Chapitre 3: Secrets et découverte
— Oh bon sang ! s'écria-t-elle avec embarras.
— Pardon, je, je ne sais pas ce qui m'a pris. Balbutia avec un léger affolement le jeune homme qui passait de l'autre côté du comptoir: Vous voulez utiliser les toilettes ? Je vous y ramène un torchon?
— Nan, ce n'est rien, c'est ma faute. S'exclama-t-elle en s'écartant de la file d'attente.
Camille revenait à la hâte, et posa dramatiquement les mains sur les joues en voyant la boisson et les glaçons s'écoulant sur le sol, rappelant le tableau : Le cri de Edvard Munch.
— Caïn ! s'exclama-t-il en observant le jeune homme avec surprise, sans réel reproche.
— Je suis désolé Camille, je m'en occupe. Il hocha solennellement la tête.
Lorsque le jeune homme passa à ses côtés pour retourner dans la cuisine, le Sénégalais le suivit des yeux avant de regarder la file d'attente, yeux exorbités, et de faire non de la tête en soupirant, faisant rire certains.
— Les jeunes de nos jours ! Ils perdent tous leurs moyens devant une jolie jeune fille !
Elle voulut alors se faire toute petite, quelques clients la regardant en souriant. Elle sentit la chaleur monter à ses joues et l’embarras la submerger alors qu’elle se rendait hâtivement dans les WC féminins, où elle s'enferma avant de retirer son chemisier et de l'essorer dans l'évier:
— Putain... Quelle poisse !
On toqua alors à la porte, et elle remit vivement son chemisier trempé, remarquant au passage et avec embarras qu'il était donc devenu transparent au niveau de sa poitrine et ses côtes:
Mieux vaut être pleine d'eau que de cappuccino...
Elle ouvrit la porte et accueillit le jeune homme qui lui tendait un torchon, un sourire déconcerté sur les lèvres.
Le jeune homme, Caïn, avait de beaux cheveux de jais et ondulés, des yeux cannelle et de subtiles tâches de rousseurs sur le nez et sous les yeux.
Un détail la surprit, lorsqu'il sourit, alors qu'il se dirigeait vers elle, ses canines lui semblèrent légèrement plus longues que la moyenne, rappelant presque un vampire.
Ça la fit rire intérieurement, mais elle ne lui fit pas part de sa remarque, bien que l'ambiance soit tendue...
— Je suis désolé... Dit-il, pantois, regardant honteusement le carrelage d'une propreté presque inquiétante.
— Ne vous inquiétez pas, ça arrive. Elle enlevait les taches de café réticentes de son vêtement alors qu'il s'excusait de nouveau: Je sais que ça n'a pas de rapport mais je ne vous ai jamais vu auparavant au café, vous êtes nouveau? demanda-t-elle.
— Oui, j'y travaille à temps partiel. Dit-il en dressant un faible sourire sur ses lèvres. Si vous n'avez plus besoin de moi, je vais y aller, vous pouvez déposer le torchon sur le comptoir.
— Merci.
Alors qu'il allait partir, ouvrant la porte, Damaris sentit une douleur soudaine se former, un mal de tête presque insupportable qui la fit s'arrêter pour s'accouder aux lavabos.
Lorsqu'elle releva le regard sur les miroirs devant elle, la figure ombragée aux yeux or se tenait derrière elle, dans un coin. Elle comptait dire quelque chose, mais elle se rappela que Caïn était toujours là et détourna le regard de la chose pour le regarder lui. Et à sa grande surprise, l'adolescent fixait intensément la figure humanoïde.
Mais cette dernière ne regardait que l'adolescente, susurrant finalement une phrase qui sembla s'extirper difficilement de ses lèvres inexistantes:
— Va-t'en, ne reste pas ici... Murmura-t-elle, comme inquiétée qu'on puisse l'entendre.
Le son sembla se dédoubler pour atterrir avec vigueur dans ses tympans, ne faisant qu'augmenter ses maux de tête. Puis la créature s'évapora, rappelant les morceaux de feuille d'érable le matin précédent.
Dès que la chose disparut, Caïn accourut vers elle et la soutint alors qu'elle allait s'effondrer.
— Tout va bien ? demanda-t-il d'une voix anormalement posée.
