Partie 3 : Menace

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  Plus une once d’énergie ne fut perceptible. Lune qui avait maintenu ses doigts contre la poitrine d’Emo comprit. Ses yeux blancs s’étaient ternis d’un gris cadavérique. Il était mort, emportant avec lui des mystères qui le resteraient au regard des maigres indices concédés. Les jumeaux restèrent impassibles, essayant de déchiffrer et d’imprégner à jamais les pauvres informations recueillies.

  • C’est fini, dit Mars.
  • Non ça ne l’est malheureusement pas, rétorqua Lune avec dépit.

Son frère la dévisagea. Elle n’avait rien dit, mais elle avait senti une puissante essence s’approcher de leur position. Ils étaient au bord de l’épuisement alors à quoi bon tergiverser ou s’échapper. Lune avait peu de doutes sur l’identité de cette énergie qui était grandiose. Ses effluves lui rappelaient quelque chose mais elle ne savait pour quelle raison.

  • Un Atlant s’approche.

Mars avait entendu. Mais tout comme sa jumelle il ne montra pas de prompte réaction. Si leur destin devait s'arrêter ici alors il l’accepterait. Il n’avait plus la force de combattre. C’était eux après tout qui les avaient pourchassés.

Lune retira sa main de la poitrine d’Emo et se tourna en direction de ce qu’elle pressentait. Elle s’assit en tailleur avec décontraction et ferma sa paupière. Toute occasion pour une méditation évanescente était bonne à prendre. Qui plus était s' il s’agissait de la dernière. Elle ne se fit donc pas prier même si dans son état la performance serait en deçà de ses capacités. Son frère, lui, resta debout dans une posture attentive, les bras croisés, tout en s’orientant dans le même sens que sa jumelle.

Ils étaient tous les deux sereins. Il y avait deux corps inertes à leurs côtés, dont l’appartenance ethnique n’était pas à prouver, et ils attendaient leur destinée avec une apparente légèreté.

Le temps resta suspendu. L’invisible tension s’intensifiait et Lune fut déstabilisée par la pression qui s’abattait sur leurs corps affaiblis. Mars, qui n’avait pas la perception de sa sœur, ressentit cette lourdeur.

L’Atlant qui se dévoila d'entre les arbres s’avançait avec lenteur. L’austérité palpable qu’il dégageait était à l’image de la résolution sans faille de son peuple. Il affichait pourtant quelques distinctions. Le teint de sa peau, qui n’était pas bleu pastel, mais qui tendait vers le persan, arborait des lignes éclaircies sur l'ensemble de son corps tels des tatouages. Ces tracés démarraient au niveau de sa nuque glabre et se prolongeaient le long de ses épaules, de son dos et de ses membres pour finir leur course jusqu’aux faces dorsales de ses extrémités palmées.

Il progressait. Le poids sur les épaules de Mars s’accentuait. Lune était de plus en plus perturbait par la contrainte subie de cette lourde énergie et renonça à sa transe spirituelle. Ce fut lorsque l’Atlant se trouva à quelques pas seulement que la mémoire lui revint. Sa pupille frissonna et reconnut sans doute possible Amnar, la première créature des profondeurs qui lui eut été donnée de rencontrer dans son enfance. Celle qui lui avait fait découvrir le froid sournois de la peur. Celle qui avait montré pour la première fois une hostilité naissante à l’égard des siens. Si la crainte ne lui était plus familière, elle ne put retenir un rictus à la reconnaissance de cet être des profondeurs.

Amnar s'accroupit aux côtés de son congénère que les jumeaux avaient vaincu. Il plaça sa main palmée sur son visage blême. Il se redressa et s’avança ensuite vers Mars, Lune et le corps d’Emo. Il sembla désintéressé par la présence des deux Oraï, les contourna et entreprit la même cérémonie à son autre camarade défunt. Il se trouvait tout proche des jumeaux qui étaient cloués sur place par la pesanteur spirituelle qui les contraignait. Ils le toisèrent tout le long de sa prestation.

Alors que Mars et Lune étaient hébétés, il se redressa avec légèreté pour se tourner vers eux. Il les contempla. Lune était restée en tailleur, le regard franc, le corps frémissant. Mars avait l’ensemble de ses muscles contractés et devait lutter pour rester debout. Il les dominait quand eux étaient prostrés de vertiges.

Une chose étrange se déroula, ou bien était-ce une vue d’esprits fatigués, mais les jumeaux perçurent un plissement sur l’interminable front d’Amnar. Il se détourna et repartit en direction de là où il était apparu.

  • Amnar, osa interloquer Lune qui luttait contre l’épuisement.

Il s’arrêta, le dos tourné aux deux jumeaux.

  • Amnar, répéta Lune, maître des profondeurs et guide ancestral, répondez-nous. Pourquoi ? Pourquoi cette guerre ?

L’Atlant retourna sa face inexpressive pour répondre d’une voix basse et caverneuse :

  • Nécessaire est votre disparition. Prophétie inaltérable. Il reprit sa retraite et ajouta un dernier message sans équivoque : Rencontre prochaine, vous, disparaître.

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