Défilé d'un troupeau d'éléphants

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En mars-avril 2009, je vécus un safari photos intense au Kenya dans les Parcs de Nakuru et du Massaï Mara.

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Je garde un souvenir indélébile de ce séjour en bivouac, de jour comme de nuit, à suivre au quotidien et voir évoluer des animaux en liberté. Sans commune mesure avec la vie en cage des zoos ou la semi-liberté des parcs de nos contrées européennes.

Grâce à la passion pour la nature sauvage de Christine et Michel Denis-Huot, je pus découvrir avec une douzaine d'autres photographes amateurs, la vie de grands félins, guépards, léopards et lions. Nous les observions dès les premières heures du jour et jusqu'à tard le soir pour profiter des meilleurs éclairages. En milieu de journée, la lumière trop vive et la chaleur nous obligeaient à nous mettre à l'ombre.

Nous croisâmes des équipes de tournage de la BBC qui réalisaient des reportages avec des caméras très sophistiquées, en prévision des grandes migrations de gnous et de zèbres. Ces dernières débutaient depuis le sud du Serengeti en Tanzanie, à partir du mois de mars et cela jusque vers le Kenya courant juillet. En attendant, ils suivaient les chasses des guépards, surnommés chitas par les bergers Massaïs locaux, sur les troupeaux de gazelles ou d'antilopes.

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Pour suivre les cheminements incessants des animaux qui servaient de gibiers aux prédateurs, girafes, buffles, gazelles, antilopes, mais aussi rhinocéros et éléphants, sans compter les hippopotames, il nous fallait nous accrocher à bord de Land Rover en châssis long. Ces engins adaptés à la grande savane permettaient de traverser des passages de ruisseaux ou de gués de petites rivières comme la Mara, ou encore d'accéder à un relief accidenté.

Ils ne pouvaient cependant pas grand-chose lors de la saison des pluies quand les pistes se transformaient en véritable bourbier, phénomène appelé Black Cotton, où la poussière fine devenait une boue instable au risque de ne plus pouvoir bouger.

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Je restais interdit devant cette beauté sauvage où de toutes les directions germaient des grognements de phacochères, des cris d'oiseaux, des hurlements de babouins en commando, des rigolades d'hippopotames. Chaque population animale se retranchait dans des taillis épineux, des futaies, bordés par des acacias pour se préserver des attaques sournoises des félins.

Les couchers de soleil semblaient magiques et plus encore, si des nuages se rassemblaient pour offrir un peu de fraîcheur. Les couleurs tournaient autour de mauve et de blanc et parfois d'éclairs zébraient l'horizon offrant une ambiance de monde préhistorique.

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Les bivouacs se faisaient, sous tente individuelle ou deux places, à la belle étoile à la différence des lodges.

Les conducteurs, renforcés par quelques gardiens, assuraient la logistique et la sécurité. Un feu entretenu jusqu'à l'aube, tenait à distance les fauves et les hyènes. Sortir de la tente en pleine nuit, pour assouvir un besoin naturel, demandait un certain courage pour rejoindre le feuillet à l'aide d'une minuscule lampe de poche. Prendre une douche dans un habitacle de fortune se réalisait dans un temps record, mais procurait un grand réconfort pour se débarrasser des poussières et de la sueur de la journée.

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Avant de me coucher, je ne pouvais m'empêcher de regarder le ciel, la voute étoilée dénuée de toute pollution lumineuse, prenant un temps pour jouer aux apprentis astronomes.

Puis une fois rentré sous la tente, sans rien pouvoir ajouter à mes émotions si intenses, blotti dans mon sac de couchage, j'écoutais alors le défilé magique des éléphants, ponctué de frottement ou d'écrasement, de quelques barrissements. Les jeunes se serraient contre les mères et la matriarche veillait sur le troupeau. Passant au large du bivouac, les pachydermes nous saluaient de loin en maîtres de la savane et bien d'autres animaux leur emboîtaient le pas.

Il leur fallait sans cesse se mouvoir pour échapper à la vigilance des félins.

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Et moi je me voyais en guerrier massaï, la lance à la main, traçant ma route au sein de ces grands espaces, dans une vérité crue, à des années-lumière de l'hypocrisie mondaine de nos rapports en société.

=O=

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