rien accepté, mais dans la tête de ma mère, c’est déjà réglé… Je suis même étonnée qu’elle ne m’ait pas demandé de prendre ma valise dès ce matin.
— Ah… Elle est si tranchée que ça ?
Elle vit les deux hocher la tête positivement, l’un haussant les sourcils, l’autre soufflant tout l’air qu’elle avait dans ses poumons.
— Ah oui… D’accord.
Clémence se gratta la tête puis dit,
— Il y a bien la petite chambre d’ami…
Christophe réagit,
— Qui est devenu notre dressing Clémence…
— Oui et puis je n’ai pas envie de tomber sur vous dans des positions compromettantes ! Lâcha Madison qui fut prise d’un fou rire nerveux.
Christophe et Clémence se regardèrent et éclatèrent de rire aussi.
— De fait, moi non plus je n’ai pas envie que tu tombes sur nous… Dit Clémence.
Un silence suivit les rires, Clémence reprit,
— Mais quoi alors ? On va la caser où Madison ?
Cette dernière souffla.
— C’est bien ça le souci, je l’ai dit à ma mère, mais pour elle, il n’y a pas de problème, elle y avait pensé, à votre dressing, c’est là qu’était ma chambre, quand j’étais petite.
Christophe se grattait la mâchoire, Madison regardait ses mains, jetant des regards anxieux vers son cousin et son amie.
— Ils ont dit quoi mes parents ?
— Ni oui ni non… Mais tu les connais, ils me recueilleront si elle me lâche, j’en suis sûr. Ils l’ont déjà fait. Le hic, c’est que je ne sais vraiment pas où je pourrais dormir ici, maintenant que tu es en couple.
— Moi, je te dis… L’espace en dessous de l’escalier…
Lui et Madison éclatèrent de rire puis il expliqua à Clémence ;
— Madison est une fervente fan d’Harry Potter, c’est ça que je la taquine.
— Je vois… Mais dit, Christophe, tes parents n’utilisent pas énormément le bureau d’en bas, non ?
Il la regarda en plissant les yeux.
— C’est vrai ça… Je leur en parlerais tiens !
— La pièce avec toutes les planches et les affaires de couture de tante Mathilde ?
— Oui, il faudrait l’aménager, mais ça pourrait faire l’affaire, non ? Dit Christophe.
— Bah, je sais pas, ça a l’air petit… Dit Madison.
— C’est encombré, c’est pour cela que la pièce te semble petite, dit Clémence.
Les trois discutaient de cette possibilité lorsqu’ils entendirent une femme hurler au bas de l’escalier ;
— Christophe, est-ce que ma fille est chez toi ? Tu ne viendrais pas dire bonjour à ta tante, mon neveu chéri ?
Clémence vit Christophe gonfler ses joues puis souffler bruyamment. Il se leva et se dirigea vers son palier pour pouvoir répondre sans devoir crier.
— Oui tante Valérie, Madison est bien chez moi. Je termine de déjeuner avec ma compagne et nous passons dire bonjour.
— Aaah je vais enfin la rencontrer alors ! Mangez vite, on vous attend dans le salon. Madison, tu ne redescends pas ? Hurla-t-elle à nouveau.
— Non, répondit Christophe, elle descendra avec nous.
— D’accord !!
Christophe traina les pieds en les rejoignant puis s’affala dans le divan en lâchant,
— Purée, ça va être gai en bas…
Madison pouffa, Clémence les interrogea tous les deux du regard et leur demanda,
— Euh… On ne peut pas trouver une parade ? Je ne sais pas moi, on n’aurait pas des courses à faire Christophe ?
Il la regarda en souriant, mais sans lui répondre, elle poursuivit,
— Dis, cela m’effraie de te voir aussi peu motivé… Je commence à te connaître, je ne t’ai jamais vu aussi peu réceptif à quelqu’un.
Il soupira et lui caressa la main,
— C’est parce qu’elle va prendre toute la place lorsque nous serons en bas… Et qu’elle va te détailler et plus que probablement se comparer à toi. Elle va nous saouler quoi. Désolé pour ta mère Madison…
— T’inquiète, je la connais…
Ils finirent par descendre, tous les trois, Madison en premier, suivie par Christophe et enfin Clémence.
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