7 - Mante diabolique
Quel pied !
Bastien ne croyait toujours pas en sa chance, pour sûr il était en train de rêver ! Ça n’arrivait que dans les fictions ou, IRL, aux beaux gosses, de rencontrer une bombe atomique en boîte de nuit. Et surtout de la brancher et de l’amener chez elle pour conclure.
Lalia - car elle lui avait dit son nom alors qu’ils flirtaient chaudement autour d’un verre - avait tout d’un rêve. Elle correspondait en tous points à ce que la société décrivait comme la beauté féminine idéale. Elle semblait trop parfaite pour être vraie, avec ses longues jambes fuselées, son ventre plat, son tour de taille de poupée, sa poitrine ferme et rebondie, sans parler de ses mains expertes, sa bouche rieuse et avide, sa peau brûlante de désir, et ses longs cheveux teints en blanc veiné de violet, de rouge, de bleu et de noir, qui l’avaient chatouillé durant leurs ébats.
Il n’avait jamais passé une nuit aussi torride de sa vie, et il doutait trouver une femme aussi excitante que celle-ci. Pas que les filles s’étaient bousculées au portillon depuis qu’il était en âge de courir après, mais il avait suffisamment d’éléments de comparaison pour confirmer que Lalia était le meilleur coup de sa vie. Couchée près de lui, la peau perlée de sueur, elle le regardait avec des yeux brillants et un grand sourire ravi, satisfait mais pas repu. Cela annonçait un second round qu’il était pressé d’assurer, et il se lova contre elle. Elle l’entoura de ses bras et de ses jambes interminables tandis qu’il déposait des baisers fiévreux sur son corps et se délectait de ses soupirs de contentement. Sa peau était si… douce ?
Non, quelque chose clochait. Il ne reconnaissait plus le grain velouté qu’il avait caressé, embrassé, palpé et empoigné. Elle lui semblait plus dure sous ses lèvres et sa paume. Perplexe, il cessa ses cajoleries et tenta d’y voir plus clair dans la semi-pénombre de sa chambre. Les rais de lumière des lampadaires à l’extérieur lui donnaient l’impression que la peau de Lalia avait pâli. Était-ce vraiment une impression ?
Serré contre elle qui refusait de le lâcher, il peina à lever les yeux vers son visage. Ces quelques secondes à ne pas voir grand-chose lui permirent tout de même de réaliser que son emprise devenait douloureuse, que ses doigts semblaient plus n’en former qu’un qui s’enfonçaient dans ses épaules. Il grimaça d’inconfort et sentit aussitôt l’effroi s’emparer de lui, l’arrachant à l’ardeur de la luxure pour le plonger dans une peur glaciale.
Les cheveux de Lalia tombaient par plaques, provoquant cette fois des chatouillis désagréables le long de ses bras et de son torse, tandis que son visage si parfait se tordait en… autre chose. Ses yeux enjôleurs s’arrondirent, jaillirent des orbites pour devenir affreusement globuleux, sa bouche cracha ses jolies dents blanches pour arborer des mandibules, son crâne craqua pour prendre une forme triangulaire.
Bastien sortit soudainement de sa stupeur et se débattit furieusement mais, pris au piège de deux puissantes pattes, il ne put s’échapper. Pire, il sentit sa peau céder sous les crochets présents sur la carapace blanche et biscornue de la créature, sur lesquelles apparaissaient de jolies tâches violettes, rouges, bleues et noires. Terrifié, ivre de douleur tandis que son sang coulait, il plongea un regard plein de larmes dans ceux, bruns et traversé d’une fine pupille verticale, de cette chose qui ne pouvait pas exister. C’était un rêve transformé en cauchemar, cela ne pouvait être que ça. Il allait se réveiller, c’était sûr et certain !
Le hurlement qui voulut jaillir de sa gorge fut étouffé par la gueule avide de Lalia, et ses supplications furent tout aussi vite avalées lorsqu’elle lui arracha la tête. Elle le dévora goulûment, prit encore plus de plaisir que lors de l’accouplement car, en plus d’être délicieux, elle sut que le mâle fut plus que prometteur. Déjà elle sentait une nouvelle vie germer en elle.
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