Chapitre 28 : Papa et maman, je sors avec un garçon

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Alex

21H– Nous franchîmes tous deux le seuil de la porte de chez moi. Au vu de l’heure tardive, mes parents nous attendaient dans le salon. Ils n’avaient pas commencé à manger et nous accueillirent avec des remontrances. Je n’avais pas expliqué clairement la situation et leur avais juste inventé un mensonge monté de toutes pièces. Mes parents s’étaient laissés convaincre. Pour eux, le père de Matt était parti en formation et ne revenait que dans une semaine. Avec la peur bleue de se retrouver face à son paternel, Matt avait soutenu mon histoire, mais nous savions tout deux que nous n’allions pas pouvoir le cacher bien longtemps. Enfin, l’important était sa sécurité loin de son père – acte infantile que je regrette sûrement maintenant –. Nous mangeâmes avec mes parents et ma petite soeur qui n’arrêtait pas de nous jeter des regards indiscrets. Matt avait eu du mal à terminer son assiette bien qu’elle n’était pas garnie et nous quittâmes la table assez rapidement après avoir souhaité bonne nuit à mes parents et Anya. Ils avaient remarqué qu’il n’était pas en pleine forme et n’avaient tout de même pas posé de questions sur son état.

***

Nous entrâmes dans ma chambre et nous nous posâmes sur mon lit sans parler. Malgré sa décision de me suivre jusque chez moi, je voyais très bien qu’il n’arrivait pas à être tranquille. Avec un tel passé c’était totalement compréhensible et bien que je l’eus promis de le protéger je n’étais encore que lycéen, tout comme lui. Je voulais le rassurer mais moi-même étais effrayé de la réaction de son père quand il découvrirait que Matt n’était pas rentré chez lui. Je me ravisai de suite car j’allais lui faire peur.

« Tu veux prendre une douche ? lui demandai-je avec attention.

Il acquiesça avec un petit signe de tête et commença à se déshabiller mais arrêta son geste au moment de retirer son t-shirt. Il semblait gêné non pas de se mettre nu devant moi – de toute manière j’avais déjà tout vu – mais plutôt de me montrer ses blessures. Je m’approchai alors de lui et lui retirai doucement son haut. Contrairement à l’épisode de l’infirmerie, il me laissa faire. Je constatai avec colère et tristesse qu’il n’avait pas que des bleus sur le ventre mais sur tout le corps. Certains étaient anciens et commençaient seulement à guérir tendis que d’autres étaient encore jaunes. Je me mordis la lèvre de fureur. J’étais en colère contre son père pour toutes les atrocités qu’il lui avait faites subir, contre lui pour ne pas s’être confié et d’avoir souffert seul trop longtemps mais aussi contre moi. J’avais été aveugle depuis tout ce temps alors que celui que j’aimais terriblement souffrait. Une larme s’échappa du coin de mon oeil. Matt devant mon comportement ne savait plus comment réagir. Je m’approchai alors de son corps et posai mes doigts proche de ses blessures. Puis tendrement, je vins déposer un doux baiser sur chacun de ses hématomes. Matt parut gêné mais me laissa faire. Devant une telle soumission de sa part, je ne pus résister et l’attirai lentement vers le lit. Entre mes baisers langoureux et mes caresses passionnées, Matt n’avait plus d’autre choix que de me laisser le consumer tout entier.

***

Le chant des oiseaux me tira de mon lourd sommeil. J’eus grande peine à me réveiller. Soudain, je me levai affolé, Matt n’était pas à mes côtés.

« Bonjour, me dit-une voix remplie de tendresse.

La personne que j’avais cru disparue venait de sortir de la salle de bain. Je soufflai rassuré et m’extirpai de mon lit.

— Tu m’as fait peur, lui avouai-je, j’ai cru que tu étais parti.

La veille, il avait reçu un appel de son père qui lui avait ordonné de rentrer sur le champ. Je lui avais donc pris son portable et lui avais balancé toute ma haine à travers le portable. Matt avait été surpris par ma réaction mais avait repris le cellulaire et avait coupé court à la discussion en promettant à son père qu’il allait rentrer dans trois jours. Son père avait grommelé mais avait bizarrement accepté. Nous avions été assez surpris par sa réponse mais nous l’avions acceptée avec grande joie.