Elle était incapable de prononcer quoi que ce soit, la douleur pulsant avec son sang dans tout son crâne et l'empêchant de raisonner ou de se maitriser, son corps semblait mou et sa tête trop lourde.
Elle avait une envie irréprochable de pleurer, par incompréhension de ce qui lui arrivait, mais elle savait aussi que si elle se laissait se lamenter, sa souffrance ne ferait que se démultiplier.
Damaris aurait pensé qu'elle était folle, si Caïn n'avait pas regardé la créature et si Mme Beaumont n'arrêtait pas de lui demander avec une telle insistance si elle avait "fait des rêves étranges ces derniers temps".
Comprenant la situation, le jeune homme l'installa dans un coin des toilettes, l'adossant à une porte, il lui promis de revenir avant de courir hors des toilettes.
Damaris, vaseuse, ferma les yeux et prit de grandes inspirations jusqu'à ce qu'elle soit calme, ne réalisant pas qu'elle s'endormait.
Mais lorsqu'elle sentit la fraîcheur d'une serviette imbibée d'eau sur son front, elle empoigna brusquement les poignets qui le portait à sa tête, se sentant menacée.
Caïn, embarrassé, avait haussé un sourcil et gloussait intérieurement, ses épaules se soulevant quelques fois.
Elle n'eut pas même la force de s'excuser et lâcha les bras de l'individu, un peu inquiétée de son attitude défensive. Une dizaine de minutes plus tard, elle se sentait bien à nouveau, Camille lui ayant apporté un verre d'eau fraîche qui la soulagea instantanément. Une fois sur pieds, elle remercia chaleureusement les deux hommes et s'assit à une table ronde en bambou.
Camille, quant à lui, s'était posé en face d'elle, l'observant avec cette insistance protectrice d'un parent. Après lui avoir servi un nouveau capuccino, un jus d'orange et un sandwich au thon, le responsable partit en cuisine se préparer pour l'après-midi alors que Caïn s'installait à sa place à table:
— Tu es donc Damaris ! Camille n'a d'yeux que pour toi et Hélia !
Damaris trouva son changement d'humeur glacial.
Presque comme s'il s'efforçait d'être une autre personne au travail, et ça la chagrina de le voir devoir endosser un rôle timide alors qu'il avait l'air d'un jeune homme plein d'énergie et de soif de savoir.
— Enchanté de faire ta connaissance, je suis Caïn. Je ne mords pas, je t'assure. Il fit un clin d’œil en dévoilant sa dentition.
— Je n'en doute pas.
Son sourire s'agrandit. À part, on entendit Camille:
— Foutue machine !
Caïn se retourna vivement:
— Besoin d'aide ? demanda-t-il à son patron.
— Nan! Je vais lui faire voir qui est le chef ici! répondit celui-ci.
Les deux adolescents gloussèrent brièvement. Alors qu'elle venait à peine de finir de manger, un homme entra dans le café, et elle se fit la remarque qu'étrangement, ce jeune homme ressemblait au lycéen en sweatshirt qu'elle avait vu il y a quelques dizaines de minutes.
Damaris sentit l'urgence pour elle de s'en aller, sa poitrine se compressant et sa mâchoire se crispant. L’adolescente récupéra donc les restes de son verre de jus d'orange qu'elle avait à peine entamé.
Elle ne sût pas d'où cette intuition lui venait, mais la jeune fille se leva rapidement pour se diriger vers la sortie.
Au même moment, le lycéen la fit chanceler et son verre de jus d'orange faillit rencontrer la main de l'inconnu.
Elle s'excusa de l’avoir bousculé et observa minutieusement son verre avant de le jeter.
Une impression de suffoquer, la sensation que ses organes se contractaient l'avait prise dans le petit restaurant, elle était heureuse que ce ressenti désagréable se fût dissipé.
La jeune fille tourna une dernière fois la tête et observa avec une légère inquiétude le jeune homme, appuyé contre le mur du café.
Damaris se rendit à son lycée la boule au ventre, sans avoir mangé son sandwich tant ces évènements l'avaient secouée, et passa son après-midi à travailler.
Le lendemain, Vendredi, lorsque la sonnerie retentit, elle se rua hors du lycée et il faisait déjà nuit. Une pluie fine et très peu désagréable commençait à tomber et une brise légère se leva.
