Nouvelle lettre
Je t'écris encore.
Car il faut que je te parle encore.
Et j'ai bien peur qu'il va falloir que je t'écrive toutes les semaines.
Ma colère n'est pas retombée, car les lames se sont encore levées.
Il devient plus sûr, de nos jours, de prier dans les mosquées que dans les églises.
Je sais que tu es agnostique (toi, tu ne le sais pas encore. Tu es simplement rétif à obéir à des injonctions barbantes le dimanche matin). Mais tu as été forgé dans le fer de la chrétienté. Celle qui a transformé ses épées en plumes de stylo. Ceux-là mêmes qui ont écrit les textes humanistes, qui enfantèrent la Constitution.
Et tu admires les constructions humaines, qu'elles soient ou non dévolues à un quelconque dieu.
Tu as toujours trouvé les églises fascinantes et mystérieuses. Et tu te souviens avec émotion du cri de Quasimodo « Asile ! Asile ! », qui montait du texte de Victor Hugo.
Les églises ont toujours été pour toi des lieux sacrés. Tu les respectes.
Mais si ses murs sont solides, ses fondations sont fragiles.
Et le couteau de l'islamiste se moque bien des plumes de stylo, coupables de n'avoir pas écrit son livre.
Alors il entre dans les églises où il décapite et égorge.
Et toi tu ne peux qu'écrire ta colère. Tu espères d'ailleurs ne pas être le seul à la ressentir.
Tu t'étrangles de douleur et de consternation à la lecture de réactions, au mieux tièdes, au pire laudatrices, à cet acte abject.
Et tu ne peux t'empêcher, à regarder ta plume, de te sentir impuissant face à l'épée.
Mais tu te jure que c'est ce qu'ils t'enlèveront en dernier. Même s'il te faudra la planter dans l'oeil de ton ennemi.
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