Eva l'avait accueilli en souriant. Elle était même allée jusqu'à lui ouvrir la porte comme à un invité de marque - et pourtant, il n'était pas sans connaître la maison, hélas !

Elle, elle aurait bien aimé s'éviter toute cette mascarade. Il avait même eu l'audace de l'embrasser, et c'était à grand peine qu'elle avait réprimé son dégoût : puisqu'il fallait en passer par là pour parvenir à son but, elle le ferait.

Elle l'avait invité à s'asseoir, gentiment, poliment. Ils avaient bavardé. Comme toujours il lui avait rebattu les oreilles avec ses histoires, et elle, elle avait continué à sourire en rongeant son frein.

Mais maintenant, c'était le moment : cinq heures, l'heure du thé. Elle lui en offrit. Comme prévu il accepta de sa petite voix irritante d'enfant gâté.

- Oui, volontiers

Une fois dans la cuisine, sans un tremblement, elle fit ce qu'elle avait à faire. Elle avait sorti, à dessein ses petites tasses de porcelaine bleue dont l'une avait l'anse légérement ébréchée.

Je m'étonne encore d'avoir pu écrire ces quelques lignes sans penser du tout à ce qui pourrait se passer ensuite...