Les rues, à cette heure-ci, étaient déjà presque complètement vides.
Elle avança sereinement dans un petit parc qu'il lui fallait traverser afin de se retrouver en centre-ville. Les lumières faibles et la légère brume sur les arbres défeuillés rendaient le paysage digne d'un film d'horreur. L'adolescente en gloussa intérieurement bien qu'avec un soupçon de nervosité et continua d'avancer. Une figure se discerna dans la brume, en face d'elle.
La jeune fille pensa ironiquement à une scène de film où la personne en face d'elle serait un tueur en série qui tenterait inlassablement de la tuer.
Mais elle ne ria pas longuement, car un détail attira son attention alors qu'elle et la personne se rapprochaient l'un de l'autre: Celle-ci avait sur l'épaule une masse difficilement reconnaissable. Plus la distance entre eux se comblait, plus la confusion l'emportait.
Elle pensa qu'il s'agissait d'un oiseau, mais dès qu'elle fut sur le point d'interpeller l'homme, effrayée et troublée, le volatile déploya ses ailes et fonça sur la jeune fille, le rapace visiblement sous la commande de l'individu.
Un animal guide, comme ceux dont Mme Beaumont m’a parlé ?
Les serres de ce qu'était en réalité un aigle éraflèrent sa joue. Elle cria avec surprise et effroi et tomba à terre avant de poser une main tremblante sur son visage, observant quelques gouttes de sang quelques secondes avant que l'oiseau n'attaque à nouveau.
Après quoi l'aigle poussa un cri et s'effondra sur la neige, désorienté.
Une main attrapa son aisselle et la souleva avec ferveur.
Elle se retourna et observa Caïn, sérieux, fixant l'individu en face d'eux. Lorsqu'il comprit qu'elle le regardait, un semblant de sourire s'esquissa sur ses lèvres fines, tandis qu'elle, cependant, ne se sentait pas rassurée en sa compagnie.
L'individu contrôlait la santé de son aigle avec prudence. Damaris, interdite, réalisa soudainement que l'accoutrement du jeune homme était quelque peu original.
En effet, il se comportait d'un uniforme scolaire, rare en France, et d'autant plus à Llyne qui ne comportait qu'une école, que Damaris connaissait bien.
De plus, il semblait trop grand pour être un lycéen. Son visage restait indiscernable dû à la faible luminosité et une capuche couvrant son crâne, rappelant l'adolescent qu'elle avait vu précédemment au lycée et au café.
Caïn détacha sa main de l'épaule de Damaris - à son grand soulagement - pour se concentrer sur son agresseur :
— Qui es-tu ? quémanda-t-il froidement.
— Qu'est-ce que cela changera ? la voix de l'Homme était grave et grésillante, comme s'il ne s'agissait pas de sa vraie voix.
— Ça me permet de savoir si je dois te tuer ou non.
— Ha! Essaie donc.
Damaris sentit une bouffée de chaleur la submerger aux mots de Caïn , il s'agissait d'une menace. Pour le dissuader...
...N'est-ce pas ? Il ne peut pas être sérieux, hein?
L'aigle se trouvait à nouveau sur l'épaule de son maître, observant les alentours dignement.
— Tu es une Strongash, non? demanda la personne.
— Qu'est-ce que vous me voulez? répondit-elle vivement.
— Oh, pauvre de toi, tu n'en as aucune idée. L’Homme feint le chagrin.
— Laissez-la tranquille. Partez et nous ferons en sorte que cet incident ne soit pas reporté à votre institution, ça me parait bien, non ?
— Honte à toi, Quitamaïs, tu déshonores les tiens en protégeant la fille.
Il y eut un court silence, puis l'Homme sembla se volatiliser dans la brume, un peu à la manière de l'ombre dans son rêve.
Damaris se retourna et ouvrit la bouche, pleine de questionnements, mais Caïn n'était plus là.
Elle était seule, dans ce parc, un peu comme si ce qu'il venait d'arriver n'était qu'une hallucination.
Elle continua de marcher sur le chemin, bouleversée, après avoir palpé sa joue brûlante et mutilée.
