12. Les secrets de Madison

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12.     Les secrets de Madison

 

Un soir que Madison était restée à Bruxelles, dans l’appartement de Clémence, après une journée shopping pour trouver les tentures qu’elle voulait, Madison s’ouvrit à Clémence.

— Tu sais, Clémence, je t’envie…

— Par rapport à quoi ?

— Tu sais y faire avec les hommes… Moi, je suis nulle à ces trucs-là, je me fais toujours avoir.

— C'est-à-dire Madison ?

— Bah, je tombe toujours sur des cons, mais je m’en rends compte qu’après, quand c’est trop tard…

Elle laissa sa parole en suspens, puis reprit,

— Et j’ai trop peur que ça recommence.

— Tu as quelqu’un en vue ?

Madison la regarda sourit, mais rougit aussi, puis fini par lui souffler,

— Oui… J’ai repéré quelqu’un… Mais ça n’ira pas, je ne suis pas une fille pour lui, c’est quelqu’un de bien.

— Et toi ? Tu n’es pas quelqu’un de bien ?!

Madison haussa les épaules puis les laissa retomber et finit par dire,

— Bah, je ne sais pas… Je ne sais pas comment faire Clémence, j’ai trop donné avec mon ex, j’ai peur de trop donner à nouveau, j’ai peur de pas assez donner… Je ne sais pas quoi donner non plus… Je ne sais pas Clémence.

Voyant les sourcils froncés de Clémence, Madison lui demanda,

— Quoi ?

— Mais… En fait, je ne comprends pas trop ce que tu dis Madison, c’est quoi cette histoire de trop ou pas assez donner ? Tu parles de donner quoi ? J’ai du mal à comprendre les notions que tu utilises

Un peu gênée, Madison tenta de lui expliquer,

— Eh bien, me donner « moi », tu vois ?

— Euh… Te donner « toi », sexuellement, tu veux dire ?

Visiblement soulagée, Madison répondit,

— Oui… J’ai du mal à savoir la limite à ne pas dépasser pour ne pas être considérée comme une pute.

Surprise, Clémence répéta,

— « pour ne pas être considérée comme une pute »… Mais… Tu parles de qui là, Madison, tu t’es fait traiter de pute par un partenaire ?

Étonnée, Madison lui répondit, un peu timidement,

— Ben, oui… Christophe ne te l’a pas raconté ?

— Raconté quoi Madison ? Je n’ai pas souvenir qu’il m’ait un jour parlé de toi, traitée de pute.

— Ah… Je pensais que comme vous discutiez de tout lui et toi…

Elle voyant Madison regarder le sol et partir dans ses souvenirs.

— Parler de quoi Madison ? De tes amours ? Il m’a juste dit que tu avais eu une rupture difficile avec ton premier petit ami et que tu étais très jeune et qu’il n’avait pas été un jeune homme correct, mais sans plus.

Comme elle voyait des larmes remplir les yeux de Madison, elle lui dit, en la prenant dans ses bras,

— Eh, qu’est-ce qu’il se passe ? Tu as envie d’en parler ?

Madison hocha positivement la tête, mais pleura un petit moment sur l’épaule de Clémence avant de pouvoir en parler.

— En fait, j’ai eu mes premières relations très jeunes, à quinze ans.

Elle souffla puis reprit,

— Comme maman n’était jamais là, j’ai dû me débrouiller toute seule de ce côté-là. Quand j’ai eu quinze ans, j’ai rencontré Nicolas. Il avait déjà dix-sept ans et il était beau comme un dieu ! Toutes les filles de la classe rêvaient de sortir avec lui, donc, quand il a commencé à me draguer, je ne te dis pas comme j’étais aux anges !

Clémence sourit et lui dit,

— J’imagine…

Madison continua,

— Pour les copines, j’apparaissais enfin comme « quelqu’un d’intéressant » et soudain, j’avais plein de monde autour de moi. À quinze ans, quand tu viens de débarquer dans une école, ça compte d’avoir des copains !

Clémence l’invita à continuer son récit.

— Et puis, assez rapidement, il a commencé à vouloir qu’on aille plus loin que de s’embrasser. Moi, ça me contentait, je ne voulais pas aller plus loin, pas aussi vite.

Elle fit une pause, regarda furtivement Clémence puis reprit,

— Il m’a dit que si je ne lui faisais pas de fellation, c’est que j’étais trop conne et qu’il me larguerait en disant à tout le monde que je n’étais pas capable de lui donner ce plaisir-là. J’ai eu peur qu’il ne me largue et je l’ai fait, c’était dégueu, mais je me forçais à le faire comme il le voulait… Pour qu’il reste avec moi.

Madison écrasa une larme qui remontait puis poursuivit,

— Après ça, il me disait toujours « t’es une bonne fille toi ! » En me pinçant les joues… Moi, je me sentais salie, il s’en foutait si j’avais des hauts-le cœur quand il poussait au fond de ma gorge… Et en plus, il éjaculait soit dans ma bouche, soit sur mon visage, en me tirant la tête en arrière en m’attrapant par les cheveux quand ça lui venait. C’était dégueu… Ça  fait mal dans les yeux.

