Si je ferme les yeux,

Je verrai un tas de choses.

Je rêve de m'allonger sur le sable, les yeux rivés sur les vagues qui se fracassent, le ciel qui cache peu à peu le soleil lumineux derrière de gros nuages,

Et je rêve de n'entendre que le rugissement des vagues, le doux murmure du vent, la colère de l'orage,

Et je rêve de ne sentir que les larmes de la pluie, les rafales du vent et la douce odeur qui s'accroche à l'air.

Je rêve de me tenir debout au bord d'une falaise, les yeux rivés sur un somptueux paysage vide de toute présence humaine, libre de la pression qui pèse sur mes épaules,

Et je rêve de crier, d'entendre ma voix retentir à travers les environs, d'exprimer toute cette rage qui bouillonne, de déchaîner toutes les émotions et tous les sentiments emmagasinés,

Et je rêve d'associer ma rage à l'orage, mes larmes à la pluie, mon désespoir au vent et mon silence à la terre.

Si je ferme les yeux,

Je verrai un tas de choses.

Je rêve d'avoir des ailes noires, le reflet de mon âme, d'être prête à me jeter, à m'envoler,

Et je rêve d'hurler à ce monde d'une cruauté naturelle où la paix n'est que temporaire, que le bonheur n'est qu'illusion,

Et je rêve de voler dans le ciel déchaîné, de sentir toute la haine que projette l'humanité, de sentir une dernière fois les chaînes de la vie.

Je rêve que le temps cesse de s'écouler, que les illusions s'effacent, que mes espoirs s'écrasent violemment au sol,

Et je rêve d'entendre les cris peinées de la terre, les pleures de la forêt, la rage du ciel et le désespoir de l'humanité,

Et je rêve de me tenir au milieu d'une route déserte, à admirer le silence mortel régnant autour de moi.

Si je ferme les yeux,

Je verrai un tas de choses.

Je rêve d'être un loup pour courir, sentir le vent toucher mon pelage, pour goûter à la liberté,

Et je rêve d'être un oiseau, pour être libre comme l'air, de n'avoir aucune responsabilité, de ne pas me conformer à la société, de ne vivre avec le sentiment d'une fausse liberté.

Je rêve de vivre au milieu d'une forêt, d'être confronté à tous les dangers, de prendre un coup avec le sourire,

Et je rêve d'accueillir la douleur comme une vieille amie, temporaire, pour me donner un semblant de vie.

Si je ferme les yeux,

Je verrai un tas de choses.

Je rêve d'être sur le sommet d'une montagne, d'admirer ce monde figé mais qui ne l'est pas en même temps, de crier juste pour entendre ma voix rauque,

Et je rêve de marcher jusqu'à que la fatigue fasse cesser tout mouvement, jusqu'à que la faim me fasse tomber dans l'inconscience, jusqu'à qu'un couteau pénètre ma chair lors d'une embuscade,

Et je rêve de m'asseoir au bord d'un fleuve, de penser à ces illusions qui détruisent de nombreuses vies sans que personne ne s'en rende compte, de rigoler pour aucune raison.

Je rêve de savourer le goût de la liberté, de prendre mon envol, d'ouvrir mes ailes, de me jeter dans le vide, de voler dans le ciel,

Et je rêve de me voir mourir, de me voir saigner à la mort, et je rêve de vivre comme je l'entends sans les notions d'impossible.

Si je ferme les yeux,

Je verrai un tas de choses.