Je relançais L’araignée Gipsy pour la quarante-quatrième fois sur mon téléphone.

« Allez les gars, j’veux vous entendre. Et Etienne, je veux voir les gestes, putain ! Tu vas me la faire, la petite araignée qui monte à la gouttière-reuh !

—Mais tu fais chier, Kane, on a dit ça comme ça, parce que bon, c’est ce que tout le monde dit.

—C’est pas parce que tout le monde est con que ça vous empêche d’être intelligents. Allez, je remets au début, vous y étiez pas. Et on fait bien la pluie avec ses p’tits doigts ! »

Je rappuyais sur mon téléphone et les regardais tout en chantant avec la tête de Jack Nickolson dans The Shining.

« Allez, tous ensemble : L’araignée Gipsy monte à la gouttière-reuh ! Tiens, voilà la pluie… Gaël, la pluie, bon sang ! Gypsy tombe par terre-reuh ! Mais le soleil…

—A chassé la pluie ! hurlèrent-ils tous ensemble. »

Il y eu un blanc.

« C’est bon, on a compris, finit par souffler Jo. On a compris !

—Attendez les gars, non, faut pas vous excuser si vite. J’allais lancer une partie de petits chevaux, est-ce que vous avez seulement idée à quel point c’est soporifique ? Même subir une vasectomie sans anesthésie, c’est moins douloureux, bordel ! Et puis, on n’a pas encore fait toutes les comptines. Non, vous imaginez pas le répertoire que j’ai… Et en plus, elles restent dans la tête, c’est à devenir maboule !

—Arrête Kane, on dira plus, promis !

—Ouais, mec, on dira plus que c’est que du bonheur.

—Sérieux, range ton tel. Prends une bière. »

Je rengainais mon téléphone, déçu de ne pas leur faire écouter la super playlist qu’il contenait maintenant. J’étais pourtant sûr que Hérisson tout hérissé aurait pu faire un malheur.

Que du bonheur, la famille, que du bonheur.