Chapitre 10

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~~Emma~~






J’entrais tout juste à l’université, revêtue d’une robe noire chic et décontractée, mes cheveux lâchés tombant sur mes épaules, accompagnée de mes lunettes de soleil. Nathalie avait réussi à me métamorphoser complètement. Des regards curieux des autres étudiants me suivaient, et au loin, je discernais celui de Loïck, scrutant ma transformation. Eva brillait par son absence, ce qui ne collait pas à ses habitudes. En classe, mon esprit vagabondait. Je désirais voir Nathalie, m’excuser pour le comportement de mon père la veille. Malgré mes messages et appels restés sans réponse, nos regards se croisaient parfois, mais elle feignait de ne pas me voir. À la sortie, je m’approchai rapidement d’elle.

– Salut, Nath.

– Salut, Emma.

– Je suis vraiment désolée pour hier… désolée de m’être endormie et de t’avoir laissé entre les mains de mon père. Pardonne-moi, s’il te plaît, dis-je calmement.

– Oh non, ne t’inquiète pas. C’est plutôt moi qui devrais m’excuser. Je n’aurais pas dû t’embarquer dans mes délires. Ton père cherchait juste à te protéger, et à sa place, j’aurais peut-être fait pareil. Seulement, je cherche à m’excuser auprès de lui. J’ai honte de venir chez toi après tout ce qui s’est passé… pourrais-tu peut-être me donner son numéro pour que je l’appelle et que je m’excuse ?

– Avec plaisir, donne-moi ton téléphone.

– Merci.

– Tu sais, j’ai aussi besoin de mon propre espace, et tu n'as pas à t'excuser pour ce qui s’est passé hier. Je suis adulte maintenant, et mes parents doivent le comprendre. Hier a été une journée agréable. Grâce à toi, je me sens revivre. Merci, Nath.

– Pas de quoi, mon chaton.

Un échange chaleureux, et je lui adressai un sourire, le premier de la journée.

– Euh, excusez-moi les filles... Williams... J’ai besoin de vous dans mon bureau. Tout de suite, mademoiselle.

– D’accord, madame Jenner, un instant.

Le regard surpris de Nathalie m'intercepta.

– Non, je n’ai rien fait, t’inquiète... Enfin, je pense, rassurai-je.

– Bien, ma belle, je serai à la bibliothèque. Viens me voir si tu termines.

– D’accord.

Nathalie se détourna, ses baskets pivotant, et je m'acheminai vers le bureau de madame Jenner, situé à proximité de notre salle. Femme métissée, probablement du même âge que mon père, je ne pouvais anticiper ses intentions. Mon tempérament éloigné des querelles et mes résultats corrects m'apaisaient. Cependant, en pénétrant dans son bureau, l'inquiétude perceptible dans ses yeux éveilla en moi une crainte soudaine. Elle me fixait intensément, et à cet instant, une anxiété indéfinissable s'empara de moi.

– Viens t’asseoir là, ma petite, dit-elle en m'indiquant la chaise devant elle. J’ai juste quelques questions à te poser.

– Bien, madame.

– D’abord, comment vas-tu ?

– Je vais très bien.

– Tu es sûre ?

– Oui, pourquoi ?

– Lors de la réunion entre les professeurs, certains m’ont confié que tu étais plutôt ailleurs ces derniers temps. Tu ne réagissais plus comme avant. J’espère que tout va bien... La fatigue ? La maison ?

– Tout marche comme sur des roulettes, madame Jenner. C’est juste que je suis assez épuisée ces derniers temps, mais ne vous inquiétez pas, je saurai reprendre de mes forces.

– D’accord, ma petite. Essaie de prendre soin de toi. Nous comptons beaucoup sur toi pour les résultats, et ne détourne pas de ton objectif... Je veux parler de la bourse.

– J’y travaille.

– Bien. Je vois que tu t’es faite une nouvelle amie.

– Nathalie?

– Oui, Parker... Tout va bien avec elle... J’espère qu’elle n’est pas une mauvaise fréquentation pour toi.

– Ah, je vois un peu. Vous avez sûrement reçu un appel de mon père.

– En effet. Je ne voudrais pas intervenir dans vos embrouilles de famille. Tout ce que j’attends de toi, comme je te l’ai dit, ce sont les résultats et également que tu réalises tes rêves.

– Et comme je vous l’ai également dit, vous n’avez aucun souci à vous faire sur ce point, lui dis-je sur un ton déterminé.

– Bien. Tu peux disposer.

– Merci.

Je me levai de la chaise et m'en allai quand elle me rappela. Je me retournai.

– Un instant... J’oubliais... Tu n’aurais pas de nouvelles de Vitelli ?

– Eva ? Non... Non. Il y a un problème avec elle ?

– Elle s’est disputée avec son père également, et hier, elle s’est enfuie de la maison, ce qui ne serait pas de ses habitudes. Tu ne connaîtrais pas quelqu’un assez proche d’elle chez qui elle serait allée ?

– Non, pas vraiment. Vous devriez demander à Loïck, il pourrait sûrement savoir.

– Très bien. Merci, Emma, et à bientôt.

– À bientôt, madame Jenner.

Eva disparue ? Ce n’était pas vraiment dans ses habitudes. Des disputes avec son père, elle en faisait tout le temps. Mais jamais elle n’avait eu le courage de partir. Peut-être que la dernière était la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Tant mieux, elle ne me manquait absolument pas, et j'aurais au moins la paix avec cette fille. Je traversai les escaliers et me rendis à la bibliothèque. Nathalie était en train de discuter avec d’autres élèves. Je partis m’asseoir. Quand elle me vit, elle vint me rejoindre.

– Alors ?

– Rien de grave, comme je te l’ai dit. Elle voulait juste s’assurer que tout se passe bien de mon côté, et devine quoi ?

– Quoi ?

– Elle m’a demandé des nouvelles d’Eva.

– Ah bon ? Qu’est-ce qui lui est arrivé à l’idiote ? Elle a disparu ?

– C’est pas drôle.

– Tout doux, ma belle. Je rigole, haha.

J’étais sidérée par l'expression sur le visage de Nathalie. Elle se moquait ouvertement d’Eva. Je savais qu'elle lui en voulait à cause de moi, mais je ne m'attendais pas à ce niveau de mépris.

– Tu savais qu’elle avait fui de la maison ?

– Ah oui ? Pourquoi ?

– Il paraît qu’elle s’est disputée avec son père.

– Tant mieux. Elle ne me manque pas, cette fille.

Désolée de l’avouer, mais je ne l’aime pas. Qu’elle aille se faire voir.

– T’es méchante, toi.

– Non, pas du tout, mon chaton. J’aime pas qu’on touche à ceux que j’aime, et toi je t’aime. Je ferai tout pour te protéger.

– Merci, Nath.

Je ne pourrais pas décrire exactement le sentiment qui m’animait à cet instant, mais une chose était certaine : jamais je ne laisserais Nathalie, ni ne permettrais à qui que ce soit de nous séparer. Pas même mon père. Nos liens se renforçaient chaque jour, et elle me prouvait qu'elle m’aimait , tenait à moi, et que c’était la seule sur qui je pouvais vraiment compter. C'était une amitié pour la vie.

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