Il était déjà 18 heure et demie. Elle se demanda s'il était réellement bon qu'elle retienne son entretien avec Hélia à la librairie. Finalement, elle s'y rendit, convaincue que ça lui serait bénéfique et lui permettrai d'exposer ses peurs à sa meilleure amie.
La porte s'ouvrit, et s'engouffra avec elle une nuée de petits flocons et de froid. Il était dix-neuf heures moins vingt-quatre.
A cette heure-ci, il y avait principalement des adolescents travaillant silencieusement.
L'entrée menait au bureau du secrétaire, qui imposait de vérifier les sacs avant et après avoir pénétré la librairie.
Aux côtés du secrétaire au teint blafard se trouvait une vieille femme, la mine découragée, qui hochait frénétiquement la tête après lui.
Le chariot de livres sur lequel elle était appuyée semblait instable, sous ses mains flageolantes.
A la vue de Damaris, elle reprit appui sur le manche et s'éclipsa après l'avoir dévisagée, comme si elle la fusillait du regard pour avoir interrompu leur moment ensemble.
Le secrétaire se raidit et attendit, Il avait l'air épuisé, ou ennuyé.
Damaris avança vers ce dernier, à sa droite et à sa gauche se trouvaient deux ouvertures dont les côtés comportaient des portiques de sécurité, laissant entrevoir une grande salle de repos.
Elle n'y fit pas très attention et présenta sa carte d'identité et son sac à dos. Le secrétaire hocha la tête et lui affirma qu'elle pouvait entrer, tout en l'observant marcher jusqu'aux portiques, déstabilisée par sa blessure insolite.
La librairie était calme, le silence rompu par quelques chuchotements succincts. La vaste allée laissait raisonner les pas de Damaris de telle manière à ce qu'ils semblent venir de tout autour d'elle.
Finalement se dévoila devant elle le salon, où se trouvaient principalement des canapés, fauteuils et quelques tables organisés autour d'une grande cheminée.
Les murs étaient décorés de peintures, aussi bien réalisées par de grands peintres que des enfants.
Quelques étudiants lisaient au coin du feu, d'autres étudiaient dans des positions qui semblaient plutôt inconfortables.
L'adolescente détourna le regard et continua d'avancer jusqu'à arriver à la seconde partie de la librairie, où se concentraient les étagères et rangées de livres ainsi que les bureaux et espaces de travails, organisés en plusieurs cercles.
Les rangées de livres se situaient vers l'extérieur de l'immense cercle, et les bureaux étaient regroupés en petits arcs autour de l'allée centrale, rappelant le Colisée. Elle continua d'avancer et jeta de brefs regards aux lecteurs et travailleurs, trop concentrés sur leur travail pour la remarquer.
Ne trouvant pas Hélia, elle décida de marcher jusqu'à la dernière portion de la librairie: la cafétéria.
Ici, les tables étaient presque toutes vides. Un homme fredonnait derrière le bar, nettoyant son plan de travail.
Il aperçut Damaris, qui lui sourit nerveusement. Il lui répondit par un bref sourire désintéressé.
Hélia ne semblait pas être là.
Elle commença à rebrousser chemin, prête à rentrer au foyer, quand une voix efféminée chuchota:
— Damaris?
Elle se retourna vivement mais personne ne se trouvait là. La jeune fille regarda aux alentours, et une personne se discerna dans la librairie:
C'était Hélia.
Rassurée, elle se dirigea vers celle-ci calmement, avant de devoir la poursuivre dans toute la cafétéria jusqu'à ce qu'elles se trouvent dans un des rayons du cercle où se trouvaient la plupart des livres.
— Hey! cria-t-elle doucement de peur de se faire remarquer.
Bien qu'elle le disait avec amusement, une part d'elle avait peur qu'elle disparaisse. Finalement, dans sa course effrénée, elle heurta quelque chose et tomba à la renverse.
Elle se releva avec difficulté, vacillante. Un bras l'attrapa sous le coude.
— Est-ce que ça va ? Caïn se trouvait devant elle.
Elle le repoussa et regarda vivement derrière lui, Hélia avait disparu.
— Toi ! s'exclama-t-elle en plissant les yeux alors qu'il haussait un sourcil, où est-elle passée !? demanda-t-elle promptement.
