La ville
Dans la fin de journée d'un jeudi long et monotone, je roule sur l'autoroute, seul, dans ma fiat 500, les fenêtre ouvertes, de sorte à laisser le vent souffler sur ma figure ridée par la fatigue. Il pleut quelques gouttes mais l'air est lourd. Autour, tout est répétitif : les fossés remplis d'herbes folles et des pipi d'urgence encadrent la route des deux côtés, eux-même encadré par la forêt de pins. La circulation est calme. Pourtant, des voitures il y en a partout : devant, derrière, sans oublier sur la file de gauche.
Je roule. Je roule loin et pour toujours. Je ne reviendrai plus. J'ai besoin d'air, c'est tout. Je me sens presque heureux en ce moment. Non. Pas heureux, mais plutôt libre. Même trop libre : je ne sais guère où je vais. Je n'ai plus de but, d'objectif, de destination finale, de projet, de défi, de challenge....si ce n'est me vider la tête.
Il y a encore une heure ou deux seulement, je voyais encore le dôme de grisaille que produit la ville, dans mes rétros.
Cet endroit...
Déprimant.
Opressant.
Pollué par tout ces buildings et ces commerces merdeux qui ne cherche qu'à te faire consommer !
Quand j'y repense, je ne peux m'empêcher de la revoir, gisant sur son lit d'hôpital.
Ma mère. C'était essenciellement pour elle que j'étais resté dans ma ville natale : avant mon arrivée, elle vivait la belle vie avec mon père, dans une maison classique, mais assez grande, aux abords de la ville. Mais il l'a jetée dehors, ne voulant pas d'un gamin pleurnichard. Avec le salaire ridicule qu'elle touchait, elle s'est retrouvée seule dans un appart aussi petit qu'une place de parking pour handicapé avec un gosse à élever !
C'était ça, où son mari et la vie de luxe.
Elle m'a choisi, alors je lui devait tout.
Mais son coeur a laché, à cause d'une vieille maladie cardiaque à la con !
Je continue de rouler, j'entends de nouveau le son angoissant qu'a émis le cardiogramme avant son dernier souffle. J'entends la précipitations des chirurgiens, tout en me rappelant les machines, et les multiples tuyaux sortant de sa gorge.
Mais maintenant ça ne compte plus. Rien ne compte, mis à part la musique de la radio que je chante de plus en plus fort. Je suis enfin libéré, d'elle, de la ville ! J'aurais tout fait pour maman jusque là, mais c'est désormais à mon tour de choisir ma vie. Il y a tellement de choses qui m'attendent, loin de la ville ! Le pacte est terminé.
- Sundayyy, bloody sundaaaaaaaayyyy !!!
Elle m'a élevé, je suis resté dans la ville à ses côté jusqu'à mes quarantes ans. Elle est morte, je vivrai.
La pluie se fait plus forte sur le pare-prise. Enfin, j'entends le tonnerre se déchaîner : l'orage éclate.
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