C’était une de ses expressions qu’on utilise sans y penser. Mais quand on la décortiquait, on se rendait compte de sa violence, de son jusque-boutisme.

« Même pas en rêve ! »

Quoi ? Et puis comment pourrait-on lui interdire ? Dans ce petit monde qu’il ne contrôlait pas et qui était tout à lui ?

« Même pas en rêve ! »

Oh si, il allait en rêver, encore et encore. Même dans des rêves éveillés et conscients.

Il n’avait que ça finalement, son imagination débordante, et on voudrait l’en priver ?

« Même pas en rêve ! »

Si, justement, car c’est là que tout nait et tout se crée, parfois tout s’emmêle et tout s’efface. Mais durant quelques minutes, quelques heures, c’était là et c’était à lui.

Alors, laissant l’injonction de côté, il se laissa glisser sur les draps rêches et froids. Il savait que d’ici peu de temps, ils deviendraient chauds et doux. Ou alors il le révérait et ce serait tout aussi bien.

« Même pas en rêve ! »

Il s’endormit, plongeant pour arranger le monde, effacer les pleurs du jour, oublier les peines de la veille et ne plus redouter celles du lendemain.