Tout s'en va

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Elle - Je dois te parler.

Lui -  …

Elle - ...

Lui - Bah parle.

Elle - Tu m’écoutes ?

Lui - Tu veux que je te réponde ou que je t’écoute ?

Elle - Tu me déprimes.

Lui - Je sais.

Elle - N’en sois pas fier, ça n’a rien de difficile.

Lui - Je sais.

Elle -  …

Lui - Tu es plutôt silencieuse pour quelqu’un qui voulait parler.

Elle - Arrête d’être moqueur.

Lui - Pourquoi ?

Elle - Moi aussi je pourrais te faire mal.

Lui - Ah bon ?

Elle - Oui.

Lui - Vraiment ?

Elle - Oui.

Lui - Et comment ?

Elle -  …

Lui - Tu vois, non.

Elle - Je m’en vais

Lui - Ah, et où ça ? 

Elle - Arrête, c’est sérieux.

Lui - C’est toujours sérieux et en définitive ça ne l’est jamais.

Elle - Et si un jour ça l’est vraiment. Que feras-tu ? tu auras peur ?

Lui - Rit

Elle - Je te le demande vraiment !

Lui - Oui. J’aurais peur.

Elle - Alors aie peur, je m’en vais vraiment. Je suis vraiment sérieuse.

Lui - Pour une fois.

Elle - Pour une fois.

Lui - Et tu as choisi ça comme choix sérieux.

Elle - Oui. Désolé.

Lui - Te barrer.

Elle - Oui. Désolé.

Lui - Tu te barres ?

Elle -  …

Lui -  Hé bien, dis-le ?

Elle - Ne t’amuse pas avec moi.

Lui - T’en es même pas capable.

Elle - Tu es cruel.

Lui - Et toi ?

Elle - Arrête ça.

Lui - Quoi donc ?

Elle - J’essaie d’être honnête.

Lui - Bah réessaie parce que c’est pas une réussite.

Elle - Toi t’essaies quoi ?

Lui - De te faire pleurer.

Elle - Ça, ça va tu sais faire.

Lui - N’est-ce pas ?

Elle - Un jour tu vas finir pas t’ennuyer à force de faire que ce que tu sais faire.

Lui - Et toi tu vas finir pas couler à force d’essayer de faire ce que tu sais pas faire et de rater !

Elle - Je préfère être une ratée qu’être avec toi.

Lui - Ah oui ?

Elle - Oui.

Lui - C’est faux, et tu le sais.

Elle - C’est peut-être faux mais je m’en vais quand même.

Lui -Tu souris ?

Elle - Mais j’ai envie de pleurer.

Lui - Alors t’en es capable ?

Elle - Non.

Lui - Tu vois, c'est raté.

Elle - Je suis pas capable de te quitter mais je m’en vais pas pour te quitter, je m’en vais pour partir.

Lui - Tu dis des choses qui n’ont pas de sens.

Elle - Elles en ont pour moi.

Lui - Et tu vas où ?

Elle - Ailleurs.

Lui - C’est ridicule. Tu te crois forte ? tu crois que ça va te donner une liberté nouvelle ? tu crois que tu vas partir à l’aventure ?  tu vas juste aller pourrir ailleurs. Tu es ridicule.

Elle -Oui. Je ne crois rien du tout, je vais chercher un monastère. Je vais rentrer dans tous les monastères que je rencontre pour voir si Dieu y est, et si un jour je le croise, j’allumerais un cierge pour toi. Ce sera surement sur un sentier boueux dans la brume très loin du dernier monastère que j'aurais rencontré et où je me serais ennuyée des jours et des semaines sans savoir prier.

Lui - Tu ferais mieux de l’allumer pour toi ton cierge.

Elle - J’ai toujours voulu partir. Même avant de te connaître. Puis je t’ai connu, alors j’ai eu une bonne raison de partir, j’ai attendu jusqu’à ce que cette raison sois suffisamment gonflée pour n’avoir plus le choix, pour qu’elle me pousse violemment hors de la vie, j’ai attendu de n’en plus pouvoir pour sortir du monde.

Lui - Et tu t’en vas, j’ai compris. T’es vraiment pathétique.

Elle - Et toi, t’es vraiment triste. Si je savais prier je prierais pour toi. J’essaierai, chaque jour, même si j’y parviens jamais.

Lui - Pars.

Elle - T’es fort hein ? tu retournes la situation pour te persuader que c’est toi qui as voulu que je parte. Vas-y, fais-le, si ça peut t’aider, disons que c’est toi qui m’a dit de partir. Qu’est-ce que ça change ? t’as jamais su reconnaître l’essentiel.

Lui - Alors que toi oui ? Miss parfaite qui s’est laissée corrompre par un connard.

Elle - Rit.

Lui - Vas-y rigole.

Elle -Tu n’en es pas capable hein ? tu ne le reconnaîtras jamais mais t’aimerais tellement pouvoir le faire. C’est dommage. Pas vrai ? parce que tous les deux on aimerait bien que t’en sois capable. Ça changerait peut-être tout. Je pourrais ne pas partir. Rester. Oui, c’est vraiment dommage.

Lui -Pas tellement.

Elle - Tu sais que moi j’en suis capable ?

Lui - Je te crois pas.

Elle - Ah oui ?

Lui - Tu n’es qu’une petite conne, même toi tu ne te prends pas au sérieux, comment veux tu qu’on te croit ?

Elle - Je sais pas, peut-être qu’on devrait plus croire ceux qui se prennent pas au sérieux.
Lui - Fais pas ta maligne, on sait tous les deux que t’en ai pas capable.

Elle - Toi tu le sais, pas moi.

Lui - Bah je te le dit, t’en ai pas capable.

Elle -    …

Lui - Tu n’en es pas capable !

Elle -  …

Lui -   …

Elle - Je t’aime.

Lui -  …

Elle - Je t’aime. C’est drôle. Non ?

Lui -   …

Elle - Tu sais rien dire.

Lui -  …

Elle - Adieu.

Lui - N’oublie pas le cierge.

Elle - Acquiesce. 

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