Il s’approcha de moi et m’embrassa. Les prises d’initiative de sa part étaient pourtant très rares. Je me délectai de ce petit moment et chassai à grande hâte les mauvaises pensées. Nous descendîmes prendre ensuite le petit-déjeuner. Il se faisait tard mais ma mère nous accueillit avec un grand sourire. C’était le week end. Anya était en train de jouer avec une de ses poupées, assise sur le sol. Quand elle nous vit, elle fit de grands gestes et se jeta dans mes bras. Je lui tapotai de manière affective le sommet du crâne et pris place à table suivi de Matt. Nous n’avions aucune envie de sortir aujourd’hui, mais ma mère nous poussa tout de même à aller nous promener. C’est donc à contre-coeur que nous nous préparâmes à sortir une fois le petit-déjeuner fini. Anya voulait nous accompagner mais je lui fis bien comprendre que je ne voulais pas qu’elle nous dérange.

***

Posés sur un petit muret qui bordait le haut du village, nous nous reposâmes après avoir marché pendant une bonne heure. Je savais que Matt n’était pas trop athlétique et j’avais ralenti mon pas de marche. La vue que nous offrait le sommet du village laissa Matt bouche bée, ce qui me fit sourire. Je connaissais la vue par coeur mais elle me rendait toujours aussi heureux. Matt avait enfin repris son souffle. Il prit une grande bouffée d’air et laissa le doux vent caresser les parcelles de son visage. Amusé, je le regardai d’un air amoureux. Il dut sentir mon regard car il ouvrit ses yeux et se mit à rougir en constatant l’intensité dans mes yeux noisettes. Malgré la gêne occasionnée, il essaya avec force de soutenir mon regard mais ne put et se tourna vers le paysage pour cacher son embarras. Je rigolai aux éclats et passai mon bras autour de ses épaules. Il posa sa tête sur mon épaule et je l’aidai à la lui caler le mieux possible.

Nous restâmes silencieux un petit moment comme pour nous laisser bercer par le chant des oiseaux. Nous étions définitivement les plus heureux à ce moment précis. Bercés par l’ambiance passionnelle qui flottait, j’approchai sa tête tendrement vers la mienne et plongeai mon regard dans le sien. Mes lèvres vinrent rencontrer les siennes dans un moment d’égarement. Je plongeai alors profondément ma langue à la recherche de la sienne et enroulai la mienne dès que je la trouvais. Matt me répondit sensuellement et nous restâmes collés jusqu’à ce qu’un bruit nous détacha l’un de l’autre.

Un homme se tenait un peu plus loin à l’entrée du village et nous observait fixement. Quelle ne fut pas ma surprise quand je le reconnus. Mon père se tenait là-bas et avait laissé tomber ses sacs au sol, d’ailleurs l’une de ses mandarines s’était échappée de son sac et avait sûrement roulé tout en bas de la côte à l’heure qu’il était. Je n’osai plus bouger un seul de mes membres. On aurait pu m’exposer dans un musée tellement je m’étais figé sur place. Matt tout aussi paniqué que moi jetai des regards effrayés dans ma direction et en direction de mon père. Il ne savait pas non plus quoi dire ni faire. Mon père tourna les talons sans nous adresser un seul mot et descendit la côte un peu maladroitement. Je le savais il était choqué. Je pris une grande inspiration et me levai, les jambes tremblotantes. Je pensais m’être préparé à le leur annoncer mais le gouffre était immense par rapport à mon espérance et la dure réalité qui venait de me sauter au visage. Matt posa sa main sur mon épaule comme pour me rassurer mais je voyais bien qu’il n’arrivait pas à gérer ses tremblements. Faut dire qu’avec le passé qu’il se traînait difficile de réagir autrement. Je pris alors mon courage à deux mains et serrai la main de Matt.

« Tout va bien se passer, le rassurai-je. »

Mais moi-même n’en étais pas convaincu.


