Une si belle journée
L’abbé ne me lâche qu’une fois arrivée dans la sacristie. Il me demande de l’attendre avec pour consigne de ne pas sortir de la pièce et de ne toucher à rien. J’ai juste le droit de feuilleter un livre de messe et l’autorisation, le devoir même, de prier Dieu ou la Sainte Vierge.
Mon passage à l’église ne se déroule pas comme prévu. Je dois attendre, alors j’en profite pour ausculter mon genou. Une croûte sanguinolente se forme à l’endroit où il a cogné contre la pierre. Ce n’est pas une grosse coupure, elle devrait vite cicatriser.
Je repense aussi à Romain et à notre baiser de cette après-midi. C’était agréable. J’ai aimé quand il a enserré ma taille avec ses bras, avant de se coller à moi. Puis quand sa main droite s’est mise à caresser mes épaules, mon cou, mes cheveux pendant que l’autre me maintenait contre lui. Je pouvais sentir sa chaleur, entendre son cœur battre en même temps que le mien. Il est resté un moment contre moi, puis s’est éloigné pour observer mon visage. Il m’a souri et ses yeux brillaient comme si j’étais la plus belle du monde.
J’ai tremblé lorsque ses mains ont effleuré mes joues. C’était si doux que j’avais l’impression de la caresse d’une plume ou d’une brise légère de vent. Il a ensuite posé ses lèvres sur mon front. Ses mains ont glissé vers mon cou, il a penché la tête, m’a donné un baiser sur la joue, puis un autre, et un autre, se rapprochant à chaque fois de ma bouche. En même temps, ses doigts caressaient ma nuque et mes cheveux. J’étais serrée contre lui, ses lèvres s’avançaient vers les miennes, j’ai ouvert la bouche et…
Je l’ai laissé appuyer ses lèvres contre. Nos deux langues se sont enlacées. J’ai adoré le contact de son corps contre le mien, ses caresses dans mon cou, sa langue dans ma bouche. Quand il s’est arrêté, c’est moi qui me suis jetée sur ses lèvres pour recommencer.
Nous nous sommes embrassés plusieurs fois, puis nous sommes restés sans bouger l’un contre l’autre. Je n’avais plus envie de me décoller de lui. Nous avons passé l’après-midi à nous balader dans les champs, main dans la main, à souffler sur les fleurs de pissenlit et regarder leurs graines s’envoler. C’était chouette, j’aurais voulu que le temps s’arrête pour en profiter toute l’éternité.
La journée s’annonçait parfaite : la joie de faire ma communion demain, maman qui me fait essayer ma robe, moi qui la montre à Romain, notre premier baiser, le reste de l’après-midi à rêver, à nager dans le bonheur.
Je n’ai pas vu le temps passer et ne me suis souvenue de la confession qu’au dernier moment. J’ai quitté Romain précipitamment et foncé vers l’église. La suite, je l’ai déjà racontée. Maintenant, je suis seule dans la sacristie après m’être fait méchamment réprimander par l’abbé.
La journée se termine moins bien qu’elle n’avait commencé.
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