— Du calme ! Elle n'est plus là. C'était une illusion.
— Quoi? elle fronça les sourcils de façon menaçante, Mais je l'ai vue, elle vient de passer ! Je la poursuivais !
— Hélia n'est pas là. Répondit Caïn avec sérénité. Il attrapa calmement Damaris par les épaules: Elle n'est pas là, maintenant viens avec moi.
— Mais… Comment connais-tu Hélia ? demanda-t-elle avec méfiance, les sourcils froncés.
Confuse, elle pensa d'abord exiger des réponses, mais préféra finalement suivre l'adolescent, déçue de voir son amie volatilisée.
Celui-ci se dirigea vers une allée plus sombre remplie de livres. L'allée H pour Histoire. Elle l'empoigna brusquement quelques secondes plus tard. Il se retourna et la regarda avec confusion:
— Qu'y a-t-il ?
— Ce soir... Tout à l'heure, dans le parc.
Elle pensa inutile d'ajouter quoi que ce soit et relâcha le bras de Caïn.
— Mais encore?
— Comment... Enfin, comment… Que s'est-il passé au juste ?
Caïn lui lança un regard qu'elle trouva offensant, comme s'il s'adressait à quelqu'un de fou, mesurant ses mots de peur de la renfrogner.
— Enfin, tu t'en rappelles non? De quoi te rappelles-tu, dis-moi ?
— Ne me prend pas pour une imbécile! son ton monta, mais ce n'était pas plus avec colère qu'avec peur.
— Je ne dis pas cela. Il leva les sourcils avec surprise.
— Tu étais là quand cette personne ... Son oiseau m'a attaqué et tu étais là. Tu m'as même protégée... Comment m'as-tu trouvé !?
— Mais, quelle question. Il pouffa avec surprise. J'ai utilisé un sort de trace. C'est aussi simple que ça.
Cette fois, c'est Damaris qui prenait l'air prudent d'une personne parlant à un fou.
— Nous devrions aller nous assoir... répliqua-t-elle en entrainant vers elle son compagnon.
Puis, quelque chose lui vint soudainement à l'esprit : une remarque qu'elle aurait dû se faire plus tôt.
Les lumières sont éteintes, et j'ai l'impression que l'on marche dans cette petite allée depuis de longues minutes...
Elle se libéra de la poigne délicate de Caïn et marcha vers la sortie de l'allée. Finalement, un brin de lumière se discerna et elle se rendit compte avec soulagement qu'il y avait toujours de la lumière dans le salon.
Cependant, il semblait qu'il n'y avait plus personne. Damaris sortit complètement de l'allée et observa ses alentours. C'était vide. La lumière du salon était en réalité celle de la cheminée.
— C....Caïn?
— Hm?
— Quelle heure est-il ?
Quelques secondes passèrent avant qu'il n'émerge de derrière elle, téléphone en main.
— 21 heures.
Elle pâlit, certaine qu'elle était arrivée à dix-neuf heures vingt. Impossible qu'elle y soit depuis plus de trente minutes.
— Dis-moi Damaris. Que t'a-dit Hélia depuis qu'elle est revenue, au juste?
— Je... On aurait dit qu'elle avait cessé de fonctionner proprement, elle s'était figée, bouche-bée, elle ne trouvait rien à répondre.
— Si je te dis Shanix, ça te dit quelque chose?
— ... Elle réfléchit un moment sans trouver quoi que ce soit y correspondant.
— Oh... Rien du tout alors... Elle n'a sûrement pas eu le temps. Il expira avec ennui.
— Comment ça ? Tu te rends compte que la librairie est fermée et qu'on est bloqués ici ?! Rétorqua Damaris en haussant le ton.
— Je comprend mieux ton inquiétude. Il gloussa.
Un moment de silence fut rompu par un bruit provenant de la cafétéria. Les deux adolescents échangèrent un regard inquiet et le jeune homme se dirigea vers la provenance du bruit à pas de loup.
Damaris le suivit avec prudence.
— Qui est là ? demanda-t-il d'une voix grave.
Sa voix s'adoucit et son visage s'illumina lorsqu'il commença à se diriger vers l'émission de bruit.
— Il était temps ! s'exclama-t-il jovialement.
