Partie 3

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- Merci… Et désolé… dit Junior en commençant à s’endormir

- Désolé pourquoi ?

- Pour tout…

Mardack abandonne son frère dans le lit de son père pour retourner s’occuper du repas de ce soir, il redescend vers les cuisines de son restaurant jetant au passage un regard vers la salle de réception. Tout est parfaitement en ordre et propre, il sait qu’aucun de ses frères ne fera vraiment attention à ce genre de détail mais il a fait refaire les moulures du plafond qui ont été très usées par le temps et a pris grand soin de restaurer les armoiries de la famille. La vaisselle et les couverts sont entièrement neufs, la nappe blanche est éclatante et délicatement brodée, les fauteuils ont été restaurés. Il prend quelques secondes pour vérifier l’alignement des deux tableaux du fond avant de retourner travailler.

C’étaient deux portraits très solennels des deux épouses de Kaoragh Noelroc. La mère de Mardack avait fait réaliser le sien peu après son mariage avec le parrain Ork. Il a longtemps prôné en pièce centrale de salle de réception, ce qui finit par irriter au plus haut point la seconde épouse de son père. Elle finit par lui demander de le retirer mais il refusa catégoriquement. Après plusieurs disputes à propos du portrait, un compromis fut trouvé et un second portrait solennel de la mère des frères de Mardack fut ajouté, mais jamais ce tableau n’avait égalé celui de sa mère pour lui.

Il mit la main à la poche pour sortir sa montre à gousset. Déjà 18 heures, il faut qu’il se dépêche, ses frères ne sont pas pointilleux sur l’horaire, mais quand ils sont là, il faut manger tout de suite. Il descend les escaliers quatre à quatre pour aller en cuisine. Le chef est là avec son équipe en train de faire l’inventaire pour le repas et dresser l’apéritif.

- Karl tout est en place ? demande Mardack à son chef de cuisine.

- Tout est en place, on devrait être prêt dans les temps. Il y a juste une petite erreur, vous avez écrit trois kilogrammes de viande par personnes, vous vouliez dire pour tout le monde ?

- Non Karl, c’est bien trois kilos par personne et encore je la joue petit bras. J’ai déjà vu Keraktin manger un porc entier à lui tout seul. Et n’hésitez pas à faire cuire la viande de façon à ce qu’elle soit bien saignante. Ah et ne lésinez pas sur les hors d’œuvre non plus. Il ne faut, en aucun cas, se retrouver à cours de nourriture. Cela pourrait tout compromettre.

Mardack a fait fermer le restaurant et a demandé à l’équipe de cuisine de rester ici pour la soirée à ses frais afin de faire le repas pour sa famille. Il avait peut-être vu les choses en trop grand, de toute façon, mieux vaut faire trop que pas assez, surtout dans le cas de l’estomac d’un ork.

Les heures passent très rapidement jusqu’au dîner, le repas a été préparé dans les temps et le restaurant est prêt à recevoir les autres frères de Mardack. Le plus compliqué a été de réveiller Junior, de le faire laver, raser et habiller dans l’état. Il est à présent dans la salle de réception à attendre l’arrivée des autres. Attente, qui ne dure pas très longtemps vu que Keraktin arrive pour le repas près de trente minutes à l’avance.

- Tu sais que le repas ne commence qu’à vingt heures ? dit Mardack à son frère. Avant de venir tu aurais pu enlever le sang de ta veste avant d’aller dans la salle de réception, tu vas salir les murs et les fauteuils.

- Je sais, je suis désolé. Comme j’ai perdu l’invitation, je ne savais pas à quelle heure le repas commençait et du coup j’ai filé ici directement après le travail. J’en profite pour te dire que j’ai bien travaillé et que j’ai récupéré tout l’argent en retard et les comptes sont justes. Le comptable a même dit que c’était la première fois en dix ans qu’on était aussi à jour.

- Bien joué, mais tu te souviens de ce que disait papa ?

- On ne parle pas de business avant la fin du repas.

- Exactement. Allez, monte à l’étage les autres ne devraient pas trop tarder…

- Je suis le premier ?

- Non Junior est déjà là depuis quelques heures déjà. Et, avant que tu poses la question, non il n’est pas drogué ni saoul. Du moins, il ne l’était pas lorsque je l’ai laissé dans la salle de réception.

Keraktin se dirige à son tour vers la salle de réception tandis que Mardack reste là à attendre les deux derniers membres la fratrie. Quelques minutes plus tard, c’est au tour de Kirad, le troisième frère, de faire son apparition. Kirad est un Ork dont un homme dirait qu’il est plutôt costaud mais qui est en vérité de relativement faible constitution pour un membre de son espèce. Ses épaules tombantes et ses grands cernes donnent l’impression qu’il est toujours fatigué, ce que sa respiration haletante tend à confirmer. Kirad a une santé défaillante depuis qu’il a pris trois balles dans une fusillade contre un gang d’hommes rats l’an dernier. Une des balles se balade d’ailleurs toujours dans son corps, logé entre son poumon et son épaule. Mais cela ne l’a pas arrêté, bien au contraire. Il a rapidement su se faire un nom parmi les criminels les plus violents et les plus déterminés de la ville. Main gauche de son père, il est resté très fidèle aux traditions Orks, notamment celles qui consistent à se faire tatouer ses exploits sur le corps, il a d’ailleurs tant d’exploits à raconter sur son corps qu’il peine à les cacher derrière son costume. Mardack le saisit dans ses bras pour lui faire une accolade cordiale, très solennelle. Les deux frères ne s’étaient jamais bien entendus, l’un reprochant souvent à l’autre les origines sang-mêlé du premier.

- Tu arrives au bon moment, Keraktin et Junior sont en train de dévorer les hors d’œuvre, dit Mardack d’un ton pompeux

- Raskasse est en chemin, répond Kirad d'un quasi-grognement. Il avait deux ou trois choses à régler dans un de ses bars avant de nous rejoindre. Au fait, voilà ce que tu m’avais demandé, bien sûr, il ne faut pas t’attendre à ce que ses revenus soient aussi réguliers.

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