Esquinté
C’est le vendredi qu’on voit enfin revenir notre ami Charlie. Il est esquinté, c’est visible. Il a encore les marques des coups qu’il a reçus au visage, un bras en écharpe et probablement moultes contusions sur tout le corps.
Notre groupe se reforme bientôt autour de lui et parfois certains autres élèves de la classe viennent lui poser des questions et prendre des nouvelles. Très vite on en sait un peu plus et, outre un bras cassé suite à une mauvaise chute liée à un coup de poing, ses blessures ne sont pas trop graves.
Bientôt le sujet des “auteurs” est abordé et il est formel : il les a vus “de bien trop près” et les a tous décrits aux policiers qui l’ont interrogé. Il semblerait que ce soient des voyous bien connus d’une cité mal fréquentée dans le coin.
Charlie nous apprend que la cité en question est une cité particulièrement “sensible” et qu’il semble difficile voire impossible d’y intervenir y compris par les autorités compétentes. J’ai déjà entendu parler de ce genre de problèmes et de difficultés. Ceci étant, je suis très surpris d’apprendre qu’une d’entre elles n’est qu'à quelques kilomètres de notre établissement.
Selon Charlie, les auteurs seraient d’anciens élèves exclus définitivement de l’établissement à cause de leurs comportements. Ils chercheraient visiblement à se venger de leur exclusion. Si la théorie est correcte, je trouve juste dommage qu’ils s’en prennent aux élèves pour cela.
Une idée m'effleure l'esprit : je réalise qu'il est plus que probable de ne jamais récupérer mon slip. Non pas que j’y tienne particulièrement mais ce sont deux sous-vêtements en moins. J'ai bien fait d’en commander de nouveaux. Je réalise également que je n’ai pas parlé de cet “incident” à ma famille : j'aurais pu mais en réalité cela n'aurait probablement rien changé à la situation.
Je profite de l’occasion pour rappeler la consigne de la directrice à mon groupe de se manifester s'ils ont été victime de vols eux aussi. Tous affirment y être allés soit auprès des professeurs de sport, soit aux “pions”. Charlie, lui, a eu un traitement plus particulier vu que se sont directement les policiers qui ont recueilli son témoignage.
Durant le cours, je suis assis à côté de lui, essayant tant bien que mal de l’aider à rattraper les trois semaines qu’il a manquées. Évidemment, on dérive sur ses malheurs et il m’apprend que, contrairement aux bruits qui courent, il n’est pas sorti uniquement vêtu de son maillot mais qu’il s’est fait “dépouiller” du reste par les brutes qui l'ont malmené.
Aussi surprenant que ça puisse paraitre, Charlie s’estime chanceux, déjà parce qu' apparemment les jeunes voulaient le mettre totalement à poil et que les professeurs les ont mis en fuite juste à temps mais aussi parce qu'il n’a eu que des contusions, les jeunes n’avaient pas d’armes sur eux. Je n’y avais pas pensé un seul instant mais il est vrai que même un simple couteau aurait pu avoir des répercussions bien plus dramatiques.
Je comprends son point de vue mais j’avoue que je suis assez étonné par le fait qu’il soit aussi positif. Après le cours, il nous avoue la triste vérité : ce n’est pas la première fois qu’il est malmené et il nous montre une belle entaille de couteau dans l’abdomen. Visiblement, il est souvent face aux ennuis. Pour éviter les problèmes, je me dis qu’il vaut mieux ne pas trop traîner avec lui en dehors de l’établissement.
Malgré tout ça, dans le petit groupe, on est tous heureux de retrouver notre Charlie qui n'était, en fait, pas "caché"si loin de nous. Tous on espère aussi qu’il va vite se remettre complètement et on lui propose notre aide pour le rattrapage des cours. Il semble apprécier et nous demande juste nos cours dans un premier temps. Chacun d’entre nous lui passe ses notes. Pour ma part, je lui confie mon classeur de mathématiques.
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