Nous sommes des cafards, et nous pensons que la terre nous appartient

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Brûler sa carte électorale, allumer des bougies, l’unité des cœurs, chantés dans un seul et même but.
J’ai souvent imaginé un monde, où les gens seraient libres. Pas de religions pour diviser les peuples, les couleurs pour ensoleiller les visages, la confiance pour sortir dans la rue sans peur.
Je ne trouve pas les mots je crois..

Quels mots pour décrire la barbarie de mon peuple ? Quels mots pour décrire la cupidité des chefs de mon pays ? Quels mots pour la douleur, l’horrible sentiment d’être seul en tant qu’humain ?

[ RÉVEILLEZ-VOUS ], voilà les mots avec lesquels j’ai grandi, il se fait tard. Il se fait tard pour pleurer, il se fait tard pour écrire, il se fait tard pour regretter.

J’ai les yeux perdus dans le vide, quand j’y repense..
« C’est bien le soutien sur facebook, c’est juste stupide d’attendre la guerre pour devenir des humains. »

            -   Moi j’suis effrayée, les gens ont l’air de s’en foutre, c’est comme en début d’année, charlie hebdo, comme une mode dépassée, on a vendu des livres, on est sorti dans les rues, on était en colère, on était prêt à répondre et à se défendre, mais regarde nous, nous n’avons rien fait, nous avons juste tendu les cordes, tirer au-delà des limites. Non, ne me coupes pas, c’est bien de mettre des bougies aux fenêtres, c’est bien de dire qu’on est en sécurité, c’est tard mais c’est bien, mais tu verras, les gens sont se réconcilier avec les fêtes de fin d’année, parce qu’on oublie vite la douleur quand on boit. On va reprendre nos quotidiens, nos boulots comme si demain était sûr, on va aller se coucher en étant persuadé que tout ira mieux, je sais que j’ai l’air pessimiste, mais que veux-tu ? Tu as vu ce qu’on voit aux infos ? Non, moi non plus je ne les regarde plus, j’ai pas envie d’entendre que mon pays ferme ses frontières, j’ai pas envie d’entendre que 120 personnes sont mortes à cause de notre stupidité. Non j’ai plus envie d’entendre tout ça, assise sagement dans mon salon, pendant que la moitié de la France est en deuil, Hollande dans son bunker. En Janvier, on parlait de liberté d’expression, aujourd’hui, quelle est la cause à défendre, sinon la paix ?

                                                                […]

 

C’était hier, avant-hier, en début d’année. J’ai cherché les mots, les mots exacts, se faire comprendre. Mais décidément, je n’ai ni dormi, ni vraiment écrit. Les yeux ouverts, je me demandais ce que serait mon avenir. La nuit du massacre, dans l’urgence, j’ai envoyé un texto à un frère que j’ai, être sûre qu’il soit vivant. Serait-ce ça notre vie.. ?
Et je ne trouve toujours pas les mots.


En vérité, j’ai honte..
Nous sommes des cafards et nous agissons comme si la terre nous appartenait.. On se dispute des terres. On se dispute pour des Dieux. On se dispute pour être le plus fort, on se dispute pour être le plus beau, à la fin que restera t’il ?
Mes larmes ne peuvent plus couler, le sang a recouvert la surface du globe, dans un élan de haine. J’ai connu la dictature, j’ai connu la frénésie du Père, j’ai connu des groupes respectueux, j’ai connu des guerres silencieuses. Les gens font ce qu’ils peuvent avec les moyens du bord, mais je n’ai tué personne pour gagner ma liberté.
Alors, j’ai honte oui, faire partie d’une race, n’importe laquelle, j’ai honte, et marre qu'on me foute dans une case.

On me parlait d’être citoyen du monde, alors pourquoi certains ne veulent pas de moi ? Parce que je ne fais pas partie du même monde ? Parce que je n’ai pas la même religion ? Parce que je suis blanche avec des tâches de rousseurs ? Serait-on capable de me buter dans la rue si je disais que je préfère croire que Dieu est en moi ?
J’ai honte. Etre enfermée à la maison, pendant que le monde va mal. On m’avait prévenu « ne fais pas partie du monde mauvais », mais je pensais, naïve que je suis, que nous étions tous des hommes, à la même échelle, des hommes mortels, et que nous étions tous sur la même terre, ce qui faisait de nous des gens solidaires.

Je voulais écrire sur la liberté, sur l’amour, sur ce qui fait que nous sommes heureux, mais mon cœur est blessé. Gravement, il se vide et ne cicatrise jamais, les fils pour tenir le tout.
Quand j’étais jeune, on me parlait d’une terre transformée en Paradis, plus de gens mauvais, plus de maladie, j’y croyais, dur comme fer.


Je suis en deuil.
Pour un pays dont je fais partie.
Je suis en deuil pour une terre que j’habite.
Je suis en deuil, pour les gens morts depuis des décennies.
Et j’ai honte de dire que je ne peux rien faire pour sauver les autres, sinon me protéger. C’est comme l’histoire des deux loups. Nous sommes les seuls, dans le secret de nous-même a décidé de faire bien, de faire mal. Nous sommes libres de choisir l’amour à la haine, la joie à la guerre, les mots à la vengeance. C’est niais, mais je suis comme une enfant qui regarde les profs se battre pendant le quart d’heure de récré.

Ce matin, j’ai sauvé une mouche alors que la maison en est infectée. Je sentais son cœur battre dans les reflets de la vague, les vibrations de sa vie. C’est tout ce que j’ai trouvé à faire ce matin, pour me déculpabiliser. La bonne action. Sauver une vie, si courte soit elle.

J’ai étudié au lycée les guerres, l’économie, j’ai étudié les colonies, Guernica, je ne savais pas que je ferais partie de la nouvelle génération. A l’époque, on gueulait dans les rues pour avoir nos cours, nos profs, on peignait sur les routes notre mécontentement, on se faisait embarquer par les flics, plus d’une fois, parce qu’on avait la gueule trop grande ouverte.

Je fais partie des résistants.
Je résiste, devant les sectes qui nous regardent comme des proies.
Je résiste, devant les orateurs charmants qui nous promettent de nouvelles lois.
Je résiste devant les grands de ce monde.
Je résiste à mes envies de meurtres.

Et je persiste. Pour la liberté.

 

 

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