Miranda
Elle reçut l'invitation au milieu des factures et prospectus, et du coup faillit la jeter par erreur à la poubelle.
Ce fut la qualité de l'enveloppe, très raffinée, qui la retint au dernier moment.
Surprise, elle hésita à l'ouvrir. Qui pouvait s'intéresser à elle ? Une pauvre institutrice un peu folle, vivant dans un village de même pas mille habitants, perdu dans les montagnes.
Elle n'avait même pas d'amis, n'en avait jamais eu.
Qui pouvait lui écrire ?
Elle la retourna plusieurs fois dans ses mains puis la déposa sur la table d'entrée pour se réfugier dans la cuisine et se préparer un thé bien chaud. Elle devait vraiment être névrosée pour ne pas réussir à ouvrir une simple lettre.
Elle s'était recroquevillée sur elle-même depuis tellement d'années. La vie avait été si cruelle qu'elle s'était réfugiée dans un petit village, où personne ne connaissait son histoire et ne la jugerait pas. Elle avait retrouvé un semblant de vie mais elle ne se faisait pas d'illusions. Elle se cachait la vérité depuis tellement longtemps.
Finalement, elle ouvrit l'enveloppe. Ses yeux s'embuèrent de larmes en repensant au vieil homme qui avait tellement été gentil avec elle. C'était l'époque où ses parents avaient pris la décision de l'interner. Il était bénévole à l'asile psychiatrique.
Il ne l'avait pas jugé, n'avait de toute façon jamais discuté avec elle de ses démons intérieurs. Au contraire, il l'emmenait dans le parc, admirer les fleurs, les arbres, lui expliquant que la nature avait une âme, que nous ne faisions qu'un avec la planète. Il aimait lui faire sentir les fleurs sauvages, le simple contact avec les lys le faisait rajeunir, un sourire d'enfant sur les lèvres. Il aimait jouer avec les papillons, ramasser les feuilles mortes pour en faire un magnifique tableau... On aurait dit un enfant...dans un corps de vieil homme. Il était si serein, si paisible.
Il avait été là, la consolant lors des cauchemars, lorsque ses parents avaient décidé de ne plus venir la voir.
C'était lui, qui à sa sortie, lui avait trouvé un emploi d'institutrice ainsi qu'un petit appartement meublé. Avant de partir, il lui avait promis qu'un jour, ils parleraient de la tragédie qui avait détruit sa vie et qu'à ce moment là seulement, elle se rendrait compte à quel point elle s'était trompée.
Et ce jour, apparemment, était arrivé...
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