La soirée arrive bientôt et le repas familial me semble passer aussi vite qu’une étoile filante dans le ciel. Je monte à l’étage le premier, je m’allonge sur mon lit et me mets à réfléchir aux derniers événements.

D’avoir revu Romain m’a fait beaucoup de bien et même si j’avoue me rappeler la période où j’étais enfermé, cela me paraît bien loin. Le fait qu’on a parlé de sexualité et notamment sa certitude sur son homosexualité, m’amène à me demander ce qu’il en est vraiment pour moi.

D’office, je sais que je suis plus attiré par les filles ; je n’ai aucun doute sur le fait que l’excitation est bien plus grande pour moi. Malgré cette certitude, si un garçon venait à me proposer quelque chose, serais-je tenté ou pas ?

Il m’est très difficile de répondre fermement à cette question, notamment car tout dépendrait de qui et quoi. Dans le quoi j’avoue avoir soudain certaines appréhensions sur certaine partie arrière de mon anatomie...J’ai entendu dire que cela pouvait être douloureux.

En y réfléchissant, je me dis que si mon excitation est plus grande, ce n’est pas pour rien et qu’il me faut peut-être renoncer à ma curiosité. Une idée me vient : j’ai probablement raison de me focaliser sur ma préférence et calmer ainsi les avances des nombreux gays, bisexuels et incertains qui m’entourent.

Tout en me disant cela, je me mets à les compter : Erwan, Romain, Jean, Philippe, Alan, Thibault, en bref presque tous mes amis, mes frères et sœurs. Puis il y Amandine même si pour le coup c’est plus intéressant à mon goût. Je réalise qu’ils sont nombreux et que je me demande si cette “curiosité” n’est pas humaine et naturelle en définitive.

En fin de compte, je suis intimement convaincu que certaines personnes n’ont aucun doute sur leurs sexualité ou qu’elles n’ont pas envie d’en avoir. Je me souviens de plusieurs discussions avec des garçons de ma classe ; ils m’ont clairement dit que les garçons ne les intéressaient pas du tout. Je ne sais plus comment on était arrivé à parler de ce sujet mais je sais aussi que j'avais été du même avis à l’époque.

Je me demande si j’oserais dire la vérité à quelqu’un s'il venait à me poser la question aujourd’hui. Je sais que je me suis confié à Erwan mais je ne pense pas que je le ferai plus publiquement. Je sais que c’est un sujet un peu gênant pour certains, je ne me sens d’ailleurs pas tout à fait à l’aise d'en parler.

Je reste affalé sur mon lit sans rien faire d’autre que de m'interroger sur moi-même et la vision que d’autres pourraient avoir de moi. Je suis de plus en plus convaincu que mon expérience a été bonne mais, comme mon meilleur ami Thibaut, je suis plutôt attiré par les filles.

J’aimerais aussi beaucoup lui en parler maintenant ; malheureusement, je n’ai pas son numéro de téléphone et il habite trop loin de chez moi désormais. Son père étant souvent contraint à la mobilité, il se pourrait qu'il soit encore parti loin. J’espère avoir des nouvelles bientôt.