Clémence réagit, estomaquée,

— Mais, il ne pouvait pas entendre ça, que tu n’aimais pas la façon dont il voulait que ça se passe ?

Toujours le regard baissé, Madison haussa les épaules,

— C’était comme ça… À d’autres moments, il était très chouette, très tendre avec moi.

Elle soupira puis dégluti et reprit,

— C’est même comme ça qu’on a fini par le faire finalement, durant une petite séance de caresses bien agréables et bien appuyées comme on faisait déjà et que j’aimais bien. Un jour, comme il me tripotait au niveau de la vulve, il s’est mis à m’embrasser et à me susurrer des mots doux. Il était entre mes jambes, j’étais collée à lui, j’étais bien. Puis à un moment, en une fraction de seconde, il s’est redressé, a placé son sexe devant le mien, il a tenu mes hanches et il s’est enfoncé en moi.

Madison ravala un sanglot puis reprit

— À ce moment-là, tout se bousculait dans ma tête, je ne voulais pas, je lui avais dit que je voulais attendre d’avoir seize ans, l’âge légal, pour ma première relation sexuelle… Et là, ça se passait… Trop vite.

Elle épongea les larmes qui coulaient avec un mouchoir qu’elle sortit de sa poche et dit,

— Le pire, c’est qu’une fois rentré en moi, il m’a regardé dans les yeux et m’a dit « voilà, comme ça c’est fait, t’es dépucelée ma grande ! » Je n’ai rien su répondre, je sentais des sanglots monter dans ma gorge alors que lui commençait à me pilonner. Il a eu fini très rapidement ; une fois qu’il eut éjaculé en moi, il m’a malaxé les seins et m’a dit « tu vois, c’était pas si dur ! Maintenant, on va pouvoir baiser à l’aise tous les deux ! »  Il ne m’a même pas demandé si j’avais aimé ou si j’avais eu mal… Il s’est couché à côté de moi en souriant, moi, je pleurais, il s’en foutait… J’aurais tant aimé qu’il me prenne dans ses bras à ce moment-là, Clémence ! Je ne voulais pas que ça se passe comme ça ma première fois… Mais c’était trop tard…

Madison ferma les yeux puis précisa encore,

— Un peu après, comme je sanglotais doucement à côté de lui, il s’est retourné et m’a dit, « t’arrête de faire la petite fille, Madison, c’est bon là, t’es dans le monde des grands maintenant, assume ! »

Madison souffla longuement puis reprit, après avoir regardé Clémence qui lui serrait la main amicalement,

— Le lendemain, j’ai été au planning familial avec Christophe, pour la pilule du lendemain… Nicolas n’avait pas mis de préservatif et je ne prenais pas la pilule.

Clémence demanda,

— Et Christophe, tu ne lui as rien dit de ce que tu avais été forcée ?

— Non, je n’ai pas osé Clem ! Je ne voulais pas qu’il me prenne pour une conne.

— Mais…

— Non ! Je devais assumer Clem, je sortais avec Nicolas, ça devait bien finir par arriver, de toute façon…

— Mais Madison, il t’a forcé ! Et il était parfaitement conscient de ce qu’il te faisait !

— Je sais…

Son regard fila dans ses souvenirs, elle éclata en sanglots puis entre deux crises de larmes, elle dit,

— Il n’y a pas eu que ça Clem…

En colère, intérieurement, contre ce Nicolas, Clémence prit Madison dans ses bras et la berça un bon moment. Une fois un peu calmée,

— Deux mois après ça, j’ai repéré qu’il regardait ailleurs et j’ai eu peur qu’il ne me quitte pour une autre. Du coup, je disais oui à tout ce qu’il me demandait, coté position tout ça, même si je n’aimais pas. Il a même voulu tenter la sodomie, mais finalement, il n’a pas aimé plus que ça donc on n’a pas recommencé très souvent. Heureusement, parce que ça me faisait super mal… Et lui, il me disait « oh, tu dois aimer, pour une fois que tu cries quand je te défonce, on devrait le faire plus souvent »

Madison souffla puis avec un demi-sourire, dit à Clémence,

— C’est après une dernière proposition immonde que je me suis dit que je devais arrêter avec lui, que je préférais ne plus avoir d’amis que de continuer comme ça avec lui.

— Oh, il en a encore rajouté !?

Clémence était estomaquée.

— Oui, il a voulu que je baise avec certains de ses copains !

— Quoi ?!

— Oui… Mais le pire… Enfin, oui, mais…

— Que veux-tu dire Madison ?

— Il avait un « menu » qu’il proposait à ses copains sur base des vidéos qu’il avait faites de nos ébats ; un jour que j’étais chez lui, quand ses parents n’étaient pas là, il ne savait pas que j’étais réveillée… Comme j’entendais des bruits, je me suis rapprochée de son bureau, il était de dos, face à son ordi et via messenger, il envoyait des bouts de vidéo à ses copains…

Elle lui raconta alors la scène qu’elle avait observée ;

Il avait un casque sur les oreilles, il ne l’entendait pas. Elle s’approcha assez près, histoire d’avoir une vue sur ce qui se notait des échanges sur l’écran.