Matt

Debout dans le salon, je regardai d’un air angoissé le père d’Alex qui était prêt à exploser à tout moment. Il était entré dans la salon suivi de sa femme et avait un air terrifiant sur le visage. Normal, me dis-je pour moi-même. Il venait de voir son unique garçon en embrasser un autre. Sa mère, pourtant calme habituellement, nous jetait des regards tristes et semblait au bord des larmes. Plus le temps passait, moins mes jambes ne me tenaient. J’avais peine à respirer. Et si son père réagissait de la même manière que le mien ? Ma panique devait se lire sur mon visage car Alex attrapa ma main et la serra très fort comme pour me dire que tout allait bien se passer. Je me détestai pour mon comportement alors qu’Alex était le principal concerné. Lui aussi devait se sentir mal dans cette situation. Lui aussi devait trembler et être attristé du comportement de ses parents. Lui aussi devait être terrifié qu’il puisse être rejeté uniquement pour sa sexualité. Je pris alors sur moi et m’armai un tout petit peu de courage. Je me devais de le soutenir et non l’inverse. Les battements de mon coeur ralentirent et je pris une grande inspiration pour me calmer. Je serrai alors la main que me tenait Alex pour le rassurer à mon tour et lui faire comprendre que j’allais l’épauler dans cette terrible épreuve. Notre petit échange n’échappa pas à son père qui siffla entre ses dents. Sa mère essaya de le calmer mais elle devait aussi prendre sur elle même car elle fondit encore plus en larmes. Alex ne bougeait pas, il fixait atterré le comportement de ses parents. Ne tenant plus, il rompit en premier le silence étouffant de la pièce.

« Je ne pensais pas que vous réagiriez ainsi… dit-il d’une voix tremblante.

Sa mère faillit s’étouffer et son père lui lança un regard noir.

— Et tu veux qu’on réagisse comment ? se mit à fulminer son père.

Sous le coup de la colère de son père, Alex recula d’un pas mais se reprit d’un coup. Il soutint le regard de son père mais je savais qu’il avait envie de s’enfuir à toutes jambes.

— Et Juliette ? demanda sa mère d’une faible voix.

— Quoi Juliette ? demanda Alex d’un ton peu rassuré.

— Tu ne l’aimais pas ? demanda-t-elle inquiète.

Alex s’étrangla. Il chercha bien ses mots avant de répondre.

— Je l’aimais oui, je l’aime toujours mais comme une soeur. Avec Matt ce n’est pas pareil, ce n’est pas de l’amitié mais de l’amour.

Son père toussa sans se retenir et sa mère se raidit sur place.

— Mon chéri, commença-t-elle, nous voulons ce qui est le mieux pour toi tu sais ? dit-elle d’une petite voix aigüe. Elle fit une pause. Es-tu certain que tu ne le regretteras pas ? lui demanda-t-elle sérieusement sans crier garde.

Nous faillîmes tous tomber sous la surprise. Son mari se retourna brusquement vers elle pour contester mais ne put décrocher un seul mot devant le regard soutenu qu’elle arborait sans défaillance. Alex fondit en larmes et c’est à travers un rideau de larme qu’il lui répondit.

— C’est tout le contraire plutôt. J’ai découvert que je ne pouvais pas vivre sans lui annonça-t-il avec sérieux dans la voix.

Je faillis m’étrangler et rougir sous le coup de l’émotion. Sa mère me regarda avec insistance et reposa ses yeux sur son fils puis de nouveau sur moi.

— Matt tu veux bien nous laisser s’il te plaît ? » me demanda-t-elle d’une voix douce.

Mes yeux rencontrèrent ceux d’Alex qui me chuchota d’aller l’attendre dans sa chambre. Je quittai alors la pièce les laissant seuls pour discuter et croisai Anya recroquevillée dans la cage d’escalier. Elle semblait apeurée et se raidit quand je m’approchai alors d’elle. Elle hésita puis se jeta sur moi. Cette situation devait la terrifier surtout qu’on ne lui avait rien expliqué et qu’elle avait été congédiée dans sa chambre suite à la colère de son père. Je lui fis signe de me suivre et nous entrâmes tranquillement dans la chambre d’Alex.

***

Je n’arrivai pas à me reposer tellement j’étais inquiet de la tournure de la conversation entre Alex et ses parents. Anya, épuisée, s’était endormie la tête sur mes genoux. J’entendis des bruits de pas et la tête d’Alex apparut dans l’entrebâillement de la porte.

« Tu me trompes ? demanda-t-il sur la rigolade.

— Je ne pense pas que tes parents apprécieront cette tromperie, répondis-je amusé.

Toute la pression s’évanouit quand je vis un grand sourire sur son visage. Bien que la situation au salon avait été étouffante, Alex semblait détendu et heureux à ce moment précis. Il s’assit à côté de moi et déposa un baiser de chasteté sur mon front tout en relevant ma frange qui me cachait la moitié de mon visage.

— Alors ? demandai-je tout de même inquiet.

Il posa son front contre le mien et se mit à rire.

— Ils ont compris que je ne pouvais pas vivre sans toi, dit-il amusé.

Mes yeux s’empourprèrent sous le coup de l’émotion.

