Ta gueule ! On dort le 14 juillet.
14 juillet. Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons ! Marchons, marchons… qu’un sang impur abreuve nos sillons. Entendez-vous dans nos campagnes, mugir ces féroces soldats qui viennent…
A priori, personne n’entend plus rien ! Calme plat dans les campagnes… Il est vrai qu’un agriculteur endetté, ruiné, pendu à un pommier, un cerisier, ça ne fait guère de bruit.
Plus de casques à pointes… Juste quelques excités de la gâchette, de la machette qui justifient à eux seuls des lois liberticides. L’acide de nos démocraties. Tu comprends… la force du nombre… Et s’il n’y a plus d’excités, il y aura bien un virus… Tu comprends… la force de la peur… L’Allemagne s’est assise sur sa « boche attitude » cabocharde… Fallait bien trouver autre chose, depuis tout ce temps… Tu comprends… Fallait bien avoir de nouveaux ennemis… ils étaient jaunes avec leurs gilets, rouges avec leurs bonnets, noirs avec leurs cagoules, wookistes avec leurs idées ou même complotistes, ou même islamo-gauchistes… Maintenant, il est russe. Demain, il sera chinois… peut-être toi.
Ici, le 14 juillet, on répète que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Vive le droit du sol ! Vive la souche française ! Vive l’eugénisme franco-français ! Celui-là même, stupide et inculte, qui oublie qu’une souche sans racines pourrit. C’est con tout de même ! Et qui, de surcroit, oublie que les racines sont multiples ! Tu comprends…
Elle est devenue belle la France. Maintenant, elle rime même avec intolérance.
Liberté. Egalité. Fraternité. Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.
Aujourd’hui, je pense à toi…
- Toi, le SDF qui meurt encore de froid ou de faim au pays de l’abondance ;
- Toi, le « sans-dents » qui travaille pour gagner ce que tu dois dépenser pour aller travailler ;
- Toi, l’enfant condamné à finir comme les ours polaires, à disparaître englouti par les eaux ;
- Toi, la femme qu’on doit protéger du parapluie des lois contre la pluie de coups ;
- Toi, le gris, le black, le bridé, pourtant né français mais pas de souche ;
- Toi, l’ouvrier qui terminera sa vie au turbin sans gagner en liberté ;
- Toi, le nanti, pauvre naïf qui oublie que tu n’es qu’un jouet de la spéculation ;
- Toi, l’écolier, le môme qu’on classe, qu’on case, qu’on casse ;
- Toi, l’autre, trop différent pour être des nôtres parce que tu aimes différemment ;
- Toi, le survivant de la mer qui vient pourtant s'échouer et mourir sur le sable de Calais;
- Et toi…
- Et toi…
- Et toi…
Liberté ? Egalité ? Fraternité ? Tu comprends…
Tu veux que je te dise ? … Mon cul !
Aux grands mots, aux grands maux, préférons une notion plus simple : RESPECT !
Et en attendant... Ta gueule ! On dort le 14 juillet.
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