Âmes sensibles, s'abstenir !

Jour J ! Il est six heures du matin, mon conjoint est parti au travail depuis deux heures et le diablotin numéro un – qui me donne des aigreurs d’estomac, me fait vomir depuis presque neuf mois et joue avec mes côtes – semble vouloir se pointer. La contraction est légère, pourtant plus piquante ! Bon, j’ai le temps, c’est un premier. Mon Border Collie bien réveillé, je décide de le sortir : petite balade rapide. Je retourne me coucher, un petit carré de chocolat dans l’estomac.

Huit heures ! Bon, les contractions se font plus fréquentes. J’appelle mon mec pour qu’il rentre et je tourne autour de la table, sautille, fait des squat jusqu’à ce que… Oh, punaise, il est hors de question que je fasse caca pendant l’accouchement !!! Fort heureusement pour moi, les contractions commencent à se faire fortes et l’envie de chier (ouais carrément) se fait sentir. Je file aux toilettes et sens couler le bronze avec délivrance. Je réitère la chose deux ou trois fois avant l’arrivée du papa. Je pense alors à mes petits poils pubiens, que j’ai gentiment ordonné dans la semaine. Un pied en appui sur la baignoire, un miroir au sol, à tenter vainement de rendre à ce fouillis, une présentation un peu plus digne. Mais putain que ce ventre m’emmerde !

Huit heures trente, mon conjoint rentre enfin et me demande si je vais bien. Mise à part que je me paie des contractions depuis deux heures et demie, tout baigne. Je me suis même vidé le colon, franchement, je suis au top ! Puis, je vois dans son regard, le vide. Bon ok… Il était censé terminer le sac, mais vu son état, j’ai pris la liste et je l’ai terminée. Neuf heures, nous partions et nous avons mis quarante-cinq putain de minutes pour aller à l’hôpital !!!

Dix heures, salle de préparation, auscultation, dilatation à trois, monitoring d’une heure, destruction du bras de mon conjoint, ausculation, dilatation à quatre ! QUOI ??? C’est tout ! Il est presque midi. Je vais marcher, monter et descendre les escaliers puis, prise de fatigue, je veux dormir. En plus, j’ai faim, j’ai soif et je n’ai droit à rien ! Que dalle, fifre, niet, nada ! Je tente de dormir, sur le côté, le dos, l’autre côté, le ventre… Ah merde non, je ne peux pas ! Mon mec retrouve les sensations dans son bras !

Quatorze heures trente, je suis à bout, j’ai mal, mes jambes tremblent, mon souffle est saccadé, je suis épuisée. Je demande la péri, qui n’est pas disponible de suite ! Ausculation, dilatation à sept, la tête de bébé au bord du précipice. Go go go ! Je monte sur un fauteuil roulant et la sage-femme me fait traverser le couloir en mode commando ! Salle de travail et là… On me fout à poil ! Mais non, mais non ! Je n’ai pas plus le temps de réfléchir que la sage-femme éclate la poche des eaux. J’ai littéralement l’impression de m’être pissé dessus. Et je vais rester trempée comme ça ? Vraiment ? Apparemment oui ! Bref, c’est parti ! Je pousse, je crie, j’insulte les sages-femmes et sans doute, fais-je peur aux autres mamans. Je réexplose les doigts de mon mec et me fatigue pour rien. Ce petit con ne sort pas ! Trente minutes de travail, le gynécologue se pointe, tel un cheveu sur la soupe et marmonne un :

« Il faudra aller le chercher avec les forceps ! »

Il rigole lui ? Déjà que j’ai bien vu la paire de ciseaux se promener, personne, mais alors personne, n’ira chercher mon fils ! Ni avec des forceps, ni en me coupant le vagin. Il sortira tout seul. Et c’est ce qu’il fit, cinq minutes plus tard avec un bras levé, le poing serré et collé sur la tête !

Mais quel con, il croyait que c’était le moment de jouer au héros ? Tu m’étonnes que j’en ai chié ! Mais par contre, petite victoire, je n’ai pas fait caca !