— En parlant de temps, ça a été difficile de vous rejoindre avec ton sort de tempus ghénimé, avoua Hélia.
Caïn revint vers elle, accompagnée de sa meilleure amie, qui souriait chaleureusement en sa compagnie.
Damaris ouvrit de grands yeux avec surprise:
— Qu'est-ce que...Comment as-tu pu entrer ?!
Caïn lui offrit un sourire tendre et l'invita à aller s'assoir au coin du feu. La soirée commençait à se rafraîchir.
Elle regarda l’adolescent les devancer et agrippa le bras de sa meilleure amie, confuse:
— Qu'est-ce qu'il se passe ? Comment tu le connais, et comment es-tu entrée ? elle baissa son ton, susurrant: Est-ce qu'il est fou ou bien il sait pour…?
Hélia rit aux éclats, et la voix de Caïn parut au loin:
— Laisse-moi deviner, elle te demande si je me suis échappé d'un asile psychiatrique, hein? Je lance les paris ! La prochaine chose qu'elle va te répondre sera sûrement: Mais c'est insensé !
Il pouffa à son tour avant que les deux filles ne se reconcentrent. Dans d'autres circonstances, Damaris aurait taquiné son amie concernant sa grimace moqueuse, mais elle ne se sentait pas d'humeur:
— Sérieusement, j'y comprends rien, explique-moi !
— Doucement Dam, déjà, je pense qu'il faut que tu t'assoies, et que tu te soignes... Ta première blessure cela dit, ça se fête ! rétorqua joyeusement Hélia.
Sur quoi, à son tour, l’adolescente confuse se dirigea vers l'émanation de lumière, qui était en fait la cheminée.
Damaris se retint de pousser un juron, perdue, et finalement céda et rejoignit les deux adolescents, tous deux assis confortablement dans les canapés.
En arrivant vers eux, elle remarqua une masse touffue sur les genoux de Caïn, et ouvrit la bouche pour parler, mais il la coupa:
— Je te présente Maliya! C'est mon animal guide.
Damaris préféra ne pas poser de questions et réagir comme si ce qu'il disait était complètement sensé et habituel.
Dans ses yeux se reflétaient les flammes vives de la cheminée. Le petit animal s'était endormi, et ouvrait les yeux occasionnellement, vérifiant que Damaris ne tentait pas d'approcher son maître.
Hélia, quant à elle, buvait de l'eau en regardant son amie, un grand sourire au coin de ses lèvres malicieuses.
— Je peux avoir des putains de réponses? demanda-t-elle finalement le plus calmement possible, retenant toute sa frustration et confusion.
— Assieds-toi avant tout. Lui proposa Caïn bienveillamment. Je t'assure qu'on te répondra, mais ça va être dur à croire...
Hélia hocha vigoureusement la tête, les yeux exorbités et fixant la lycéenne qui s'exécuta amèrement, regardant à son tour les flammes ardentes dévorer quelques bûches de bois imposantes.
— Hélia et moi, on a étudié ensemble pendant sept années. C'était une école très particulière, et on y enseignait la magie, c’est ça, Shanix, c’est le nom de l’école où on a étudié.
— Un peu comme Brigles. Ajouta sa meilleure amie.
— Ah ! Elle en sait un peu plus que je ne le pensais ! dit Caïn, soulagé.
L'employé sourit, satisfait, avant de continuer son récit:
— La projection que j'ai créée tout à l'heure et qui représentait Hélia, c'est un sort que j'ai appris en... Seconde année je crois?
— Ouais, c'est ça. Confirma la deuxième jeune fille qui fouillait dans son sac à dos.
— Et la personne qui t'a attaquée tout à l'heure, avec son aigle, faisait donc partie d'un clan d'autres magiciens et son volatile, c'était son animal guide. Le mien est Maliya, c'est un Spårrow, et Hélia a Lucky, un Tenelurun.
Damaris laissa sa tête tomber contre le mur derrière elle et pensa rire, exténuée.
Mais elle dirigea rapidement son regard vers Caïn alors qu'un léger éclat apparaissait:
Soudainement, les yeux de l'adolescent, figés dans les flammes, se fixèrent sur sa main qu'il éleva au niveau de son torse, paume vers le ciel.
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