Elle se reconnut sur des vidéos à caractère sexuel dont elle ignorait l’existence ; il l’avait filmée à son insu et à présent, diffusait les vidéos, sans son accord. Elle avait des nausées…

Mais là où elle fut totalement dégoûtée, c’est lorsqu’elle entendit la conversation qu’il avait avec l’un de ses interlocuteurs… Elle n’entendait pas les demandes, mais les réponses données par Nicolas étaient, on ne peut plus claires ;

— …

— Oui, elle fait des gorges profondes, sans problème, comme dans le porno, avec les larmes et tout, elle adore !

— …

— Oh attends, elle n’a que quinze ans, faut pas trop lui en demander ; à trois, non, c’est mieux avec la copine de Geoffrey, tu sais, celle qui a dix-huit ans, elle est ok avec deux ou trois mecs.

— …

— Ouais, c’est ça, Aline !

— …

— Ouais, on a déjà fait l’anal, mais faudrait la travailler, putain qu’elle est serrée, j’ai cru qu’elle allait me couper la bite la dernière fois tellement elle serrait. Par contre, elle gueule comme une vraie salope, j’adore !

— …

— Ouais

— …

— Ouais

— …

— Note, je crois que je vais lui proposer de faire un truc à trois, tu serais intéressé ?

— …

— Ben, oui, t’es le premier à qui je le propose !

— …

— Non, elle n’a encore jamais fait ça

— …

— Au choix, dans le cul ou dans la chatte, tu la prends et je filme.

— …

— D’accord ou pas d’accord, elle la ferme, t’inquiète, j’ai qu’à lui dire que je la largue et elle fait tout ce que je veux ! C’est ça qui est génial avec ce genre de gamine, elles ont tellement peur qu’elles acceptent tout !

— …

— Ouais… Mais Vanessa c’est « pas touche » !

— …

— Non, elle, je l’aime, si elle ne veut pas coucher, je respecte.

— …

— Ben oui je suis frustré, mais Vanessa c’est du sérieux, tu vois, je l’ai présentée à mes parents et tout, tu vois.

— …

— De toute façon, j’ai l’autre conne pour me vider si je suis trop plein hahaha …

 

Madison atterrée, avait eu la présence d’esprit d’enregistrer sur son portable ce qu’elle entendait.

Mue par une force dont elle ne se sentait pas capable, elle resta à observer l’endroit, sur l’ordinateur, où il stockait les vidéos qu’il envoyait à ses copains.

Une fois Nicolas de retour dans le lit que Madison avait réintégré pendant qu’il éteignait son ordinateur, elle fit mine de se réveiller et lui sourit, il lui demanda, assez platement,

— Dis, ce weekend, t’es libre ? Je te présenterais bien à un copain, tu me dis quoi ?

Il lui tripota les seins puis se retourna et s’endormit.

Une fois sure qu’il dormait, elle se leva, alluma l’ordinateur puis, à l’aide d’une clé USB et en copie dans un cloud, elle enregistra toutes les vidéos et récupéra une partie des entretiens écrits de messenger où ce genre de discours et propositions avaient visiblement déjà eu lieu depuis plus d’un mois.

Elle rassembla les quelques petites affaires personnelles qu’elle avait pu ramener chez lui puis s’enfuit sans rien laisser derrière elle, ni se retourner.

Sa mère n’étant pas présente, c’est chez Christophe qu’elle se réfugia, ce dernier, lorsqu’il fut mis au parfum de ce qu’il s’était passé pour sa cousine et des plans prévus par le Nicolas en question, il n’eut qu’une envie : aller lui régler son compte.

Madison l’en dissuada, ils se calmèrent tous les deux puis il l’accompagna pour qu’elle puisse porter plainte.

Hélas, la plainte finit par être classée, une magistrature surchargée, des avocats plus ou moins compétents ou à l’aise avec ce genre d’affaire, « encore une histoire d’ados qui couchent ensemble » « oh, mais ils font tous ça, de nos jours » … Nicolas ne fut pas plus inquiété que cela, au grand désespoir de Madison.

Une remontrance faite par le juge de la jeunesse et quelques heures de travaux d’intérêt public, l’affaire était pliée.

Quelques mois plus tard, le bruit autour de cette affaire l’amena à vouloir changer d’école ; deux clans s’étant formés ; celui qui considérait Madison comme la victime des plans malsains de Nicolas et celui qui estimait qu’elle le voulait bien et qu’elle avait eu ce qu’elle méritait.

La seule chose qu’elle garda de positif fut deux copines de classe qui se révélèrent être de véritables amies, dont Vanessa, la fille dont Nicolas se disait si amoureux.

Elle avait rompu avec lui, publiquement, l’accusant de tout ce qu’il avait fait à Madison et en le comparant avec ce qu’il acceptait de respecter avec elle. Il vécut cela comme un affront public et finit par cracher son venin sur Vanessa aussi. La troisième amie, Chloé, avait tenté de mettre en garde Madison dès le début, elle-même ayant fait les frais des assauts de Nicolas, mais ayant réussi à le quitter avant qu’il ne dépasse ses limites à elle.

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