— Il va leur falloir du temps pour être à l’aise avec cette idée mais ils nous encouragent de tout coeur. On a beaucoup parlé de mes sentiments, des difficultés que l’on allait rencontrer face aux curieux et mon père s’est lamenté ne pas pouvoir être grand-père, termina-t-il en riant aux éclats.

Je ne savais pas d’où venait l’oppression que je ressentais au fond de la poitrine mais bizarrement je pouvais tout de même rire. J’avais du mal tout de même à comprendre comment des parents aient pu accepter aussi vite la relation homosexuelle de leur fils. C’était quelque chose que je ne comprenais pas et qui arriverait sans doute jamais avec mon propre parent. Alex remarqua mon inquiétude car il déposa un baiser sur mes lèvres en me caressant la tête tendrement.

— Tu penses à ton père, n’est-ce pas ? me demanda-t-il inquiet.

J’acquiesçai tristement.

— Il n’a jamais compris et ne voudra jamais l’accepter, répondis-je amèrement.

— On le fera changer petit à petit Matt, du moins je serais là pour t’épauler, tu ne seras plus jamais seul. »

Les larmes me montèrent aux yeux et je pleurai alors comme un petit enfant niché dans ses bras.

***

Je n’avais pas dormi de la nuit mais ma nuit n’avait pas été perdue pour autant. Bien que ses parents nous l’avaient interdit, Alex s’était tout de même glissé dans la chambre d’amis et avait montré son indignation face à la décision précipitée de ses parents. Pour ma part, j’avais compris que bien qu’ils acceptaient notre relation, ils ne pouvaient pas encore accepter que leur fils dorme dans le même lit qu’un autre homme. Il leur fallait du temps. J’avais essayé de le raisonner mais en vain, il ne voulait rien lâcher. C’est donc avec plaisir que je lui laissai une petite place dans le lit. La journée avait été vraiment épuisante pour Alex qui s’était endormi sans demander son reste, enroulé autour de moi. Je l’avais donc observé toute la nuit tout en prévoyant les réactions possible de mon père lorsque nous serions devant lui. Aucune ne me semblait sans danger mais tout au fond de moi je le savais, je devais l’affronter et le lui faire comprendre ma décision, c’était ma vie et non la sienne et ça, Alex était celui qui me l’avait fait comprendre et je lui en étais vraiment reconnaissant.

Je regardai avec bonheur son visage endormi et m’amusai avec un de ses petits cheveux qui pendait sur son front. Je ne pouvais détourner mon regard dans une telle situation et je priai au fond de moi de pouvoir de nouveau contempler son magnifique visage endormi. Soudain, une main me cacha les yeux et me détourna de ma petite activité matinale.

« Qu’est-ce que tu fais ? me demanda Alex gêné par mon regard rempli d’insistance et de passion.

— Rien, lui répondis-je amusé.

Il lui était rare de me dévoiler une telle expression. Je dégageai doucement sa main de devant mon visage et penchai mon visage proche du sien. Il recula sa tête avec embarras mais revint à l’attaque sans prévenir. Il posa ses lèvres sur les miennes pour me dire bonjour. Malgré ma confiance, je rougis de plaisir et m’abandonnai à lui. Après quelques caresses affectionnées, nous nous séparâmes et allâmes à la douche.

***

Etrangement, je fus encore gêné de rencontrer sa mère quand nous la croisâmes tous les deux sortis de la chambre d’amis main dans la main en amoureux. Elle nous avait observés choquée mais s’était vite reprise pour ne pas nous froisser. Alex avait fait la moue mais il comprenait qu’elle ne puisse pas aborder un regard neutre après avoir découvert la veille l’orientation sexuelle de son fils.

10H – Après avoir adressé un au revoir à ses parents qui m’avaient assuré accepter notre relation, nous prîmes la direction de mon domicile. Les parents d’Alex ne connaissaient pas ma situation mais ils semblaient se douter de la tension qui régnait entre mon père et moi. Tout le long du chemin, Alex avait essayé de me rassurer de me faire penser à autre chose mais rien n’y faisait. Plus on approchait et plus je tremblais et me décomposais. La rue de la résidence m’avait quasiment achevé et j’eus peine à tenir debout sans l’aide d’Alex. C’est donc avec difficultés que nous atteignîmes le palier de mon appartement. Je pris une énorme inspiration et tournai alors la clé dans la serrure. J’entrai dans l’appartement suivi d’Alex et la porte se referma derrière nous.

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