Ils étaient nombreux en ce jour magnifique d'été à venir lui dire adieu.

Il avait tant œuvré pour la société avant que l'accident ne le fauche en pleine gloire.

Son livre, tiré à des millions d'exemplaires, était devenu le best-seller le plus lu de tous les temps.

Puis il y eut l'accident, bête, idiot, comme tous les accidents.

Il était toujours tête en l'air, dans les nuages, sûrement à imaginer on ne sait quelle histoire folle et fantastique.

Il ne vit pas la voiture arriver sur lui, juste entendu les cris et puis plus rien, le trou noir.

Trente ans de coma, c'est long, très long.

Pourtant sa femme refusait de le débrancher, depuis toujours, malgré les avis des médecins. Avec tout l'argent engrangé par la vente de son livre, elle pouvait continuer à le faire vivre.

Mais peut-on vraiment parler de vie dans ces cas là?

Le chemin fut long avant qu'elle ne se décide. Elle-même avait refait sa vie, il était ridicule de continuer ainsi.

Alors, elle appela le peu de famille qu'il avait, son frère Joseph et sa sœur Rachel; ses amis Nathan, un journaliste et Miranda, qui lui servait son café tous les matins dans son bar habituel.

Sarah, son infirmière et Mickaël, son médecin depuis le début, étaient venus leur faire ses adieux.

Et puis Alice. Petite fille qui venait voir sa maman, plongée dans un profond coma elle aussi, suite à un accident de voiture dans lequel elle avait miraculeusement survécu.

Enfant très étrange, cette Alice. Elle venait lui raconter des histoires dans l'oreille, comme s'il pouvait l'entendre. Toujours d'une humeur joyeuse, toujours un mot gentil, toujours poli. Un vrai petit ange.

Comment avait-elle su que l'on débranchait Abraham aujourd'hui ? Coïncidence sans doute.

Elle était habillée d'une belle robe blanche, avec une rose rouge qu'elle posa entre les mains du vieil homme ainsi qu'un autre objet, un petit miroir semblait-il.

Au moment où le médecin arrêta les machines, elle se pencha à son oreille et lui murmura :

"Qui a dit que la mort était la fin de tout ?

Bienvenue au Paradis, Papa, Eleaonore t'attend..."

FIN